Au cinquième jour du procès de Hissene Habré, les témoins ont fait état de plusieurs charges. Cependant, peu d’entre eux ont pu corroborer les preuves irréfutables des accusations de crimes contre l’humanité, de tortures et de crimes de guerre qu’aurait commis Hissène Habré à la tête de l’Etat du Tchad de 1982 à 1990.
Hier, la défense a voulu démontrer que les questions de clivages ethniques et d’appartenance régionale étaient fortement moulées dans l’esprit populaire tchadien. La tactique est claire. Il s’agissait, pour les robes noires commises d’office par les Chambres africaines extraordinaires (Cae) pour l’ancien président du Tchad, de démontrer que contrairement aux idées reçues, Hissène Habré n’a nullement mis en avant un système ségrégationniste consistant à réprimer les uns, selon leur appartenance ethnique.
A cet égard, c’est l’avocat Me Mounir Ballal qui faisait office de doyen du pool de la défense commis d’office, de s’essayer à l’exercice. S’adressant au témoin Alingué Jean Baoué, il lui a demandé si, d’aventure, dans la pratique tchadienne d’ordre judicaire ou administratif, il est d’usage de décliner l’appartenance ethnique des individus lors des interrogatoires. Le témoin a préféré ne pas donner de réponse face à une telle interrogation. Est-il mentionné dans votre carte d’identité nationale votre appartenance ethnique ? a demandé l’avocat. Devant une telle interrogation, le témoin s’est, à nouveau, emmuré dans le silence.
La constitution de la République de Tchad prend-elle en compte le caractère laïc ? s’est aussi interrogé l’avocat. A cette question, le témoin n’a pas tardé à répondre par l’affirmative. Le président Hissène Habré, au vu des textes, était-il le président légitime de la République du Tchad ? a, en outre, demandé l’avocat. La réponse fut, là aussi, positive.
Lorsqu’il s’est agi de se prononcer sur l’exactitude de la somme emportée par Hissène Habré alors qu’il quittait son pays en catastrophe, via le Cameroun, Alingué Jean Baoué était dans l’incapacité de donner le montant exact. « C’est entre 3 et 3,5 milliards », a-t-il dit. Et de poursuivre : « Le différentiel de 500 millions importe peu, l’essentiel c’est qu’il est parti avec de l’argent du trésor public », a-t-il dit. Il aurait emporté 7 milliards dont 3 du Trésor et 4 autres qui appartiendraient à des banques, avait précédemment dit le témoin, dans un rapport lu par l’avocat de la défense. Pouvez-vous nous dire si le pouvoir qui a renversé le régime de Hissène Habré a restitué au Trésor public le reste de la somme présumée emportée par Hissène Habré ? a alors demandé l’avocat. « Je n’en sais rien », lui rétorque le témoin. « Je ne suis pas ici pour parler au nom du Trésor public », a-t-il poursuivi.
L’avocat a ensuite voulu savoir quelle était la nature des rapports qui liaient le témoin au président Hissène Habré. « Au vu de votre implication dans la gestion du pouvoir de Hissène Habré où vous avez occupé de hautes fonctions, est-ce à dire que vous croyiez à ses idéaux », a-t-il dit au témoin. Ce dernier de se dédouaner. Il affirme clairement ne pas, à l’époque, partager la démarche de Hissène Habré, malgré le fait qu’il a occupé de grandes fonctions lorsque celui-ci était au pouvoir.
Un des juges de la Chambre a voulu savoir si le témoin a une fois entendu Hissène Habré cautionner ou avaliser les tueries et tortures. Le témoin affirme n’avoir jamais clairement entendu Hissène Habré donner des instructions allant dans le sens d’encourager des massacres. Il demeure toutefois persuadé que ces faits ne pouvaient se produire sans que le président ne soit au courant ou ne donne son aval.
