DAKARACTU.COM Avec votre permission, M. le président de la République, je me permets de vous proposer le projet de discours que voici, à l’occasion de votre sortie très attendue de ce jeudi 14 juillet.
« Mesdames et messieurs les sénateurs, députés et élus locaux, permettez-moi de profiter de la tribune que m’offre notre rencontre pour parler aux Sénégalais.
Mes chers compatriotes, je voudrais commencer par vous dire que je vous ai compris. Dans les manifestations des 23 et 27 juin derniers, j’ai lu l’expression d’un peuple soucieux de la protection des institutions de la République et de l’amélioration de ses conditions de vie à travers une correcte desserte en énergie électrique. Si je ne peux pas discuter votre volonté exprimée dans la rue, je puis au moins plaider ma bonne foi. Je suis convaincu que le schéma institutionnel qui vous avait été proposé à travers la réforme constitutionnelle avortée était mieux à même de parachever la construction de l’Etat de droit et de notre modèle démocratique. Je ne peux toutefois pas avoir la prétention de pouvoir faire votre bonheur contre votre gré ni celle d’avoir raison contre tous. Pour avoir consacré toute ma vie au combat pour la démocratie, je ne pouvais que me plier à la volonté populaire. Je souhaite néanmoins qu’il n y ait plus de confusion entre droit de manifester et vandalisme. Les casses, atteintes aux personnes, destructions de biens publics et privés sont indignes d’une démocratie comme le Sénégal. J’ai donné des instructions fermes aux ministres de l’Intérieur et de la Justice : tous les auteurs et complices de tels actes vont être identifiés, interpellés et sanctionnés conformément à la loi.
Je reconnais le droit de tous les Sénégalais à accéder à l’énergie électrique en quantité suffisante. Ceux qui étaient dans la rue le 27 juin doivent admettre toutefois que mon gouvernement ne ménage aucun effort pour résorber le déficit d’énergie, cause des récurrents délestages. Le plan « Takkal », doté d’une enveloppe globale de 650 milliards de francs cfa sur quatre ans, constitue une solution définitive à ce problème. Rien que pour l’exercice budgétaire en cours, l’Etat a fait un effort exceptionnel pour mobiliser 365 milliards de francs cfa qui vont dans un premier temps stabiliser la production d’énergie en attendant que les investissements structurels sécurisent définitivement la distribution. Je vous demande un peu de patience et de compréhension. Nous sommes d’autant plus sur la bonne voie que nos partenaires extérieurs croient en notre démarche et nous soutiennent. L’Agence française de développement vient de nous accorder un soutien de 40 milliards de francs cfa. Nous allons y arriver. Ce problème de l’énergie est technique : nous avons hérité d’installations vétustes et de besoins en énergie toujours accrus suscités par le progrès économique du pays. Ce n’est pas une question politique, encore moins une question de personne. J’ai entendu beaucoup de discours sur le ministre de l’Energie, Karim Wade, qui se trouve fatalement être mon fils. Tout père étant naturellement porté à protéger son enfant, je ne l’aurais pas nommé à ce poste difficile et exposé si je n’étais pas convaincu de sa capacité à relever le défi.
Mais l’insistance continue de certains qui tirent sur cette corde sensible pollue chaque jour davantage le débat politique. Voilà pourquoi, après concertation avec le ministre de l’Energie, j’ai décidé de le démettre de toutes ses fonctions gouvernementales pour le nommer dans mon cabinet, afin de pouvoir continuer à bénéficier de sa loyauté, de ses conseils et son expertise sur certaines questions stratégiques pour le pays. Je vais remanier le gouvernement et former une équipe resserrée. Dans le souci de faire des économies budgétaires qui pourront alimenter des secteurs stratégiques comme l’énergie et le soutien aux prix des produits de première nécessité, j’ai également décidé de dissoudre le Sénat et le Conseil économique et social. Le train de vie de l’Etat va subir une réduction drastique : des mesures concrètes dans cette direction vont vous être annoncées dans les plus brefs délais.
Sur les questions politiques soulevées par l’opposition, j’ai marqué mon accord pour un dialogue total. Pourvu qu’il se déroule dans le cadre du respect de la République et de ses institutions. Elu jusqu’en février 2012, je ne saurais discuter du principe de poursuivre mon mandat. La question de ma candidature à la présidentielle de 2012 est devenue un sujet de préoccupation nationale. Après consultation de ma propre conscience, de ma famille proche et de mes compagnons en politique, j’ai décidé de renoncer à briguer à nouveau la magistrature suprême. On ne peut pas faire son temps et celui des autres. Je crois avoir rempli ma mission au service de mon pays. Je vais quitter après avoir organisé un scrutin transparent qui garantisse une transmission pacifique du pouvoir et la sauvegarde de la stabilité de notre pays. A l’intention de ma famille politique, je voudrais exprimer ma volonté de l’aider à choisir et à préparer un candidat qui puisse décrocher une victoire incontestable à l’issue d’un scrutin au-dessus de tout soupçon. Aux militants et militantes de mon parti, à tous les Sénégalais et toutes les Sénégalaises qui m’ont toujours soutenu, je voudrais dire que j’ai fait le choix de prendre de la hauteur au nom de l’enjeu stratégique de la sauvegarde de la démocratie dans notre pays. Mon histoire personnelle me dicte une sortie de scène semblable à celle de tous les grands hommes du passé et de l’époque contemporaine. Le juriste que je suis n’est pas convaincu de l’irrecevabilité de sa candidature en 2012. Mais l’unité nationale est au-dessus du droit.
Pour apaiser la situation globale dans le pays, tous les élus récemment remplacés par des délégations spéciales vont être rétablis dans leurs fonctions au cours des prochains jours. J’ai été trompé sur la façon dont ils géraient leurs collectivités respectives. La réaction de leurs administrés m’a convaincu qu’elle n’était pas si mauvaise que cela. Le comité de veille doit passer à une vitesse supérieure pour régler les questions en suspens du processus électoral : la sécurisation du fichier, l’inscription des 1,2 million de jeunes non encore enrôlés, le rôle et la place de la Cena… Je veux consolider la place de démocratie majeure de notre pays en Afrique en lui offrant des élections apaisées et transparentes. Le Sénégal m’a tout donné. Je reste lui devoir cela.
Je vous remercie. »
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