Senecartours, l'Anoci et le Fesman: un scandale double-face (Par Cheikh Yérim Seck)

DAKARACTU.COM  Ce n’est plus un festival de scandales, c’est maintenant un carnaval de grossières décisions qui plombent sérieusement l’orthodoxie dans laquelle aurait dû être géré le Festival mondial des arts nègres. L’écheveau que l’on dévide est un torrent de surprises toutes aussi stupéfiantes les unes que les autres. La rubrique « Transport des Artistes » laisse apparaître qu’un contrat de 4 milliards a été signé entre les organisateurs et une société de location de véhicules, Sénécartours pour ne pas la nommer, sans appel d’offres, alors que cette société ne pouvait à elle seule assurer un service aussi gigantesque. Dakaractu est en mesure d’écrire que certaines autorités du secteur de la location de véhicules avaient tiré la sonnette d’alarme et fait part aux responsables et du Fesman et de l’Armp de leurs réserves et déposé auprès d’eux de nombreux recours, tous restés sans suite. Déjà échaudés par ce qui leur était arrivé lors du sommet de l’Oci, au cours duquel un seul prestataire, toujours Sénécartours, avait été habilité par l’Anoci à gérer le transport des hôtes du Sénégal, après un appel d’offres qui ne l’était que de nom, les loueurs professionnels de voitures, regroupés au sein du Saplv, un syndicat affilié au Cnp,  écrivent, dès avril 2009, une lettre à Alioune Badara Bèye, dans laquelle « ils dénoncent l’octroi du volet location de voitures à un loueur et uniquement à un loueur et que cette personne aurait même demandé un acompte de 400 millions pour acheter des nouveaux bus ». Dans cette missive au président d’alors du comité d’organisation du Fesman, le Saplv, sous la houlette de son président Aimé Sène, le très sérieux directeur général de Hertz Sénégal, dénonce la passation de ce juteux marché sans consultation préalable de leur syndicat et met en garde les organisateurs en ces termes : « Il devient urgent de prendre les mesures nécessaires pour que la transparence, la lumière et l’équité soient à la base de la passation de ce marché, car les membres du syndicat ne comprennent pas cette attitude et sont décidés à tout mettre en œuvre pour que ce volet transport du Fesman soit équitablement distribué, pour le succès de cet évènement ». Cette lettre de rappel aux fondements de l’orthodoxie resta sans suite, comme si les dès, en plus d’être pipés, étaient déjà jetés. Les loueurs professionnels ne baissent pas les bras pour autant et alertent l’Armp, l’autorité de régulation des marchés publics, le  23 décembre 2010, pour, disent-ils, «  introduire une lettre de recours auprès de cette agence suite à l’attribution du marché de la location de voitures et de bus pour les besoins du Festival mondial des arts nègres à une seule entreprise et sans appel d’offres ». Aimé Sène, le président du Saplv, remue le couteau dans la plaie et rappelle que ce n’est pas la première fois que cela se passe « de façon aussi criarde comme pour le sommet de l’Oci où la quasi-totalité du marché avait été donnée à une seule société et même à des sociétés fictives ». Il conclut sa missive à l’Armp en maintenant sa confiance « en une réaction équitable du syndicat qu’il dirige, fort de ses 27 membres, et demande à l’Armp un règlement définitif de cette situation qui n’honore pas notre pays et n’encourage pas la performance ». Le 15 septembre 2011, tout arrive, l’Armp répond au SAPLV et l’informe que « le comité de règlement des différends s’est prononcé sur ledit dossier en le transférant à la cellule d’enquête et d’inspection sur les procédures de passation et d’exécution des marchés publics logée à l’Armp ». Aujourd’hui, le rapport fuit de partout et les décisions nauséabondes commencent à remonter à la surface, comme cette avance de 400 millions faite à Sénécartours pour acheter des bus, ou ces factures dont les montants frisent  les 100 millions par jour, juste pour amener des artistes de l’aéroport à leur hôtel, de leur hôtel à leur lieu de concert et quelques excursions supplémentaires. Convenez que ça fait cher le transport d’artistes du Fesman. C’est peut-être lié à l’euphorie qu’a distillée cette foison des musiques et des arts du monde entier. Le Syndicat autonome des professionnels de loueurs de voitures, lui, en tous cas, a hâte de voir les colonnes qui ornent les rapports en question. Histoire sans doute de rigoler un bon coup.