La décision du Conseil Constitutionnel Sénégalais au regar du Droit positif

La décision du Conseil Constitutionnel sénégalais de valider la canditure du Président de la République est une hérésie juridique. Cette décision ne respecte aucune logique juridique. Elle bafoue les principes élémentaires du Droit.Elle est humiliante et illogique. Le Droit a été trahi et mal interprété.


Et si les cinq sages ignoraient les règles de base du Droit

La décision du Conseil Constitutionnel Sénégalais au regar du Droit positif
« Qui t’a fait juge » ? « Qu’as tu fait de ta mission » ?
Après la décision du Conseil Constitutionnel le juriste que je suis se sens humilié et déshonoré par les cinq sages. Les règles les plus élémentaires ont été ignorées voire bafouer. La constitution qui est notre Charte fondamentale n’a pas été respectée eu égard à plusieurs principes du Droit.
I. Ignorance des sources du droit
Dans la hiérarchie des normes juridiques, la constitution est considérée comme la norme la plus élevée : c’est la charte fondamentale. A coté de cette dernière les traités internationaux occupent une place importante. Il en est de même de la loi et du règlement qui occupent également une place privilégiée devant respectivement la jurisprudence et la doctrine. La coutume fait également parti des sources du droit. Mais certaines de ces sources sont totalement ignorées par les juges constitutionnels.
1. Non prise en compte de la doctrine
La doctrine, c’est l’ensemble des avis donnés par les spécialistes sur une question donnée. Au Sénégal, les spécialistes du droit constitutionnel sont unanimes sur la thèse de la non- validité de la candidature du Président sortant. Un seul s’est permis de s’abstenir invoquant son obligation de réserve. Il s’agit en l’occurrence du Professeur Serigne DIOP, Médiateur de la République, membre du Parti au pouvoir et brillant constitutionaliste. Son mutisme rejoint un adage bien ancré en Droit selon lequel « qui ne dit mot consent ». Aucun avis contraire de spécialiste du Droit constitutionnel n’a été noté. La thèse de l’invalidité de la candidature est unanimement partagée. Les juges doivent prêter une oreille attentive aux hommes de l’art en l’occurrence les constitutionnalistes. Les praticiens attendent des théoriciens trois choses principales : des innovations, des anticipations et des clarifications. La finalité c’est une orientation pertinente des praticiens. Ne pas prendre en considération l’avis des spécialistes c’est de l’hérésie juridique.
1. Méconnaissance de la jurisprudence sénégalaise
Dans la motivation de l’arrêt rendu par le conseil constitutionnel sur le recours déposé contre la validité de la candidature du président sortant, le conseil constitutionnel estime que la parole du président de la république n’est qu’une opinion et n’a point de valeur législative ou réglementaire. Soutenir une telle thèse, c’est méconnaitre la jurisprudence sénégalaise en la matière. Il existe au Sénégal une jurisprudence dénommée décision Cheikh Anta Diop rendue par la cours suprême du Sénégal. Cette jurisprudence considère que le discours du président de la république, favorable à la création du parti de Cheikh Anta DIOP, est un acte administratif unilatéral, donc acte réglementaire susceptible d’un recours pour excès de pouvoir. Ainsi le jour de computation des délais de recours commence à partir de la date du discours.
II. Ignorance des règles d’interprétation
Selon une maxime juridique très usitée: « l’interprète ne doit pas distinguer la où la loi ne le fait pas ». A contrario si la loi opère une distinction il est également exigée dans la démarche juridique que l’interprète de la règle de droit de procéder à la même distinction que la loi elle-même. Ainsi dans la constitution de 2001 une distinction nette a été faite entre la durée du mandat (qui était de cinq (5) ans puis rallonger à sept (7) ans après la révision constitutionnelle de2008) et le nombre de mandat qui ne peut dépasser 2(puisqu’un seul renouvellement est autorisé). Nous relevons aussi bien une mauvaise interprétation de la lettre et de l’esprit de la constitution.
1. Mauvaise interprétation de la lettre de la constitution
L’article 27 de la constitution de 2001 dispose : « la durée du mandat du Président de la République est de 7 ans. Le mandat est renouvelable une seule fois. En matière constitutionnelle comme, d’ailleurs, en matière pénale, l’interprétation de la norme est stricte. Le mandat prévu par la Charte fondamentale ne pouvant être renouvelé qu’une seule fois. Ainsi, remarquant que le mandat présidentiel de 2007 à 2012 pour un Président réélu renouvelle le mandat préalable de 2000 à2007 exercé par la même autorité. Un autre renouvellement du mandat de 2007 à 2012 n’est plus possible pour le même bénéficiaire car faisant au total deux (2) renouvellements du même mandat alors que la constitution ne prévoit qu’un seul renouvellement.
2. Mauvaise Interprétation de l’esprit de la constitution
L’adoption d’une nouvelle constitution en 2001 était en grande partie motivée par la volonté affichée de limiter la durée de séjours des Présidents en exercice et d’éviter par conséquent les longs séjours à la Magistrature Suprême. C’est ainsi que pour éviter les 20 ans du Président Léopold S. Senghor et les 19 ans du Président Abdou Diouf que l’adoption d’une nouvelle constitution avait été généralement partagée. Un troisième mandat pour Abdoulaye Wade amènerait théoriquement ce dernier à atteindre 19 ans d’exercice du pouvoir comme Diouf ce qui trahirait l’esprit de la constitution de 2001.
Aussi est-il noté un silence sur l’autorité du Président de République. Ce dernier est l’interprète authentique de la constitution. Il en est l’inspirateur. Sa parole doit être pris en compte quand il dit qu’il abloqué la constitution à deux mandats et qu’il ne pourrait plus se représenter. C’est aussi le cas des travaux préparatoires de même que le préambule de la Constitution qui sont considérés comme des actes règlementaires. En effet ces derniers renseignent sur les véritables intentions des initiateurs du texte. D’où l’importance du témoignage du Président ainsi que les membres du comité de rédaction sur la question. A ce jour tous les participants à la rédaction de la constitution soutiennent la thèse de la non-validité.

