Au vu de la montagne des manquements et de la rivière des irrégularités, les législatives du 30 juillet dernier, ont accouché d’un prévisible bonneteau électoral qui donne, simultanément, le désir de rire et l’envie de pleurer. A cet égard, les vertus heuristiques ou pédagogiques de la comparaison aiguillonnent les chroniqueurs vers la Gambie où les boules du dictateur Yaya Jammeh (archaïques et risibles) ont été tellement fiables, qu’elles ont démocratiquement fait trébucher le tyran qui – assommé par la netteté de sa défaite – a félicité son adversaire, avant de se raviser, de signer son arrêt de mort politique et de recevoir, via la CEDEAO, son passeport pour l’exil. Pour la présidentielle de 2019, au Sénégal, il conviendra d’importer les boules de Banjul, moins coûteuses que les cartes d’identité biométriques (50 milliards CFA) et plus pratiques, face à une cinquantaine de listes.
Trêve d’ironie sévère, mais sensée ! Le Laser du lundi, c’est-à-dire le rayon X des évènements de la semaine, avait, par anticipation, fouillé dans les viscères du scrutin. Dans le premier paragraphe de la chronique du 24 juillet, soit sept jours avant le vote, on lisait ceci : « Pas nécessaire d’être un Roi mage en Galilée ou au Guidimakha, pour entrevoir la victoire à la Pyrrhus d’un des deux camps ». Dans le dernier paragraphe, avant le post-scriptum, on tombait sur l’assertion prémonitoire que voici : « Avec l’appareil judiciaire qui a déblayé le terrain (le maire Khalifa Sall est en prison) la défaite d’Amadou Ba, à Dakar, n’est pas à l’ordre du jour, dans le camp présidentiel ». Quatre jours après la proclamation des résultats, c’est le temps de l’éclosion des leçons post-législatives. De ce flot d’enseignements, dégageons et passons au peigne fin, les trois ci-dessous !
Le syndrome Hama Amadou. Abstraction faite des différences de scrutins (une élection législative n’est pas une élection présidentielle), on reste pantois devant la performance du détenu-candidat face à son geôlier-candidat. Au Niger, l’opposant Hama Amadou immobilisé dans sa cellule de la prison provinciale de Tillabéry, a contraint le Président Issoufou au second tour. Grande humiliation pour un chef d’Etat en exercice, disposant d’une noria de 4X4, d’une flottille d’hélicoptères, d’un avion de commandement et du nerf de la guerre (l’argent) pour écumer tout le territoire ! A Dakar, le prisonnier Khalifa Sall, bloqué à Rebeuss, a mis, en difficulté extrême, l’argentier de l’Etat, Amadou Ba, qui n’a gagné (avec ou sans guillemets) qu’après un comptage serré et nocturne des voix. Victoire ne peut être plus pâle que celle-là, devant l’éclatante gloire de celui qui a défendu l’inexpugnable citadelle de Dakar, avec le même héroïsme que la Légion Etrangère à Camerone ou les Marines US à Guadalcanal. A l’issue d’un combat de lutte entre Balla Gaye II et un handicapé physique, tout ralentissement nécessaire de l’image, pour bien identifier le vainqueur, consacre, déjà, une certaine défaite de l’ancien roi des arènes. Bien entendu, Macky Sall n’était pas candidat face à Khalifa Sall. Toutefois, l’APR – présidée par le Président de la république – est le fer de lance de la coalition Benno Bokk Yakaar (BBY) confrontée, dans Dakar, à la liste coiffée par le maire de la capitale. D’où les ondes de choc du succès de l’un et de l’échec de l’autre, qui se propagent au-delà des deux candidats en duel. Les performances électorales du maire (emprisonné) sont d’autant plus appréciables que Khalifa Sall est à la tête d’une dissidence ou d’une révolte socialiste. L‘appareil étant sous le contrôle d’Ousmane Tanor Dieng. Justement, l’autre dissident du PS récemment élargi de prison, (Bamba Fall contaminé par le syndrome Hama Amadou) a balayé trois ministres, de l’espace de la populeuse Médina. Ce maire semi-analphabète, sans caisse noire ni caisse d’avance, a écrasé trois membres ou quatre membres du gouvernement. Message à peine codé et leçon saisissable pour tous : une victoire portée par de maigres chiffres (2750 voix de plus) est inférieure à une gloire enracinée dans les cœurs. Du coup, la profonde question de Napoléon est adressée à Macky Sall : « Que vaut un gouvernement, sans le soutien de l’opinion ? ». L’opinion publique qui est synonyme d’adhésion publique et non d’arithmétique électorale…étriquée. Manifestement, Macky Sall, avec sa double casquette de chef de Parti et chef d’Etat (candidat en 2019), devait se tenir à l’écart de la crise socialo-socialiste, afin de se prémunir contre tout effet électoralement corrosif pour l’APR.
