La coupe du monde et l’engouement pour le football ont nettement baissé la température politique au Sénégal. A l’instar de la musique, le sport adoucit les mœurs. Néanmoins, l’accalmie est meublée par le vote du projet de loi portant modification du Code électoral. Une initiative gouvernementale – transformée en loi par l’Assemblée nationale – qui adapte mais abîme l’esprit du Code électoral de 1992. Car le consensus qui faisait le charme et la vertu très opérants du Code élaboré sous l’ère Diouf, n’a pas été au rendez-vous. Tout comme la houle du 19 avril dernier (le débat heurté et l’ambiance électrique secrétés par la loi instituant le parrainage) n’a pas, le lundi 18 juin, balayé l’hémicycle. Malgré le recours introduit par le Front pour la Résistance Nationale (FRN) auprès du Conseil constitutionnel, la détente induite par « Russie 2018 » libère le Laser des contingences sénégalaises et le conduit à darder son faisceau de lumière sur l’actualité africaine. Notamment sur un pays où les lignes bougent et…sautent.
Les chantres de la justice internationale très mal distribuée par la CPI camouflent mal leur gêne et rasent piteusement les murs. En effet, la libération du Sénateur de la République Démocratique du Congo, Jean-Pierre Bemba Gombo – après dix années d’emprisonnement aux Pays-Bas – est plus le fruit des projections géopolitiques en direction de l’Afrique que l’aboutissement d’un raisonnement juridique au-dessus de tout soupçon. Dans les milieux bien informés, on met l’acquittement de Jean-Pierre Bemba sur le compte du diplomate américain Herman Cohen qui, dès le mois de novembre 2017, avait annoncé la nouvelle au monde via son compte Twitter. Ancien Sous-Secrétaire d’Etat US chargé des Affaires Africaines et ex-ambassadeur au Sénégal, Herman Cohen est, depuis plusieurs années, à la tête d’une officine florissante de lobbying sur le continent noir. A ce titre, il a le dossier de la RDC dans son cartable.
Quinze jours avant la libération de Jean-Pierre Bemba, Herman Cohen a installé son Quartier Général à Bruxelles, capitale de la Belgique et de l’Europe. Une ruche diplomatique à partir de laquelle il est entré en contact ininterrompu avec toutes les puissances qui ont des intérêts lourds en RDC. But ultime de la manœuvre internationale : dégager Joseph Kabila et placer Jean-Pierre Bemba sur orbite. A cet effet, des réunions ont été organisées à Bruxelles et à La Haye, entre Herman Cohen et des leaders de l’opposition congolaise comme Moïse Katumbi, Félix Tshisekedi (le fils et héritier d’Etienne) et Adolphe Muzito. On est en pleine quête d’une candidature unique pour l’élection présidentielle de décembre 2018 et à la frénétique recherche d’un accord commun pour la répartition des postes, après la chute de Kabila. Ce n’est pas tout. D’ores et déjà, le destin sombre de Joseph Kabila est scellé. Voici ce que murmurent les policy-makers ou faiseurs de rois : « L’heure a sonné pour que le dossier de Joseph Kabila soit traité à la CPI, suite aux pillages et aux crimes commis durant les dix-sept ans de pouvoir. Chaque chose à son temps ». Comme on le voit, le statut de Rome s’est mué en levier de politique internationale ; tandis que la Communauté internationale est devenue une conspiration internationale.
Question : pourquoi a-t-on sélectionné puis choisi Jean-Pierre Bemba ? En fait, la division politique du travail n’est pas faite au hasard. Le milliardaire et célèbre gouverneur du Katanga, Moïse Katumbi, est électoralement handicapé par ses origines de métis gréco-congolais, à l’instar de Léonard Kengo Wa Dondo, de père polonais. Même handicap, au Congo-Brazzaville, pour Henri Lopès qui est né d’une mère congolaise et d’un père portugais. Donc, en RDC, Moïse Katumbi – ancien dignitaire du régime Kabila – est un bon bélier pour cogner et affaiblir ; Félix Tshisekedi est un excellent râteau pour ratisser large ; mais la bonne carte ou la parfaite cartouche reste Jean-Pierre Bemba, pour descendre le sourd et borné Président Joseph Kabila qui multiplie les manœuvres politiciennes et agrège les artifices constitutionnels, en vue d’étrenner un troisième mandat.