III. Mauvaise application de la théorie du conflit des lois dans le temps
Les conflits de loi dans le temps sont assujettis à quelques principes fondamentaux : il s’agit du principe de non rétroactivité, du principe de l’effet immédiat et des règles transitoires. Dans le cas d’espèce chaque principe connaît une portée différente.
1. Caractère inopérant du principe de non rétroactivité dans le cas d’espèce
Selon une règle bien partagée en Droit « La loi ne dispose que pour l’avenir, elle n’ a point d’effet rétroactif ». Cette règle pose deux (2) principes fondamentaux : à savoir le principe de non rétroactivité des lois et le principe de l’effet immédiat des lois.
Le principe de non rétroactivité des lois est un principe en vertu duquel une norme juridique nouvelle ne peut remettre en cause les situations anciennes nées de l’application de la règle antérieure. Ce principe est inopérant dans le cas d’espèce eu égard à plusieurs considérations.
D’abord ce principe se limite aux lois et ne s’étend pas à loi constitution. Une analyse substantielle des notions ne saurait assimiler la loi à la constitution. Ce principe évoque les lois au pluriel. Cela signifie qu’il vise les lois en général (loi organique, loi constitutionnelle, loi parlementaire). Ainsi dans toute organisation donnée on peut avoir plusieurs lois mais on ne peut avoir qu’une seule Constitution. D’où le choix du pluriel applicable aux lois à la place du singulier applicable à la constitution qui ne pourrait être qu’une et une seule.
Par ailleurs, ce principe est bien encadré. Elle ne s’applique pas dans toutes les situations. Elle a des exceptions qui sont de plusieurs ordres. Le principe de non-rétroactivité de la loi ne s’applique pas pour les lois :
- Expressément rétroactives : quand le législateur lui-même prévoit exceptionnellement la rétroactivité ;
- Interprétatives : ce sont les lois (rares) qui interprète une loi obscure ; elles viennent s’incorporer à la loi interprétée et sont, pour cela, rétroactives ;
- Pénales plus douces : lois qui édictent des peines moins sévères ; elles s’appliquent pour les infractions commises avant la promulgation de la loi ;
- De procédure et de compétence : elles s’appliquent immédiatement, même aux procès en cours.
Le dénominateur commun de toutes ces exceptions c’est leur caractère important au regard de la société. C’est en général des lois pénales plus douces, des lois de procédure, des lois de compétence etc. Si le principe de non-rétroactivité ne s’applique pas aux lois du fait de leur importance cardinale a fortiori la Constitution qui est la mère de toute loi ou norme existante. C’est la Charte fondamentale. En tout état de cause l’application de ces principes sont tenus de respecter les règles transitoires prévues pour servir de pont entre l’ancienne constitution de 1963 et la nouvelle Constitution de 2001.
2. La présence déterminante des dispositions transitoires dans la Constitution de 2001
Ces règles arbitrent la transition entre la règle ancienne et la nouvelle règle qui la remplace. Ainsi dans la constitution de 2001 des dispositions transitoires sont prévues au niveau de l’article 104 de la constitution de 2001. En faite l’article 104 dispose que : « le Président de la République en fonction poursuit son mandat jusqu’à son terme. Toutes les autres dispositions de la présente constitution lui sont applicables ». A y regarder de près le mandat visé n’est autre que celui de 2000 à 2007 qui était de 7 ans dans l’ancienne Constitution de 1963. Mais du fait de l’entrée en vigueur de la nouvelle Constitution de 2001 risquerait de réduire la durée du mandat. C’est ainsi que l’article 104 par souci de préserver les acquis tirés de l’ancienne Constitution, lui fait une rallonge de deux (2) ans.
La préoccupation fondamentale du constituant était de ne pas léser le Président élu pour un mandat de sept(7) ans alors que l’entrée en vigueur de la nouvelle constitution limite la durée du mandat à cinq (5) ans. Donc on est plus dans l’ancienne constitution de 1963. L’adoption de la nouvelle constitution abroge et remplace l’ancienne constitution. Les seuls résidus de la constitution de 1963 sont contenus dans l’article 104 de la constitution. Ces derniers ne concernent que la durée du mandat et ne sont point étendus aux autres éléments tels que le nombre de mandat.
La justice s’inspirant de la logique divine est fondée sur la sauvegarde des valeurs essentielles dans une société. Ainsi, la trilogie « loi, juge et peuple ne saurait être dissociée ». Le droit est source de paix et de stabilité. Le Droit n’a pas été dit et bien dit. La solution juridique étant épuisée, il ne reste plus que la solution politique qui se traduit, en général, par un rapport de force sur le terrain. Alors Bonjours les dégâts.



Mercredi 8 Février 2012
Serigne SY: Amicale PARLONS DROIT




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