Une campagne de propagande initiée par Amnesty International au Tchad
Michael Dothringe, 62 ans et spécialiste des sciences sociales, a fait sa déposition devant la Chambre au titre de témoin. Il a travaillé pour Amnesty International de 1977 à 1995. Il était rattaché au département chargé de collecter des informations sur les violations des droits civils et civiques. Il a, à ce titre, effectué plusieurs recherches sur les événements intervenus au Tchad de 1982 à 1990. Le témoin note que les informations lui ont été transmises par des victimes qui, pour la plupart, avaient fait la prison. Les services s’assuraient alors que la confidentialité de l’individu en question était fortement secrète. « Cette méthode était appliquée dans le souci de ne pas exposer les sources d’informations », fait-il savoir. « Le sort réservé aux personnes disparues était tenu hautement secret par les autorités tchadiennes de l’époque », a dit le témoin. Il a révélé s’être rendu en Ndjamena en 1991, après la chute du pouvoir d’Hissène Habré. Au cours de cette visite, il dit avoir vu plus de 7.000 messages adressés à la Dds.
Machine à propagande mise en branle
Dans son propos, le témoin a fait montre de prudence. Il s’est certes obstiné à transmettre des informations à la Cour, mais sous le sceau du conditionnel. Pour faire propager les informations recueillies dans les anciens locaux de la Dds, le spécialiste dit que l’organisation Amnesty s’est tournée vers les presses africaines et tchadiennes. L’objectif était « de faire comprendre au monde entier les agissements de la Dds ». Des rapports annuels ont été publiés, des reportages et des émissions réalisés, dans le seul but de diffuser, de la façon la plus large, les informations recueillies, a-t-il informé.
Les Nations Unies, ainsi que toutes les organisations sensibles aux droits humains ont été intégrées dans cette campagne. La France et les Usa ont été également mis à contribution dans la campagne de propagande sur les agissements contre les droits humains du régime de Hissène Habré, a-t-il informé. Le spécialiste a, cependant, avoué que son organisation n’était pas dans la capacité de savoir si les informations qui leur étaient rapportées, étaient, de tout le temps, exactes. « Plusieurs méthodes de tortures nous ont été rapportées à travers les témoignages détenus. La plupart des décès n’étaient pas liés à la torture. Ils sont souvent été le résultat de la privation en nourriture, eau ou soins médicaux », relève t-il.
Plusieurs dénonciations, peu de preuves
Un communiqué de presse rendu public par Amnesty International faisant référence à des exécutions massives notées au Sud du Tchad, va légèrement changer la donne. En effet, c’est au cours de cette même année (1983) que la première réaction officielle a été notée. Celle-ci émane du ministre de l’Information de l’époque, disant que « des personnes mal intentionnées donnaient des informations fausses à Amnesty International ». Le ministre invitait alors les membres d’Amnesty international à venir au Tchad afin de vérifier sur le terrain ces informations.
Une fois à N’Djamena, l’expert a souligné qu’ils étaient dans l’incapacité de démontrer la véracité des informations reçues. Le groupe d’experts a pu se rendre sur le terrain dans le dessein de vérifier le bienfondé des informations. Certes des témoignages ont été rapportés, a-t-il noté, mais aucun n’a été avéré. L’expert d’Amnesty International note dans son témoignage que l’organisation des droits humains avait, à l’époque, reçu plusieurs témoignages faisant état de tortures et d’assassinats. Toutefois, ces accusations, ont peu ou pas du tout été corroborées de faits avérés, vérifiables sur le terrain. A l’époque où Hissène Habré était encore au pouvoir, le spécialiste a souligné que deux misions d’expertise se sont rendues au Tchad, mais elles n’ont pas pu vérifier de visu les accusations d’assassinats proférées à l’endroit des autorités. C’est une fois le régime de Hissène Habré renversé, que Amnesty International s’est rendu compte que la plupart des personnes déclarées disparues étaient en réalité assassinées, informe-t-il.
INTERDICTION DE DIFFUSION DU PROCES AU TCHAD : Cela démontre qu’Idriss Deby Itno n’est pas un démocrate, selon la défense
Pour les avocats de la défense, l’interdiction de diffusion du procès est incompréhensible. « C’est une décision regrettable car un procès comme celui de Hissène Habré concerne le peuple tchadien. Il aurait été souhaitable que ce peuple soit au fait de ce qui se passe à Dakar, dans le cadre de ce procès. Lorsqu’Idriss Deby Itno a renversé le président Hissène Habré, il disait que c’était pour démocratiser le Tchad. Mais cette décision est d’ordre à démontrer que la démocratie n’est pas encore de mise au Tchad », a affirmé Me Ballal.
Quant à l’avocat des victimes, Me Assane Dioma Ndiaye, il a souligné que « le peuple tchadien a le droit de savoir». « Dès que le président Idris Deby Itno a commencé à croire que ce procès pouvait l’atteindre par rapport à ses projections, il a interdit sa diffusion au Tchad. Il a commencé à ne plus collaborer avec les Chambres.
