Au delà des «bouillons», le véritable défi de la sécurité sanitaire des aliments au Sénégal


Au delà des «bouillons», le véritable défi de la sécurité sanitaire des aliments au Sénégal
« Quant au ventre, préserver-le de la consommation de ce qui est illicite et douteux et ce sans cesse »

« Et la recherche de ce qui est licite est un devoir qui incombe à tout musulman, Ni la science ni l’adoration ne sont profitables avec la consommation de choses illicites » (Le Viatique de la Jeunesse) CHEICK AMADOU BAMBA


Suite à un article d’un quotidien de la place, intitulé les « Bouillons qui tuent », il me paraît important d’apporter quelques remarques sur ce sujet, au-delà du sensationnel médiatique en évitant les amalgames sur un problème de santé publique et ne pas jeter l’opprobre sur la totalité d’une industrie légalement constituée pourvoyeuse d’emplois.
Il s’agira d’abord de lever certaines équivoques sur les risques ou les dangers que poserait le Glutamate Monosodique (GMS) et ainsi éviter les conclusions hâtives sur un sujet qui divise encore nombre de mes collègues ainsi que le monde scientifique dans son ensemble. Mais fondamentalement, on ne peut plus occulter le véritable débat sur l’urgence de mettre en place un véritable système national de sécurité sanitaire des aliments pour assurer la protection de la santé du consommateur sénégalais. Le droit à la santé relève d’un intérêt national dans un contexte de mondialisation effrénée où les frontières peuvent être de véritables passoires pour des produits mettant en danger la vie humaine.
Venons en au glutamate monosodique : Le glutamate monosodique (E621) est un exhausteur de goût c’est à dire qu’il est utilisé pour renforcer le goût des aliments. A l’état actuel des connaissances scientifiques, le GMS est reconnu comme inoffensif dans les conditions de ses utilisations actuelles. Il est autorisé dans la liste positive des additifs alimentaires par la réglementation de l’Union Européenne, il fait partie de la liste des GRAS (Généralement reconnus comme inoffensifs) de la Food and Drug Administration américaine. Le Codex Alimentarius (Commission mixte OMS/FAO représentant 158 pays) qui est la référence internationale en matière de législation alimentaire dans sa Norme Générale sur les additifs alimentaires, l’intègre dans la liste des produits autorisés.

Cependant il a été noté chez certains consommateurs « sensibles » des effets connus sous le nom du « syndrome du restaurant chinois » avec l’apparition de migraines, de nausées et vomissements.

Loin de moi l’idée de défendre une industrie quelconque mais j’affirme qu’à l’état actuelle des connaissances et de la réglementation internationale, rien ne permet d’interdire la production et la vente des bouillons culinaires. Cela ne veut en aucun cas dire que leurs productions ne doivent être réglementée et contrôlées à l’instar de toute production alimentaire.

L’amalgame qui fait penser que les « bouillons » causent des maladies chroniques s’explique à ce jour par le fait qu’ils participent à augmenter l’apport en sodium chez les consommateurs. Et le rôle du sel dans la recrudescence des maladies cardiovasculaires n’est plus à démontrer.

Des études scientifiques prouvent clairement les effets néfastes pour la santé d'une consommation excessive de sel, notamment sur la pression sanguine, qui entraînent des maladies cardiovasculaires, des cancers de l'estomac, des calculs rénaux et le diabète…

C’est d’ailleurs ce qui justifie que l’OMS recommande de réduire les apports de sel alimentaire en les ramenant à moins de 6g /jour (équivalent à environ une cuillère à café) pour prévenir les maladies chroniques premières causes de décès dans le monde.

Alors il faut avoir l’audace de dire aux sénégalais qu’ils mangent trop de sel et qu’ils mettent en péril leur santé. Il ne s’agira pas juste de le leur dire mais il faut les informer sur les risques et les pousser à modifier certaines habitudes culinaires.

Alors oui le poison est bien dans le bol mais sous le nom des trop fortes quantités de sel (les bouillons en augmentent le taux) utilisé dans notre Tiébou Diène et autres sauces, sous le nom des fortes quantités d’huile fumante (fameux « Rossi ») utilisées quotidiennement, sous le nom des poissons fumés et autres kong sources de benzopyrènes substances cancérigènes, sous le nom des légumes bourrés de pesticides et des aflatoxines contenus dans notre « guérté ». Et là je ne cite même pas les contaminations microbiologiques qui détiennent le palmarès des dangers avec leur lot de toxi-infections alimentaires, ou encore les résidus de médicaments vétérinaires dans les viandes,…


Alors face à tous ces dangers le consommateur sénégalais jouit il d’un système de protection efficace, est il bien informé ?

