Le bréviaire de Macky Sall au seuil des locales (Par Babacar Justin Ndiaye)

Quelques heures après le commencement de la campagne électorale, le Président de la république et le Secrétaire général de l’APR, Macky Sall, a feuilleté son bréviaire devant le micro de RFI. La compilation de credo n’est pas balèze. Le numéro un de l’APR et non moins chef de l’Etat a fait volontiers dans le laconisme. A la question de savoir si les locales en cours ne seront pas celles de toutes les confusions, Macky Sall a lâché : « J’ai laissé faire au sein de mon Parti ». Pareille réponse est-elle politiquement sommaire ou suicidaire ? Elle peut également être sibylline, c’est-à-dire, bourrée d’arrière-pensées et badigeonnée de non-dits.


Le bréviaire de Macky Sall au seuil des locales (Par Babacar Justin Ndiaye)
 De prime abord, il est pour que les ardeurs et les ambitions foisonnent au sein de l’APR et –  par ricochet – dans l’entité coalisée que constitue Benno Bokk Yakaar (BBY). C’est démocratiquement séduisant voire romantique. Les observateurs, eux, pensent qu’il s’agit plutôt d’un écheveau (impossible à démêler) d’attitude forcée, de choix calculé et de gêne réelle. En effet, il est difficile de comprendre que le Président de la république Macky Sall qui refuse obstinément de quitter la tête de son Parti – malgré ses charges au sommet de l’Etat et les recommandations des « Assises nationales » chères à certains de ses alliés de BBY – puisse encourager la chienlit au cœur de l’APR. On est ici en face d’un déficit d’autorité dans un immeuble (l’APR) sans rez-de-chaussée, c’est-à-dire, sans ancrage national à la dimension des responsabilités nationales.  Péché originel que traine ce jeune Parti, aux caractéristiques de TGV, vite arrivé au pouvoir.   

Des échos sonores et des observations irréfutables dessinent partout une peau de léopard avec une APR qui se fragmente ici, des alliés qui se confrontent là, et ailleurs, une mouvance présidentielle qui s’autodétruit quand elle ne se neutralise pas bêtement. Effarante façon de faciliter les choses  à l’opposition, notamment libérale et assimilée. Ambiance localement résumée par l’apériste Mody Sy : « A Matam c’est le Parti contre le Parti ». Situation similaire à Kaffrine où, selon le maire sortant Abdoulaye Wilane, la coalition BBY s’atomise à vue d’œil : « Dans une famille, vous trouvez parfois huit candidats sur une liste ».
A cet égard, le titre de l’hebdomadaire Jeune Afrique de ce lundi 16 juin, est éloquent : « Sénégal, la grande pagaille ». Certes, la démocratie est un foutoir fascinant et fécondant ; mais elle doit aussi être  rigoureusement formatée. Aujourd’hui, la situation est inédite. En dehors des 2 700 listes, il y a l’inquiétante évaporation de l’autorité et le manque de guidage dans les hautes sphères de l’APR. Pour un Parti dont le chef est le chef de l’Etat, les conséquences sont diffuses et incommensurables.

Léopold Sédar Senghor a toujours eu le contrôle du PS, malgré le choc violent des tendances (Magatte Lo contre Boïdo Ka à Linguère, Moustapha Touré contre Kane Aly Bocar à Matam etc.) et les purges qui ont écarté un pilier comme Ousmane Ngom à Thiès. De 1980 à 1990, le duo Diouf-Collin a solidement tenu les rênes de la formation socialiste, en dépit de la rancœur et les roucoulements des barons évincés. C’est à partir de 1990 que les fêlures et les fissures fatales ont vu le jour. Tout le contraire du Parti créé par Macky Sall qui est une Auberge (espagnole) Pour la République (APR) au pouvoir.  

Le second chapitre du bréviaire de Macky Sall édicte des élections locales qui gardent leurs incidences locales. Belle rime mais douteuse assertion ! Evidemment, les locales pivotent autour d’enjeux locaux et prennent en charge les questions de base. Toutefois, la non-autorisation des candidatures indépendantes exacerbe les réflexes partisans et stimule l’interférence (masquée mais réelle) des instances dirigeantes des appareils nationaux dans ces batailles locales. Par exemple, le nerf de la guerre – l’argent – n’est pas entièrement local. Par ailleurs, les ondes de choc d’une victoire ou les répercussions d’une défaite de l’actuelle majorité dépasseront largement les limites d’un département ou d’une commune. Après tout, c’est le même suffrage universel (les électeurs ne sont pas importés d’Argentine) qui s’exprime successivement aux scrutins local, législatif et présidentiel.