Fils de l’homme d’affaires Bemba Saolona (l’ancien patron des patrons (sous l’ère Mobutu) le sénateur détenu puis acquitté par la CPI a, en effet, le profil du tombeur et/ou successeur du Président Joseph Kabila. Son bassin électoral très étendu dans l’Etat-province de l’Equateur (Nord de la RDC) et sa fortune immense – Bemba possède un jet privé – seront utiles voire décisifs dans la bataille de 2018. En outre, Jean-Pierre Bemba dispose d’une puissante milice armée qui est un atout non négligeable dans une conjoncture de guerre civile latente et larvée. Enfin, le « candidat » de Washington et de Bruxelles est un orateur au verbe tranchant et assassin. Lors d’un mémorable meeting d’une campagne précédente, Jean-Pierre Bemba avait fait mal et mouche, en déclinant la vraie fiche d’identité de son adversaire : « le Président Joseph Kabila n’est pas congolais. Il s’appelle Hippolyte Kanembé, fils d’un chauffeur de taxi zambien et non de Laurent-Désiré Kabila ». Morale de l’histoire : un prisonnier de la CPI est également un potentiel pion de l’Occident. Ah, quelle justice internationale !
« L’Afrique ressemble à un revolver dont la gâchette se trouve au Congo » constatait, avec perspicacité, un digne fils de la Diaspora : Frantz Fanon. Lecture tragiquement prémonitoire du destin d’un pays riche qui, de 1960 à nos jours, campe périlleusement au carrefour de toutes les convoitises : économique, géopolitique et géostratégique. Vrai condensé de toutes les malédictions qu’attire un scandale géologique (uranium, diamant, cuivre, cobalt, coltan etc.) la patrie de Patrice Emery Lumumba est, aussi, la grande victime du déficit de conscience nationale de ses fils qui se satisfont de leurs rôles de pantins enrôlés par l’Occident ou épaulés par la Chine (cas du Président Joseph Kabila). Une posture d’abdication nationale qui se prolonge au détriment de l’essor et du salut de la RDC. Le plus vaste pays du continent – depuis le démantèlement du Soudan en deux Etats – qui mérite un présent et un futur plus rayonnants que ceux de l’émergente Afrique du Sud.
En 1876, le Roi des Belges, Léopold II fait main basse sur le Congo, spolie le territoire érigé en propriété royale et donne son nom à la capitale : Léopoldville. En 1961, le gouvernement du Royaume de Belgique orchestre la sécession du Katanga via la marionnette Moise Tschombé. La même année, la CIA assassine le leader nationaliste Patrice Lumumba. De 1965 à 1997, l’Amérique parraine et positionne durablement la dictature du Maréchal Mobutu. En cette année 2018, l’Américain Herman Cohen programme le poulain Bemba. Le destin d’un pays ne saurait être plus tragiquement capturé et bloqué de l’extérieur.
Les chantres de la justice internationale très mal distribuée par la CPI camouflent mal leur gêne et rasent piteusement les murs. En effet, la libération du Sénateur de la République Démocratique du Congo, Jean-Pierre Bemba Gombo – après dix années d’emprisonnement aux Pays-Bas – est plus le fruit des projections géopolitiques en direction de l’Afrique que l’aboutissement d’un raisonnement juridique au-dessus de tout soupçon. Dans les milieux bien informés, on met l’acquittement de Jean-Pierre Bemba sur le compte du diplomate américain Herman Cohen qui, dès le mois de novembre 2017, avait annoncé la nouvelle au monde via son compte Twitter. Ancien Sous-Secrétaire d’Etat US chargé des Affaires Africaines et ex-ambassadeur au Sénégal, Herman Cohen est, depuis plusieurs années, à la tête d’une officine florissante de lobbying sur le continent noir. A ce titre, il a le dossier de la RDC dans son cartable.
Quinze jours avant la libération de Jean-Pierre Bemba, Herman Cohen a installé son Quartier Général à Bruxelles, capitale de la Belgique et de l’Europe. Une ruche diplomatique à partir de laquelle il est entré en contact ininterrompu avec toutes les puissances qui ont des intérêts lourds en RDC. But ultime de la manœuvre internationale : dégager Joseph Kabila et placer Jean-Pierre Bemba sur orbite. A cet effet, des réunions ont été organisées à Bruxelles et à La Haye, entre Herman Cohen et des leaders de l’opposition congolaise comme Moïse Katumbi, Félix Tshisekedi (le fils et héritier d’Etienne) et Adolphe Muzito. On est en pleine quête d’une candidature unique pour l’élection présidentielle de décembre 2018 et à la frénétique recherche d’un accord commun pour la répartition des postes, après la chute de Kabila. Ce n’est pas tout. D’ores et déjà, le destin sombre de Joseph Kabila est scellé. Voici ce que murmurent les policy-makers ou faiseurs de rois : « L’heure a sonné pour que le dossier de Joseph Kabila soit traité à la CPI, suite aux pillages et aux crimes commis durant les dix-sept ans de pouvoir. Chaque chose à son temps ». Comme on le voit, le statut de Rome s’est mué en levier de politique internationale ; tandis que la Communauté internationale est devenue une conspiration internationale.