Et bien non !

Aujourd’hui, le Sénégal, comme la plupart des pays africains (en dehors du Maghreb et l’Afrique du Sud) n’assume pas sa responsabilité de protection des consommateurs dans le respect de leurs droits à la sécurité des aliments qui leur sont proposés, de leur droits à être informé sur les dangers et risques éventuels.

Les seuls efforts qui sont faits vont en direction des produits exportés car allant vers des marchés exigeants pour la santé de leurs consommateurs.

Notre pays ne dispose pas d’un Système National de Sécurité Sanitaire des aliments approprié et efficace lui permettant d’assurer le droit fondamental des consommateurs que nous sommes tous.

Pouvez vous imaginer que la seule loi de référence pour le contrôle des produits alimentaires a été promulguée par le Président Senghor en 1966 avec quelques décrets d’applications (Loi n° 66-48 du 27 mai 1966, relative au contrôle des produits alimentaires et à la répression des fraudes). Inutile de dire que cette loi est devenue obsolète.

Alors voilà un vaste chantier pour notre nouvelle assemblée nationale et pour nos honorables députés, il s’agira de relever un défi sur un retard de près de deux générations dans la mise en place d’une réglementation appropriée pour assurer la protection de la santé des consommateurs sénégalais dans un monde en pleine mutation et dans un contexte de mondialisation effrénée.

Protéger les droits du consommateur sénégalais doit relever d’un niveau d’intérêt national pour l’Etat et nécessite une volonté et un engagement politique sans faille du Président de la République. C’est bien J F Kennedy qui avait tracé le chemin et impulser la politique de la protection du consommateur américain suivi par Nixon.

Que devra alors faire l’Etat une fois la volonté du Président de la République de protéger la santé des consommateurs affirmée:

D’abord, mettre en place une législation appropriée pour respecter les prescriptions des mesures de l’Accord SPS (mesures sanitaires et phytosanitaires) de l’OMC. La méthode d’Analyse des Risques qui est une approche scientifique (Evaluation des risques, Gestion des risques et Communication sur les risques) peut lui permettre de bâtir une véritable politique de Sécurité sanitaire des aliments pour notre pays ;

Ensuite mettre en place des services administratifs et des services de contrôle ou renforcer ceux existants (nous avons d’excellents services vétérinaires et de laboratoires) avec des prérogatives claires et des ressources adéquates pour la gestion des risques alimentaires, mission de service publique par excellence;
Et puis renforcer les associations de consommateurs et avoir des instances consultatives compétentes ; le tout avec une coordination de l’ensemble des acteurs par un organisme fédérateur (une belle initiative avait été lancée avec l’idée d’une Agence Sénégalaise de la Sécurité Sanitaire des Aliments restée finalement sans suite).


Les défis à relever en matière de sécurité des aliments sont immenses pour notre pays où tout est urgence mais le droit à une alimentation saine un est droit fondamental et au delà des enjeux de santé publique les enjeux économiques représentent une opportunité à saisir pour notre pays.


Tous les acteurs, le Président de la République en premier lieu, sont interpelés pour la construction du YOONU YOXOTE du consommateur sénégalais.




FATOU SOCK

INGENIEUR AGROALIMENTAIRE fatousock@hotmail.com
Vendredi 31 Août 2012
FATOU SOCK




1.Posté par professeur le 31/08/2012 12:42
Vous ne comprenez toujours pas les choses.
Dans un pays corrompu rien ne peut marcher normalement.
Quand on a un produit dangereux on corrompe un homme politique et la marchandise rentre
La corruption fausse tout

