Lettre d’un enfant non-voyant à Papa Président Noël

Papa Président Noël,

Papa m’a appris que l’éducation est le fondement le plus important pour l’avenir d’une nation.

Maman m’a dit que le meilleur cadeau que l’on puisse offrir à un enfant c’est de lui donner une bonne éducation, qu’elle était la chance de la réussite, qu’elle était le moyen de la pleine participation citoyenne. Ai-je envie de satisfaire mon désir d’apprendre, désir de savoir, désir d’avenir ?

Papa Président Noël,

J’ai appris qu’au-delà du savoir et de la connaissance, l’école transmet des principes et des valeurs ; que c’est dans l’école de la République que tout se joue, parce que c’est ici que se dessinent les contours de notre nation, parce qu’elle est au cœur de toute politique d’intégration.

Y poserai-je les pieds un jour ?

Papa Président Noël,

J’ai appris que l’école est le moyen par excellence de l’émancipation, qu’une nation se construit par l’école, par le travail, par le talent, par le partage de la connaissance de tous ses fils.

Me donnerez-vous en 2013 les moyens de ma participation ?

Papa Président Noël,

Nous sommes un millier d’enfants non-voyants à attendre que les portes de l’Institut national d’éducation et de formation des jeunes aveugles du Sénégal nous soient ouvertes. Plus grave, notre temple du savoir n’a accueilli cette année aucun enfant non-voyant, pas un seul ! En sera-t-il ainsi jusqu’à quand ?

Papa Président Noël, j’ai aussi appris que ma sœur Rama, handicapée motrice et mon frère Sidy, sourd-muet n’ont pas pu trouver une place à l’école de la République.

Papa Président Noël, sommes-nous condamnés à demeurer dans les ténèbres de l’ignorance, à désespérer dans l’oisiveté ou à investir les rues psalmodiant?

Papa Président noël, nous vivons des années de frustrations à voir les autres enfants se construire un destin à l’école de la République, pendant que nous enfants handicapés, sommes exclus du chemin du savoir. Certains rongent leur ennui qui n’offre d’autres perspectives que la précarité. D’autres sont poussés vers le chemin déshonorant de la mendicité.

Papa Président Noel, est-ce juste que l’éducation ne soit pas assurée pour tous les enfants de la République ?

Papa Président Noël, promettez-nous de ne rien accepter qui ne soit tolérable dans la République nôtre.

Engagez-vous au service de la justice sociale pour que dans notre république, tous les enfants aient les mêmes droits, les mêmes devoirs, les mêmes chances !

Imprimez une direction, créez de nouveaux instituts spécialisés, de l’harmonie, de la fraternité !

Battez-vous pour que les enfants de la nation, tous, aillent à l’école, heureux d’y être, unis et solidaires !

Travaillez à arriver à une véritable mixité à l’école pour faire en sorte que les jeunes handicapés s’épanouissent, que les enfants bien, mal comme non voyants soient heureux d’être ensemble, de marcher ensemble, de vivre ensemble !

Papa Président, j’ai entendu papa et maman dire que vous incarnez l’espoir et le renouveau pour la nation toute entière.

Papa Macky, me donnerez-vous comme cadeau pour cette fin d’année, bonheur éternel, la chance d’aller à l’école de la République ?

Maman Marème, mère-nation, je sais votre compassion, mais qu’elle ne vous fasse jamais oublier la responsabilité qui est la vôtre :

Eduquer, instruire pour réaliser la promesse républicaine de l’émancipation à travers l’école.

Eduquer, instruire pour donner aux jeunes handicapés la possibilité de se réaliser, de construire leur vie par l’école, par le travail, par leur talent et par leur mérite.

Eduquer, instruire pour qu’ils aient le sentiment et la fierté d’appartenir à la nation. De cette fierté naîtront le désir et la satisfaction morale de servir le Sénégal.

Le pourrai-je un jour ?

Par M. DIOUF Cheikh Saad-bouh, juriste

Président de l’Association des Anciens

Pensionnaires de l’Institut des Jeunes

Aveugles du Sénégal

Tél. 00 33 652 27 27 90

E-mail: sadibou2005@hotmail.fr