Question : pourquoi a-t-on sélectionné puis choisi Jean-Pierre Bemba ? En fait, la division politique du travail n’est pas faite au hasard. Le milliardaire et célèbre gouverneur du Katanga, Moïse Katumbi, est électoralement handicapé par ses origines de métis gréco-congolais, à l’instar de Léonard Kengo Wa Dondo, de père polonais. Même handicap, au Congo-Brazzaville, pour Henri Lopès qui est né d’une mère congolaise et d’un père portugais. Donc, en RDC, Moïse Katumbi – ancien dignitaire du régime Kabila – est un bon bélier pour cogner et affaiblir ; Félix Tshisekedi est un excellent râteau pour ratisser large ; mais la bonne carte ou la parfaite cartouche reste Jean-Pierre Bemba, pour descendre le sourd et borné Président Joseph Kabila qui multiplie les manœuvres politiciennes et agrège les artifices constitutionnels, en vue d’étrenner un troisième mandat.
Fils de l’homme d’affaires Bemba Saolona (l’ancien patron des patrons (sous l’ère Mobutu) le sénateur détenu puis acquitté par la CPI a, en effet, le profil du tombeur et/ou successeur du Président Joseph Kabila. Son bassin électoral très étendu dans l’Etat-province de l’Equateur (Nord de la RDC) et sa fortune immense – Bemba possède un jet privé – seront utiles voire décisifs dans la bataille de 2018. En outre, Jean-Pierre Bemba dispose d’une puissante milice armée qui est un atout non négligeable dans une conjoncture de guerre civile latente et larvée. Enfin, le « candidat » de Washington et de Bruxelles est un orateur au verbe tranchant et assassin. Lors d’un mémorable meeting d’une campagne précédente, Jean-Pierre Bemba avait fait mal et mouche, en déclinant la vraie fiche d’identité de son adversaire : « le Président Joseph Kabila n’est pas congolais. Il s’appelle Hippolyte Kanembé, fils d’un chauffeur de taxi zambien et non de Laurent-Désiré Kabila ». Morale de l’histoire : un prisonnier de la CPI est également un potentiel pion de l’Occident. Ah, quelle justice internationale !
« L’Afrique ressemble à un revolver dont la gâchette se trouve au Congo » constatait, avec perspicacité, un digne fils de la Diaspora : Frantz Fanon. Lecture tragiquement prémonitoire du destin d’un pays riche qui, de 1960 à nos jours, campe périlleusement au carrefour de toutes les convoitises : économique, géopolitique et géostratégique. Vrai condensé de toutes les malédictions qu’attire un scandale géologique (uranium, diamant, cuivre, cobalt, coltan etc.) la patrie de Patrice Emery Lumumba est, aussi, la grande victime du déficit de conscience nationale de ses fils qui se satisfont de leurs rôles de pantins enrôlés par l’Occident ou épaulés par la Chine (cas du Président Joseph Kabila). Une posture d’abdication nationale qui se prolonge au détriment de l’essor et du salut de la RDC. Le plus vaste pays du continent – depuis le démantèlement du Soudan en deux Etats – qui mérite un présent et un futur plus rayonnants que ceux de l’émergente Afrique du Sud.
En 1876, le Roi des Belges, Léopold II fait main basse sur le Congo, spolie le territoire érigé en propriété royale et donne son nom à la capitale : Léopoldville. En 1961, le gouvernement du Royaume de Belgique orchestre la sécession du Katanga via la marionnette Moise Tschombé. La même année, la CIA assassine le leader nationaliste Patrice Lumumba. De 1965 à 1997, l’Amérique parraine et positionne durablement la dictature du Maréchal Mobutu. En cette année 2018, l’Américain Herman Cohen programme le poulain Bemba. Le destin d’un pays ne saurait être plus tragiquement capturé et bloqué de l’extérieur.
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