Après les USA et le Printemps Arabe, c’est aujourd’hui le tour de la France de rentrer de plein fouet dans l’ère du retour à l’«Etat de classe» sur la dépouille de l’«État Républicain.» En effet, l’irruption du «Tea Party» sous le premier mandat d’Obama consolidait l’émergence aux USA de l’«extrême Droite» incarnée par Sarah Pauline dans les rangs du Parti Républicain lors de la campagne électorale pour la succession de Georges Bush à la tête de l’État. La Droite républicaine aux USA voulait continuer,comme sous Bush, à soumettre l’État républicain à ses intérêts de classe alors que, par définition, l’État est censé être au dessus des intérêts des classes sociales, pour incarner l’intérêt général, appelé, «intérêt national». Mais la crise du système capitaliste mondial, à son stade de financiarisation sous Bush, avait plongé la société américaine dans des disparités sociales et de classe à tel point qu’aux yeux de l’écrasante majorité des Américains ces disparités vidaient l’État de tout contenu «d’intérêt général» incarnant «l’intérêt national». C’est cela qui a favorisé Obama qui incarnait l’espoir de l’écrasante majorité du peuple américain à mettre fin à cette tyrannie économique et sociale. Le réflexe de classe réapparaissait ainsi au sein du Parti républicain dans toute sa nudité, quand ce parti ambitionnait de revenir aux affaires à la fin du premier mandat d’Obama. Ce parti se sentant ainsi obligé de s’allier au «Tea Party» pour conquérir la majorité à la Chambre des Représentants, au « mid terme» du premier mandat d’Obama. Mais le retour de ce réflexe de classe à Droite ne s’est pas accompagné d’un même réflexe à Gauche pour créer les rapports de force nécessaires dans la société afin de mettre en œuvre le Programme économique et social pour lequel, l’écrasante majorité du peuple américain l’avait porté au pouvoir. Au contraire, à la place de mobiliser le peuple de Gauche, il a préféré trouver des «compromis» avec la Droite qui ont complètement limité la portée sociale de son Programme, et les transformations économiques et du mode de gestion de l’État attendues de lui. C’est cette déception qui a enfanté le mouvement «Occupy Wall Street», pour pointer du doigt là où l’administration d’Obama a capitulé devant l’offensive de classe du grand capital financier et militaro- industriel qui régente le pays à travers la Bourse. Ce mouvement social aux USA, faisait écho au «Printemps arabe» en Tunisie et en Egypte, où les peuples se sont soulevés contre les conséquences économiques et sociales des politiques libérales imposées par les Institutions de Bretton Woods, et que l’Occident a voulu confiner dans les limites étroites de l’édification d’une « Démocratie représentative», selon son modèle, qui pourtant, en pleine crise du système capitaliste, montre, chaque jour davantage, ses limites de classe au service du grand capital. C’est la contradiction entre les exigences de changement dans les rapports économiques, sociaux et politiques dans ces pays, et les limites de classe bourgeoise que les grandes puissances occidentales ont voulu leur imposer avec l’appui des Monarchies pétrolières du Moyen Orient, qui a plongé ces pays dans une insécurité sociale et civile, qui enlève à la «Démocratie représentative» tout son contenu « mythique» d’un État républicain au service de l’intérêt national. C’est cette toile de fonds qui s’est exprimée en Espagne et au Portugal et en Italie, lors des récentes élections législatives, où la «Droite décomplexée» , face à une Gauche social démocrate «prisonnière de sa culture de compromis», qui a donné corps aux mouvements des «Indignés», comme expression populaire de l’exigence d’un État libéré des intérêts du capital financier qui régente ces pays, pour le mettre au service des classes moyennes et populaires pour sortir de la crise. C’est ce même scénario qui se déroule en direct en Grèce pour le contrôle de l’État entre la Droite soutenue par l’Union Européenne et les Institutions de BrettonWoods, et les forces politiques de Gauche soutenues largement par un puissant mouvement social. C’est cette conjonction entre les forces politiques de Gauche et le mouvement social qui a fait défaut aux USA sous Obama, dans les pays du «Printemps arabe», en Espagne, au Portugal et en Italie. Aujourd’hui, c’est au tour de la France, après l’échec du «Front républicain» à Villeneuve- sur-lot, de rentrer dans l’ère du retour de l’«État de classe» à la place de l’«État républicain» qu’incarnait