D’où la passerelle qui s’installe inévitablement entre l’échelle locale et l’échelle nationale des expressions citoyennes. Un pont entre le local et le national que les discours de campagne confortent. Avec leurs taux d’acidité propre à bousiller l’image de l’adversaire direct ou indirect. Morceau choisi et tiré du répertoire de campagne de Cheikh Bamba Dièye : « Wade doit rire de toute ses dents, car on accepte pour tout un clan familial, ce qu’on a refusé pour un seul enfant ». Les allusions (mêlées) à la dynastie Sall-Faye et la situation antérieure du très puissant ex- ministre du Ciel et de la Terre, Karim Wade, sont claires. Après avoir volontairement franchi le Rubicon, le ministre de la Communication et maire sortant de Saint-Louis, sait fort bien que sa place est désormais sur le banc de l’opposition, aux côtés du  Président de Rewmi, Idrissa Seck, et non plus dans l’équipe gouvernementale. Preuve supplémentaire que les locales sont un laboratoire pour une fibroscopie anticipée et expérimentale de la présidentielle prochaine. Ne nions pas l’évidence !   

Au demeurant, le Président Macky Sall ne s’y trompe pas lorsqu’il se place théoriquement au-dessus de la mêlée, tout en s’empressant d’ajouter qu’il tirera néanmoins les leçons du scrutin local et de l’imbroglio total singulièrement observé dans son camp. Il s’y ajoute que le poids des servitudes démocratiques et républicaines reste écrasant. En démocratie, il n’est ni commode ni possible de perdre une élection (cantonale, partielle ou parcellaire) et de rester aux commandes de l’Etat et de ses gros démembrements. On ne peut pas gouverner les citoyens d’un pays démocratique contre la volonté – minime soit-elle – d’une partie de ceux-là. En clair, les ministres-candidats aux locales prennent consciemment des risques. Du coup, Macky Sall pourra faire de la présente pagaille, le meilleur atout pour vraiment diriger l’APR, recadrer la coalition BBY et in fine resserrer et/ou ressouder son gouvernement. Trois éventualités tributaires des résultats de ces locales décidément aux couleurs nationales. Et aux prémices présidentielles.

Lundi 16 Juin 2014




1.Posté par Mdia le 17/06/2014 05:14
Mr Ndiaye, vous oubliez le profil de ce président sans envergure politique et intellectuel , sans carnet d'adresses , ni de relations importantes. UN PUR LOCAL , un président par défaut , qui a vécu sous l'ombre d'un homme multidimensionnel qui faisait tout à la place de tout le monde. pour schématiser je dirais que c'est comme le monsieur chargé de proclamer des résultats . Un commis rien d'autre , pas un leader.

2.Posté par corro le 17/06/2014 08:53
Analyse pertinente! Pourkoi macky laisse t'il faire au sein de son parti: c'est suicidaire.Il doit remettre de l'ordre

3.Posté par Xeme le 17/06/2014 12:02
Pourquoi Babacar commence à se faire rare ? Et les lasers du Lundi ?

4.Posté par Diaw le 17/06/2014 13:24
Vos articles sont si barbants que j'ai beaucoup de difficulté a les lire. La redondance (Président, secrétaire général APR) dans le préambule de votre texte ne m'a pas donné envie de voir la suite.

Soyez plus simple cher monsieur Ndiaye, vous écrivez pour des sénégalais pas pour Marie-Madeleine de La Fayette.

5.Posté par jet set massage le 17/06/2014 15:06
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6.Posté par Atypico le 17/06/2014 17:21
Local et national , interfèrent en effet, mais pas seulement au plan des leader et des partis ( Problématique valable de cet article), mais aussi et d'abord au plan des déceptions et des espoirs des électeurs ; c'est pourquoi les candidats indépendants des partis, doivent exprimer tout cela avec force, incarner pour leurs concitoyens, ces espoirs contre les déceptions et frustrations profondes à l'égard de tous les partis et personnalités impliqué dans la gestion du pays ces 20 dernières années. Et victorieux ou vaincus ils doivent se refuser à toute compromissions ou récupération. Car au - delà des résultats immédiats et dans ces résultats immédiats, c'est la possibilité et la nécessité de faire apparaître une nouvelle génération politique porteuse de la Rupture promise en 2012 et impossible à réaliser par les membres de la vielle classe politique, dont il s'agit.

7.Posté par Almamy le 18/06/2014 05:10
On ne peut pas gouverner les citoyens d’un pays démocratique contre la volonté – minime soit-elle – d’une partie de ceux-là.
Mais si, on peut! C'est là le propre de la démocratie, non? Ou bien dans l'esprit de BJN doit-on être toujours élu à 100% dans un pays démocratique?

8.Posté par Mr TOURE le 27/06/2014 17:09
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