Le talon d’Achille de Touba. En dépit d’un arsenal de séduction et d’une permanente offensive de charme, la ville sainte de Touba reste rétive. Pourtant le chef de l’Etat et son gouvernement ont – pour fasciner ou plaire – lancé trop loin le bouchon, jusqu’aux confins de la gouvernance économiquement aberrante et financièrement absurde, en démarrant le chantier d’une autoroute, Ila Touba, d’essence strictement électoraliste. J’ignore les conditionnalités qui « soubassent » (excusez le néologisme rébarbatif !) le financement de l’ouvrage, mais une pareille et colossale somme, 400 milliards, répartie entre les quatorze régions du pays, aurait creusé une multitude de forages et changé les abris provisoires qui balafrent la carte scolaire du Sénégal. C’est d’autant plus vrai que cette infrastructure politico-spirituelle pèche sur deux points essentiels. D’abord, Elle ne connecte pas les trois Etats voisins et membres de la CEDEAO : les deux Guinée plus le Mali. Ensuite, Elle ne draine pas massivement les pèlerins. Son apparente raison d’être. Car, en effet, les mourides de Casamance, de Tambacounda et de Saint-Louis ne l’empruntent pas, à l’occasion du Grand Magal. Regardez la carte routière ! Tout ça, pour récolter des défaites répétées à Touba, ville toujours sainte et…wadiste ! Enfin, avec la moitié de la somme mobilisée pour Ila Touba, le Sénégal Oriental serait mieux orienté vers l’émergence. Donc moins marginalisé, malgré ses ressources minières. Réécoutez les rouspétances et les récriminations du grand gagnant des élections législatives, à Kédougou, l’ex-ministre Moustapha Guirassy !
Le tombeau des lois. Le Sénégal est-il le Royaume des lois ou l’Empire de la malice ? Question pertinente à l’issue des législatives qui ont, en amont comme en aval, éprouvé nos juges et nos lois. Le Conseil Constitutionnel a trop ferraillé sur le front électoral et trop attiré les projecteurs de l’actualité sur lui. Un phénomène de saturation qui accentue la banalisation et abaisse la vénération, pour une juridiction presque céleste aux yeux de l’homme de la rue. On lui a demandé des avis, à travers des questions qui ont, parfois, leurs réponses dans les lois en vigueur ou parmi les textes de lois disponibles. L’Exécutif et le Législatif ont-ils abdiqué ? A ce rythme, n’est-il pas judicieux d’installer le Président du Conseil Constitutionnel à la tête d’un Conseil de National Régence qui régente toute la vie du pays ? Ainsi, les citoyens iront demander l’avis du Président Pape Oumar Sakho, avant d’aller à la mosquée, à la plage et au bistrot. Toujours au chapitre des lois, l’autre fait effarant de la campagne électorale, est l’audience accordée par le Président de la république, aux habitants de la cité rasée de Tobago. Des citoyens ont allègrement violé la loi qui protège l’emprise foncière et sécurisante de l’aéroport. L’Etat – juridiquement bien conseillé ou bien avisé – et ses gendarmes ont fait le nécessaire. Au nom de quelle considération électoraliste (soif de victoire électorale) doit-on verser des primes et octroyer des terrains aux délinquants fonciers de Tobago ? Autant dissoudre la DESCOS qui n’a plus sa raison d’être. Bonjour l’Etat de droit (incliné) et des lois flasques ! L’avant-veille du scrutin est apparue, ici et là, comme l’hiver des lois. Notamment à Darou-Mousty où la Gendarmerie a nettoyé tous les sites de vente illégale de médicaments volés ou périmés. Moins de 48 heures, avant le vote, tout a été restitué aux vendeurs qui ont violé la loi. A la grande fureur des pharmaciens qui ont grogné vivement. Qui a donné cet ordre aux relents électoralistes ? Mystère épais. La démocratie sénégalaise délite le Sénégal. Comme on le voit, l’arrière-plan d’une élection est plus important et plus instructif que les résultats affichés.
