Nous sommes déjà tous en prison! (Amadou Fall)


Nous sommes déjà tous en prison! (Amadou Fall)
« Quand la justice se mue en châtiment, la loi verse dans le crime »
Dans une démocratie balbutiante, pour ne dire (et à juste raison) une « autocratie éclairée comme à l’africaine », le politicien exhibe comme un trophée sublime tout séjour en prison. C’est comme si la prison étoffait le CV de chaque aspirant à la magistrature suprême.
Il est vrai que des cellules isolantes entourées d’une haute muraille aux portes fortifiées – appelées la prison dans tous les pays du monde – est un enfer avec lequel beaucoup de nos séniles dirigeants essaient d’effrayer, d’intimider ou de museler les contestataires de tous les acabits qui tentent de les bouter hors des rouages du pouvoir despotique qu’ils exercent sur leurs peuples. Et en ce moment, ils oublient que cette chose dite prison isole certes le corps physique que l’on arrive à paralyser un moment plus ou moins long mais jamais elle arrivera à étouffer l’esprit révolutionnaire, les idées émancipatrices et rédemptrices qui accompagnent ce même corps que l’on cherche - sans succès le plus souvent - à anéantir. Ces grands Hommes entrent en prison avec le Peuple tout entier et en ressortent avec ce même Peuple. Autrement Mandéla ne serait pas Mandéla, cette icône incroyable et fantastique que le monde entier nous envie ! Et il suffit largement comme exemple à méditer……
Je sais que les esprits supérieurs n’ont nullement peur de la prison ; elle constitue pour eux la rançon à payer dans la grande bataille qu’ils livrent quotidiennement aux fossoyeurs de la Démocratie, aux pourfendeurs de la République et aux génocidaires de leur Peuple. Car il n’y a de génocide plus grave que de confiner son Peuple dans la misère, dans l’ignorance, dans l’obscurantisme des tripatouillages constitutionnels, dans le machiavélisme politique et sous le joug écœurant et fétide de la mal gouvernance.
Noel Seck va en prison mais il n’y va pas tout nu ; il y va, habillé par un Esprit ; cet Esprit de renouveau et de renaissance citoyenne né depuis le 23 Juin et qui a fini de traverser de bout en bout le Peuple dans sa quasi-totalité. Il n’y va pas seul, il y est entré, accompagné de tous les patriotes de ce pays et pour lesquels il n’a été que le porte-parole, le porte étendard ; il en ressortira avec le Peuple quand ce dernier arrivera enfin (et c’est dans un délai très court) à venir à bout de la chienlit qui obstrue inopinément le chemin qui mène à l’expression d’une démocratie réelle et de l’émergence socio économique dans notre pays.
La prison comme lieu de privation de liberté est faite – quelle que soit sa capacité – pour uniquement des individus que l’on veut punir à tort ou à raison. Elle ne happe, elle n’engloutit qu’un nombre restreint d’individus auxquels l’on a « quelque chose » à reprocher et à qui l’on veut le faire payer.
Chers compatriotes, il existe pourtant une autre Prison largement plus asphyxiante, largement plus écœurante et largement plus dommageable que celle que l’on propose à Noel Seck pour deux ans. Cette prison est un ce que j’appelle le « bagne virtuel » que les despotes et leurs affidés ouvrent et referment sur leurs peuples.
La liberté n’est pas seulement la faculté de se mouvoir, de donner son opinion et de disposer de sa vie comme bon nous semble. Elle est plus existentielle que cela. Elle épouse l’ensemble des données matérielles et immatérielles qui font de chacun de nous un Homme dans son intégralité c’est-à-dire un être ayant la possibilité de vivre convenablement, décemment dans sa chair et dans son âme.
Les plus optimistes d’entre les Sénégalais pensent que nous sommes au bord de la catastrophe nationale tant le régime Wadien est « génocidaire » pour la majorité de « goorgoorlu » qui tire le diable par la queue à longueur d’année pour subsister. Aujourd’hui le brave peuple Sénégalais ne se reconnaît plus, il perd de jour en jour ce qui faisait jadis sa fierté c’est-à-dire son unité, son génie, son sens aigu de l’Etat et de la République, ses vertus de « jom », de « sutura » et de « fulla ». En une décennie le pouvoir libéral aura eu raison d’un pays longtemps cité en tète de peloton en Afrique au Sud du SAHARA.