Le Soleil
Hier, la défense a voulu démontrer que les questions de clivages ethniques et d’appartenance régionale étaient fortement moulées dans l’esprit populaire tchadien. La tactique est claire. Il s’agissait, pour les robes noires commises d’office par les Chambres africaines extraordinaires (Cae) pour l’ancien président du Tchad, de démontrer que contrairement aux idées reçues, Hissène Habré n’a nullement mis en avant un système ségrégationniste consistant à réprimer les uns, selon leur appartenance ethnique.
A cet égard, c’est l’avocat Me Mounir Ballal qui faisait office de doyen du pool de la défense commis d’office, de s’essayer à l’exercice. S’adressant au témoin Alingué Jean Baoué, il lui a demandé si, d’aventure, dans la pratique tchadienne d’ordre judicaire ou administratif, il est d’usage de décliner l’appartenance ethnique des individus lors des interrogatoires. Le témoin a préféré ne pas donner de réponse face à une telle interrogation. Est-il mentionné dans votre carte d’identité nationale votre appartenance ethnique ? a demandé l’avocat. Devant une telle interrogation, le témoin s’est, à nouveau, emmuré dans le silence.
La constitution de la République de Tchad prend-elle en compte le caractère laïc ? s’est aussi interrogé l’avocat. A cette question, le témoin n’a pas tardé à répondre par l’affirmative. Le président Hissène Habré, au vu des textes, était-il le président légitime de la République du Tchad ? a, en outre, demandé l’avocat. La réponse fut, là aussi, positive.
Lorsqu’il s’est agi de se prononcer sur l’exactitude de la somme emportée par Hissène Habré alors qu’il quittait son pays en catastrophe, via le Cameroun, Alingué Jean Baoué était dans l’incapacité de donner le montant exact. « C’est entre 3 et 3,5 milliards », a-t-il dit. Et de poursuivre : « Le différentiel de 500 millions importe peu, l’essentiel c’est qu’il est parti avec de l’argent du trésor public », a-t-il dit. Il aurait emporté 7 milliards dont 3 du Trésor et 4 autres qui appartiendraient à des banques, avait précédemment dit le témoin, dans un rapport lu par l’avocat de la défense. Pouvez-vous nous dire si le pouvoir qui a renversé le régime de Hissène Habré a restitué au Trésor public le reste de la somme présumée emportée par Hissène Habré ? a alors demandé l’avocat. « Je n’en sais rien », lui rétorque le témoin. « Je ne suis pas ici pour parler au nom du Trésor public », a-t-il poursuivi.
L’avocat a ensuite voulu savoir quelle était la nature des rapports qui liaient le témoin au président Hissène Habré. « Au vu de votre implication dans la gestion du pouvoir de Hissène Habré où vous avez occupé de hautes fonctions, est-ce à dire que vous croyiez à ses idéaux », a-t-il dit au témoin. Ce dernier de se dédouaner. Il affirme clairement ne pas, à l’époque, partager la démarche de Hissène Habré, malgré le fait qu’il a occupé de grandes fonctions lorsque celui-ci était au pouvoir.
Un des juges de la Chambre a voulu savoir si le témoin a une fois entendu Hissène Habré cautionner ou avaliser les tueries et tortures. Le témoin affirme n’avoir jamais clairement entendu Hissène Habré donner des instructions allant dans le sens d’encourager des massacres. Il demeure toutefois persuadé que ces faits ne pouvaient se produire sans que le président ne soit au courant ou ne donne son aval.
Une campagne de propagande initiée par Amnesty International au Tchad
Michael Dothringe, 62 ans et spécialiste des sciences sociales, a fait sa déposition devant la Chambre au titre de témoin. Il a travaillé pour Amnesty International de 1977 à 1995. Il était rattaché au département chargé de collecter des informations sur les violations des droits civils et civiques. Il a, à ce titre, effectué plusieurs recherches sur les événements intervenus au Tchad de 1982 à 1990. Le témoin note que les informations lui ont été transmises par des victimes qui, pour la plupart, avaient fait la prison. Les services s’assuraient alors que la confidentialité de l’individu en question était fortement secrète. « Cette méthode était appliquée dans le souci de ne pas exposer les sources d’informations », fait-il savoir. « Le sort réservé aux personnes disparues était tenu hautement secret par les autorités tchadiennes de l’époque », a dit le témoin. Il a révélé s’être rendu en Ndjamena en 1991, après la chute du pouvoir d’Hissène Habré. Au cours de cette visite, il dit avoir vu plus de 7.000 messages adressés à la Dds.