PS : A la lumière des législatives, un aggiornamento est urgent dans l’univers judiciaire. Il y va de la symbiose voire de l’osmose entre la Justice et le Peuple au nom duquel le Droit est dit. Faute de quoi, le citoyen sera convaincu que deux juges vivent au Sénégal : le juge qui connait bien la loi et le juge qui connait bien le Président. Pourtant, Anatole France a bien mis en garde : « Le souci du juge dans son interprétation de la loi, ne doit pas être limité au cas qui lui est soumis, mais s’étendre aux conséquences bonnes ou mauvaises que peut produire sa sentence, au regard de l’intérêt général ». En clair, le juge doit être meilleur que le législateur. Son premier devoir étant d’être juste avant d’être formaliste.
Trêve d’ironie sévère, mais sensée ! Le Laser du lundi, c’est-à-dire le rayon X des évènements de la semaine, avait, par anticipation, fouillé dans les viscères du scrutin. Dans le premier paragraphe de la chronique du 24 juillet, soit sept jours avant le vote, on lisait ceci : « Pas nécessaire d’être un Roi mage en Galilée ou au Guidimakha, pour entrevoir la victoire à la Pyrrhus d’un des deux camps ». Dans le dernier paragraphe, avant le post-scriptum, on tombait sur l’assertion prémonitoire que voici : « Avec l’appareil judiciaire qui a déblayé le terrain (le maire Khalifa Sall est en prison) la défaite d’Amadou Ba, à Dakar, n’est pas à l’ordre du jour, dans le camp présidentiel ». Quatre jours après la proclamation des résultats, c’est le temps de l’éclosion des leçons post-législatives. De ce flot d’enseignements, dégageons et passons au peigne fin, les trois ci-dessous !
Le syndrome Hama Amadou. Abstraction faite des différences de scrutins (une élection législative n’est pas une élection présidentielle), on reste pantois devant la performance du détenu-candidat face à son geôlier-candidat. Au Niger, l’opposant Hama Amadou immobilisé dans sa cellule de la prison provinciale de Tillabéry, a contraint le Président Issoufou au second tour. Grande humiliation pour un chef d’Etat en exercice, disposant d’une noria de 4X4, d’une flottille d’hélicoptères, d’un avion de commandement et du nerf de la guerre (l’argent) pour écumer tout le territoire ! A Dakar, le prisonnier Khalifa Sall, bloqué à Rebeuss, a mis, en difficulté extrême, l’argentier de l’Etat, Amadou Ba, qui n’a gagné (avec ou sans guillemets) qu’après un comptage serré et nocturne des voix. Victoire ne peut être plus pâle que celle-là, devant l’éclatante gloire de celui qui a défendu l’inexpugnable citadelle de Dakar, avec le même héroïsme que la Légion Etrangère à Camerone ou les Marines US à Guadalcanal. A l’issue d’un combat de lutte entre Balla Gaye II et un handicapé physique, tout ralentissement nécessaire de l’image, pour bien identifier le vainqueur, consacre, déjà, une certaine défaite de l’ancien roi des arènes. Bien entendu, Macky Sall n’était pas candidat face à Khalifa Sall. Toutefois, l’APR – présidée par le Président de la république – est le fer de lance de la coalition Benno Bokk Yakaar (BBY) confrontée, dans Dakar, à la liste coiffée par le maire de la capitale. D’où les ondes de choc du succès de l’un et de l’échec de l’autre, qui se propagent au-delà des deux candidats en duel. Les performances électorales du maire (emprisonné) sont d’autant plus appréciables que Khalifa Sall est à la tête d’une dissidence ou d’une révolte socialiste. L‘appareil étant sous le contrôle d’Ousmane Tanor Dieng. Justement, l’autre dissident du PS récemment élargi de prison, (Bamba Fall contaminé par le syndrome Hama Amadou) a balayé trois ministres, de l’espace de la populeuse Médina. Ce maire semi-analphabète, sans caisse noire ni caisse d’avance, a écrasé trois membres ou quatre membres du gouvernement. Message à peine codé et leçon saisissable pour tous : une victoire portée par de maigres chiffres (2750 voix de plus) est inférieure à une gloire enracinée dans les cœurs. Du coup, la profonde question de Napoléon est adressée à Macky Sall : « Que vaut un gouvernement, sans le soutien de l’opinion ? ». L’opinion publique qui est synonyme d’adhésion publique et non d’arithmétique électorale…étriquée. Manifestement, Macky Sall, avec sa double casquette de chef de Parti et chef d’Etat (candidat en 2019), devait se tenir à l’écart de la crise socialo-socialiste, afin de se prémunir contre tout effet électoralement corrosif pour l’APR.