déjà le glissement de l’UMP, sous Sarkozy, vers l’extrême Droite, que sa défaite aux Présidentielles avait ralenti. Mais la politique de «compromis social démocrate» mise en œuvre par Hollande, une fois au pouvoir, a divisé les forces politiques et sociales de Gauche, dont l’unité avait mis fin au régime de la «Droite Sarkozienne», pour mettre l’État au service des classes moyennes et pauvres, et répondre aux aspirations du peuple à faire évoluer la « Démocratie représentative» vers une «Démocratie participative». Comme avec Obama, cette politique a isolé peu à peu le Parti Socialiste des autres forces politiques de Gauche, des travailleurs et des couches populaires. Cela s’est traduit, au plan politique, par une perte successive de huit élections législatives partielles au profit de l’UMP et d’une montée en puissance de l’extrême Droite, au point qu’il ne lui reste que trois Députés pour conserver sa majorité absolue à l’Assemblée nationale, qui lui avait permis de s’écarter des autres forces politiques de Gauche qui avaient contribué à porter son candidat à la Présidence. La Droite en France a donc les coudées franches pour reprendre son glissement vers l’extrême Droite, comme le fit le Parti républicain américain, pour revenir aux affaires. C’est ce retour qui est aussi à l’œuvre au Brésil, où le «compromis» avec la droite a atteint ses limites sociales, après avoir réduit la pauvreté de 34% à 22%, en sortant 30 millions de Brésiliens de la pauvreté. Mais, ces conquêtes sociales tangibles ont été accompagnées d’une aggravation du chômage et de l’inflation, et d’une grave détérioration des services publics d’éducation, de santé et de transport, qui ont placé ces «nouvelles classes moyennes» dans des conditions de vie insoutenables qui menacent de les replonger, à tout moment, dans la pauvreté. En face, elles assistent aux scandales de corruption au sein des hautes sphères de l’État, et à des dépenses de prestige comme celles pour organiser la Coupe du monde pour 11 à 15 milliards de Dollars US. C’est cette politique de la Gauche au pouvoir qui a fini par convaincre les travailleurs et les couches populaires du Brésil de l’évolution de la nature sociale de classe de l’État, qui incarne de plus en plus les intérêts des grands groupes d’affaires brésiliennes associés au capital financier international. Ce glissement vers un État de classe bourgeoise sans fard est à l’origine des puissants mouvements sociaux qui secouent aujourd’hui le Brésil pour l’avènement d’un État qui incarne leurs intérêts économiques et sociaux. Partout donc dans le monde occidental, dans les pays du Printemps arabe, le retour à l’État de classe bourgeoise sur les cendres de l’État républicain est donc inéluctable avec le retour aux affaires de la Droite alliées à l’extrême Droite. Ce virement ne pourra pas se produire si les forces politiques de Gauche s’allient avec les mouvements sociaux pour la Refondation de l’État sur des bases démocratiques et citoyennes, et pour la transformation du système économique et social afin de le mettre au service des classes moyennes et pauvres de la société, comme le Front de Gauche, en France, le réclame du Parti Socialiste. La crise actuelle du système capitaliste financiarisé est donc grosse d’un basculement à la Dictature pour rétablir un «ordre social compatible aux affaires», ou d’une véritable révolution sociale, pour un État démocratique, citoyen et social, qui dépasse les limites de la Démocratie représentative qui a perdu son contenu «mythique» d’État national au service du peuple. C’est cette problématique qui est aussi, au Sénégal, au centre des exigences de la Refondation de l’État, telle que prévue dans les Conclusions consensuelles de Assises nationales de 2008. Elle est l’enjeu des débats qui vont s’organiser dans les Consultations citoyennes que va tenir la Commission Nationale de Réforme des Institutions dans tous les Départements administratifs du pays et au sein de la Diaspora. Ces Consultations interpellent donc les forces politiques de Gauche et le mouvement social et citoyen de notre pays pour mettre en place une large alliance, afin de peser ensemble sur l’issue de ces débats par l’adoption d’une nouvelle Constitution qui refonde notre État selon les attentes démocratiques, participatives, citoyennes et sociales, qui sont à l’œuvre, certes à des niveaux et modalités propres à chaque région du monde. Ibrahima Sène
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