DAKARACTU.COM - Quand j’ai titré, sur cette page de Yerimpost, « Abdoulaye Wade prépare la guerre », nombreux sont ceux qui m’ont appelé de par le monde. Certains soutenaient que Wade était conscient qu’il n’avait aucun intérêt à aller en guerre. D’autres estimaient que le chef de l’Etat était acculé au point de n’avoir d’autre choix que de négocier la paix. Dans ce texte à l’intitulé certes alarmiste, j’évoquais des situations qui sont ressorties à la virgule près dans le discours présidentiel de ce 14 juillet. Wade a confirmé nos informations en déclarant que le 23 juin l’avait surpris et qu’il avait donné des instructions au ministre de l’Intérieur pour que cela ne se reproduise plus. Il ne s’est pas limité à cela. Il a également et surtout renforcé les effectifs de la police avec l’arrivée de 270 ex-policiers municipaux, commandé des armes et équipements de maintien de l’ordre au Maroc, en Arabie Saoudite et en France, organisé les jeunes de son parti en « comités de défense de la démocratie et des institutions », sortes de contingents de combat destinés le cas échéant à en découdre avec ceux qui ont occupé la rue les 23 et 27 juin… Les lecteurs de dakaractu.com n’ont pas dû être surpris par la posture de combat du chef de l’Etat ni par la tonalité de son discours. D’autant que dans un autre texte titré « Le dialogue ou le chaos », j’ai écrit que Wade ne négociera jamais le principe de la poursuite de son présent mandat, sa candidature à la présidentielle de 2012 et le sort de son fils et ministre d’Etat, Karim Wade.
Vous me permettrez donc, chers internautes, de ne pas trop m’attarder sur le discours du 14 juillet dont tous les contours vous avaient déjà été dessinés par dakaractu.com sur la foi d’informations recueillies auprès de ses sources. La question que je vais aborder est celle relative à ce qui va se passer à partir de maintenant.
En réponse à cette interrogation, dakaractu.com est en mesure d’affirmer que la guerre ne fait que commencer. Ce discours du 14 juillet n’est que le premier d’une série d’actes qui vont être posés dans les jours et semaines à venir. Dans un avenir très proche, Wade va défier ses adversaires sur le terrain de l’occupation de la rue. Il a donné l’instruction ferme à Pape Diop, qui organise l’événement, de mobiliser au moins un demi-million de personnes à l’occasion du meeting prévu sur la VDN le 23 juillet. Cette démonstration de force populaire est une tribune du haut de laquelle le chef de l’Etat va régler ses comptes. Sauf changement de dernière minute, il répondra ce jour-là au Parti socialiste français et au ministre des Affaires étrangères de l’Hexagone, Alain Juppé, auteurs de déclarations qui l’ont blessé. Il en profitera également pour défier à nouveau l’opposition et la société civile réunie au sein du Mouvement des forces vives du 23 juin. C’est ainsi : Abdoulaye Wade est convaincu que ses adversaires ont largement entamé leur capacité de nuisance et se trouvent aujourd’hui dans l’impossibilité de le renverser par la rue. A quelques-uns de ses proches, il a dit, le 13 juillet : « J’ai occupé la rue pendant quatre vingt dix jours en 1988, et Abdou Diouf n’a pas perdu le pouvoir. Ce n’est pas parce qu’il y a eu deux jours de manifestations que je dois me sentir menacé. »
En dehors de la présidentielle anticipée, qui est irréalisable compte tenu du niveau d’avancement du processus électoral, Wade ne va céder sur rien. Le départ de son fils du gouvernement, réclamé par l’opposition et la société civile, n’est pas d’actualité. La seule fois où le chef de l’Etat a évoqué cette exigence du Mouvement des forces vives du 23 juin avec Karim Wade, celui-ci lui a dit : « J’ai bâti une maison de lumière jusqu’au toit. Et, au moment de le poser, on me demande de partir. Si mon départ pouvait amener l’électricité, je serais parti tout de suite. »
Wade refuse même une proposition qui ne prête pas à conséquence que ses proches lui ont faite : resserrer le gouvernement pour donner un signal qu’il a compris le message de ceux qui se sont soulevés les 23 et 27 juin. Déterminé à se battre, il s’abstient de poser le moindre acte susceptible d’être interprété comme un aveu de faiblesse ou comme une victoire symbolique pour ses adversaires. Ce politique forgé sous les feux de vingt-six ans d’opposition n’a la pleine possession de ses moyens que dans l’adversité.
Sur la question de sa candidature, Abdoulaye Wade compte clore le débat par des actes qui vont la rendre irréversible et mettre tout le monde devant le fait accompli. Il va démarrer sa campagne électorale le 23 juillet, compléter son directoire de campagne qui ne comprend aujourd’hui qu’un président (Souleymane Ndéné Ndiaye), un responsable de la communication (Me Amadou Sall) et un trésorier (Pape Diop)… Mais aussi convoquer pour le mois d’octobre prochain le congrès au cours duquel le Parti démocratique sénégalais (PDS) va l’investir officiellement comme son candidat.
Politique jusqu’à la caricature, le plus vieux crocodile du marigot politique sénégalais est convaincu que tous ses adversaires de 2012 finiront dans son estomac. En l’absence d’un bloc fort, à l’image de celui qui avait porté sa candidature victorieuse en 2000 contre Abdou Diouf, il compte sur l’émiettement des forces de l’opposition pour la battre.
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