Machine à propagande mise en branle
Dans son propos, le témoin a fait montre de prudence. Il s’est certes obstiné à transmettre des informations à la Cour, mais sous le sceau du conditionnel. Pour faire propager les informations recueillies dans les anciens locaux de la Dds, le spécialiste dit que l’organisation Amnesty s’est tournée vers les presses africaines et tchadiennes. L’objectif était « de faire comprendre au monde entier les agissements de la Dds ». Des rapports annuels ont été publiés, des reportages et des émissions réalisés, dans le seul but de diffuser, de la façon la plus large, les informations recueillies, a-t-il informé.
Les Nations Unies, ainsi que toutes les organisations sensibles aux droits humains ont été intégrées dans cette campagne. La France et les Usa ont été également mis à contribution dans la campagne de propagande sur les agissements contre les droits humains du régime de Hissène Habré, a-t-il informé. Le spécialiste a, cependant, avoué que son organisation n’était pas dans la capacité de savoir si les informations qui leur étaient rapportées, étaient, de tout le temps, exactes. « Plusieurs méthodes de tortures nous ont été rapportées à travers les témoignages détenus. La plupart des décès n’étaient pas liés à la torture. Ils sont souvent été le résultat de la privation en nourriture, eau ou soins médicaux », relève t-il.
Plusieurs dénonciations, peu de preuves
Un communiqué de presse rendu public par Amnesty International faisant référence à des exécutions massives notées au Sud du Tchad, va légèrement changer la donne. En effet, c’est au cours de cette même année (1983) que la première réaction officielle a été notée. Celle-ci émane du ministre de l’Information de l’époque, disant que « des personnes mal intentionnées donnaient des informations fausses à Amnesty International ». Le ministre invitait alors les membres d’Amnesty international à venir au Tchad afin de vérifier sur le terrain ces informations.
Une fois à N’Djamena, l’expert a souligné qu’ils étaient dans l’incapacité de démontrer la véracité des informations reçues. Le groupe d’experts a pu se rendre sur le terrain dans le dessein de vérifier le bienfondé des informations. Certes des témoignages ont été rapportés, a-t-il noté, mais aucun n’a été avéré. L’expert d’Amnesty International note dans son témoignage que l’organisation des droits humains avait, à l’époque, reçu plusieurs témoignages faisant état de tortures et d’assassinats. Toutefois, ces accusations, ont peu ou pas du tout été corroborées de faits avérés, vérifiables sur le terrain. A l’époque où Hissène Habré était encore au pouvoir, le spécialiste a souligné que deux misions d’expertise se sont rendues au Tchad, mais elles n’ont pas pu vérifier de visu les accusations d’assassinats proférées à l’endroit des autorités. C’est une fois le régime de Hissène Habré renversé, que Amnesty International s’est rendu compte que la plupart des personnes déclarées disparues étaient en réalité assassinées, informe-t-il.
INTERDICTION DE DIFFUSION DU PROCES AU TCHAD : Cela démontre qu’Idriss Deby Itno n’est pas un démocrate, selon la défense
Pour les avocats de la défense, l’interdiction de diffusion du procès est incompréhensible. « C’est une décision regrettable car un procès comme celui de Hissène Habré concerne le peuple tchadien. Il aurait été souhaitable que ce peuple soit au fait de ce qui se passe à Dakar, dans le cadre de ce procès. Lorsqu’Idriss Deby Itno a renversé le président Hissène Habré, il disait que c’était pour démocratiser le Tchad. Mais cette décision est d’ordre à démontrer que la démocratie n’est pas encore de mise au Tchad », a affirmé Me Ballal.
Quant à l’avocat des victimes, Me Assane Dioma Ndiaye, il a souligné que « le peuple tchadien a le droit de savoir». « Dès que le président Idris Deby Itno a commencé à croire que ce procès pouvait l’atteindre par rapport à ses projections, il a interdit sa diffusion au Tchad. Il a commencé à ne plus collaborer avec les Chambres.
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