Le talon d’Achille de Touba. En dépit d’un arsenal de séduction et d’une permanente offensive de charme, la ville sainte de Touba reste rétive. Pourtant le chef de l’Etat et son gouvernement ont – pour fasciner ou plaire – lancé trop loin le bouchon, jusqu’aux confins de la gouvernance économiquement aberrante et financièrement absurde, en démarrant le chantier d’une autoroute, Ila Touba, d’essence strictement électoraliste. J’ignore les conditionnalités qui « soubassent » (excusez le néologisme rébarbatif !) le financement de l’ouvrage, mais une pareille et colossale somme, 400 milliards, répartie entre les quatorze régions du pays, aurait creusé une multitude de forages et changé les abris provisoires qui balafrent la carte scolaire du Sénégal. C’est d’autant plus vrai que cette infrastructure politico-spirituelle pèche sur deux points essentiels. D’abord, Elle ne connecte pas les trois Etats voisins et membres de la CEDEAO : les deux Guinée plus le Mali. Ensuite, Elle ne draine pas massivement les pèlerins. Son apparente raison d’être. Car, en effet, les mourides de Casamance, de Tambacounda et de Saint-Louis ne l’empruntent pas, à l’occasion du Grand Magal. Regardez la carte routière ! Tout ça, pour récolter des défaites répétées à Touba, ville toujours sainte et…wadiste ! Enfin, avec la moitié de la somme mobilisée pour Ila Touba, le Sénégal Oriental serait mieux orienté vers l’émergence. Donc moins marginalisé, malgré ses ressources minières. Réécoutez les rouspétances et les récriminations du grand gagnant des élections législatives, à Kédougou, l’ex-ministre Moustapha Guirassy !
Le tombeau des lois. Le Sénégal est-il le Royaume des lois ou l’Empire de la malice ? Question pertinente à l’issue des législatives qui ont, en amont comme en aval, éprouvé nos juges et nos lois. Le Conseil Constitutionnel a trop ferraillé sur le front électoral et trop attiré les projecteurs de l’actualité sur lui. Un phénomène de saturation qui accentue la banalisation et abaisse la vénération, pour une juridiction presque céleste aux yeux de l’homme de la rue. On lui a demandé des avis, à travers des questions qui ont, parfois, leurs réponses dans les lois en vigueur ou parmi les textes de lois disponibles. L’Exécutif et le Législatif ont-ils abdiqué ? A ce rythme, n’est-il pas judicieux d’installer le Président du Conseil Constitutionnel à la tête d’un Conseil de National Régence qui régente toute la vie du pays ? Ainsi, les citoyens iront demander l’avis du Président Pape Oumar Sakho, avant d’aller à la mosquée, à la plage et au bistrot. Toujours au chapitre des lois, l’autre fait effarant de la campagne électorale, est l’audience accordée par le Président de la république, aux habitants de la cité rasée de Tobago. Des citoyens ont allègrement violé la loi qui protège l’emprise foncière et sécurisante de l’aéroport. L’Etat – juridiquement bien conseillé ou bien avisé – et ses gendarmes ont fait le nécessaire. Au nom de quelle considération électoraliste (soif de victoire électorale) doit-on verser des primes et octroyer des terrains aux délinquants fonciers de Tobago ? Autant dissoudre la DESCOS qui n’a plus sa raison d’être. Bonjour l’Etat de droit (incliné) et des lois flasques ! L’avant-veille du scrutin est apparue, ici et là, comme l’hiver des lois. Notamment à Darou-Mousty où la Gendarmerie a nettoyé tous les sites de vente illégale de médicaments volés ou périmés. Moins de 48 heures, avant le vote, tout a été restitué aux vendeurs qui ont violé la loi. A la grande fureur des pharmaciens qui ont grogné vivement. Qui a donné cet ordre aux relents électoralistes ? Mystère épais. La démocratie sénégalaise délite le Sénégal. Comme on le voit, l’arrière-plan d’une élection est plus important et plus instructif que les résultats affichés.
PS : A la lumière des législatives, un aggiornamento est urgent dans l’univers judiciaire. Il y va de la symbiose voire de l’osmose entre la Justice et le Peuple au nom duquel le Droit est dit. Faute de quoi, le citoyen sera convaincu que deux juges vivent au Sénégal : le juge qui connait bien la loi et le juge qui connait bien le Président. Pourtant, Anatole France a bien mis en garde : « Le souci du juge dans son interprétation de la loi, ne doit pas être limité au cas qui lui est soumis, mais s’étendre aux conséquences bonnes ou mauvaises que peut produire sa sentence, au regard de l’intérêt général ». En clair, le juge doit être meilleur que le législateur. Son premier devoir étant d’être juste avant d’être formaliste.
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