2.Posté par citizen le 31/08/2012 13:08
Merci Fatou. Intervention pertinente.
Pour les bouillons, je pense que dés qu'on parle de molécules ou de composés, il y a toujours des effets secondaires sur la santé, effets parfois très nefastes. Aussi, je pense que dès qu'il y a des controverses, des doutes sur les effets d'un produit sur la santé, l'Etat se doit de prendre les mesures necessaires pour arreter son importation ou à defaut decourager son achat, comme pour la cigarette, en le taxant lourdement. Ces produits sont interdits dans les pays sérieux..
Ce qu'il faut rajouter c'est qu'il y a de ces problemes qui en induisent beaucoup d'autres. Ainsi tes propositions de lois et de structures de controle sont vraiment les bienvenus; la santé des senegalais s'en trouverait mieux preservée, ça aura un effet sur notre productivité, donc notre Economie.
Enfin je dirais que seules des autorités qui ont de la vision peuvent prendre au sérieux voir anticiper ce que tu dis, pas celles qui gerent le quotidien et jouent aux pompiers. C'est comme avec les inondations, en reglant le probleme on diminuera du meme coup le taux du paludisme car c'est dans les eaux stagnantes que les moustiques se reproduisent.
J'espere que ton appel sera entendu.
Wa salam.

3.Posté par gueye le 31/08/2012 13:41
Intervention pertinente. J'ai bien aimé la contribution de citizen aussi par rapport à l'anticipation des problémes. c'est vrai que Macky, est arrivé au pouvoir y'a pas longtemps, mais il serait quand meme important dans le long terme que son gouvernement ait cette capacité d'anticiper les problémes qui gangrènent le quotidien des sénégalais.

4.Posté par LE VIET le 31/08/2012 14:13
Encore une fois l'argent! gains au détriment de la santé de toute une génération qui laissera des séquelles aux futures générations !En 2011 il y a eu un article qui a fait tollé relativement à un bouillon qui avait les même propriétés qu'un détergent pour les marmites des journalistes ont mené une enquêtes mais au bout du compte le silencieux a dégainé le silence est revenu et le bouillon continue sur sa lancée!!
Silence on prend tranquillement le chemin des hôpitaux et des cliniques en mangeant ce que nos industriels véreux nous produisent et nous font acheter par des puissantes campagnes publicitaires!la santé publique est pourtant sous la responsabilité de l'état mais dont les hommes payés pour faire leur boulot ouvrent leur tiroir pour y recevoir l'enveloppe portée par l'industriel lors de sa convocation! Encore une fois nous sommes tous complices de nos maux ! si nous n'avons pas encore les labo d'analyses il est très facile de prélever un échantillon de production à n'importe quel moment et l'expédier dans un pays où il sera analysé aux frais de l'industriel! tout est une question de conscience et probité et de moralité !si tel ne sera pas le cas , messieurs agrandissons nos cimetières!

5.Posté par aboubakr sadikh le 01/09/2012 03:30
Soxna fatou dieredieuf li nga def lou bakh la te sa xalat amna solo te amna nderigne si askaan wii yalla na la yalla faay inchallah...

6.Posté par JAZZ le 01/09/2012 05:10
Belle analyse!
Cependant le problème pourrait se résumer en 5 points fondamentaux:
1- Augmenter le pouvoir d'achat des sénégalais car si on est pauvre, on ne choisit pas ce qu'on mange
2- Diversifier l'alimentation des sénégalais en insistant sur l'agroalimentaire local
3- Instaurer un système de sécurité almentaire et de sécurité des aliments basé sur la maîtrise du risque
4- Éduquer et responsabiliser les consommateurs à travers une communication du risque efficace
5- Instaurer un cadre de référence scientifique et des lois qui s'appliqueront en toute équité et en dehors de toute forme de corruption ou de concussion.

7.Posté par Cayor le 01/09/2012 10:24
Belle réflexion Jazz, vous savez le Sénégal regorge de compétences mais on n'a pas souvent l'occasion de les écouter et de parler de solutions pour notre développement car il n' ya de la place que pour la politique politicienne; alors il faut multiplier les contributions, chacun dans son domaine de compétence pour parler enfin de solutions ;

8.Posté par DEUGUE-LA-VERITE le 02/09/2012 12:00
excellent article. voilà le genre d'informations dont les sénégalais ont besoin et qui doivent être vulgarisées dans le but de les pousser à revoir leur manière de s'alimenter. en fait si les maladies cardio-vasculaires sont entrain de devenir la première cause de mortalité au sénégal, c'est à cause surtout d'une mauvaise alimmentation, avec la surabondance du sel, du reste très présent dans la compostion des bouillons, dans notre alimentation et non à cause uniquement des cubes jumbo et autres maggi nokoss...

vivement que les recommandations contenues dans cet article puissent etre prises en compte par les nouvelles autorités et mettre en place un cdre législatif permettant une meilleure protection du consommateur sénégalais


9.Posté par amy le 02/09/2012 18:46
ayez pitié de nous



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