Il (notre SENEGAL à tous) est devenu le lit doré de la corruption et de la démagogie, du népotisme et du « larbinisme », de la démesure et des tâtonnements, des flagorneurs et des incultes. Bref, notre pays se meurt et tout doucement glisse vers l’apocalypse. La société sénégalaise dans son ensemble est en plein désarroi devant le spectacle peu reluisant que lui offrent sa jeunesse désemparée (Barca ou Barsàq – liggéey mbaa dee) face au spectacle ahurissant de ses espoirs envolés, que lui offrent l’impunité accordée aux vilains brigands qui délestent de nos biens publics, ses hôpitaux plus malades que les souffreteux qui les fréquentent, son école impubère, improductive, renversante et immature, les délestages quasi permanent qui transforment les ateliers d’artisans et les PME en « banc jaaxle », son habitat austère et menacé par les intempéries et autres calamités naturelles, ses dirigeants amorphes et cupides (le Président qui s’achète de manière opaque et nébuleuse un terrain à prés d’un milliard et deux cents millions), la hantise quotidienne pour l‘acquisition des denrées de premières nécessité. Le sénégalais lambda craint aujourd’hui pour sa sécurité, pour la sécurité de son pays actuellement pris en otage par des « pouvoiristes » ; qui refusent de dégager au risque de mettre le feu au pays. Il assiste, impuissant aux viols répétés de sa charte fondamentale, au bâillonnement et à la crétinisation de ses institutions par un pouvoir trop proche du totalitarisme à la soviétique. Le sénégalais lambda est de plus en plus dégoûté par les scandales politico financiers, pat les sales affaires de mœurs (affaire Diombass) voire d’odieux crimes impunis (assassinat sans vergogne de Malick Ba à Sangalkam, de Abdoulaye Wade Yinghou, de Balla Gaye etc.…) qui, au quotidien lui enflamment les oreilles et lui empoisonnent le cœur.
Ainsi, vous conviendrez avec moi que le SENEGALAIS lambda est gravement pris en otage dans une prison virtuelle où il se sent de plus en plus à l’étroit. Cette prison n’a pas de murailles fortifiées mais plutôt des contraintes physiques et morales : Combien sont ces nécessiteux qui se contentent d’un seul repas (bien des fois les maigres restes du déjeuner- communément appelés « photocopies » - servent de diner aux plus petits de la famille) ? Combien sont ces pères de famille qui n’arrivent plus à assurer l’école à leurs progénitures, le gîte et le couvert à leurs épouses ? Combien d’entre nous les impécunieux, ont rendu l’âme pour une simple maladie bénigne face aux soins de santé inaccessibles parce que trop onéreux ? Pouvons-nous compter tous ces paysans qui sont obligés de brader leurs récoltes parce que les rouages de la campagne arachidière auront pâmés ? Pouvons-nous continuer à ignorer loyalement le désarroi de nos artisans ; de nos tailleurs, de nos soudeurs qui se sentent enchainés par l’inactivité chronique ? Pouvons-nous indéfiniment continuer à supporter la tyrannie et l’impératif de la « marmite à bouillir » alors que le prix des denrées de première nécessité grimpe à tout vent ? Bref, combien d’entre nous ont perdu leur dignité parce que n’ayant pas les moyens de faire face à leurs multiples responsabilités familiales ?
Messieurs les décideurs, ne pensez-vous pas que ceux qui pataugent dans les eaux saumâtres et contaminées des inondations préfèrent de loin un séjour à Rebeuss au long calvaire qu’ils endurent depuis fort longtemps ? Croyez-vous sincèrement que la seule menace d’un emprisonnement peut faire reculer un peuple, Tout un peuple déjà largement entravé par les vicissitudes de la vie, les difficultés de survie et par les privations suffocantes ? La forfaiture du mandat de trop ne passer pas ! Car nous sommes déjà Tous en Prison, la prison virtuelle que vous avez érigée pour nous comme forme de gouvernement.
Amadou Fall Enseignant à GUINGUINEO
TEL : 775457544/766887279
Zemaria64@yahoo.fr/zemazia64@hotmail.fr
Samedi 22 Octobre 2011
amadou fall




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