Un banquier formé en Suisse connaît a priori deux exemples opposés de pays sur l’utilisation des ressources financières issues de l’exploitation du pétrole et du gaz : le Nigeria et la Norvège.
Prenons le cas du Nigeria. Cet immense pays d’Afrique produit 2,5 millions de barils de pétrole par jour. Un pactole considérable, mais une richesse inaccessible pour l'immense majorité de la population. L'Etat nigérian, qui ponctionne 60% des recettes pétrolières des compagnies étrangères, est censé les redistribuer aux différents Etats du pays.
Depuis 50 ans, date de la découverte du premier gisement pétrolier, la malédiction est tombée sur la région sud du pays. En s'implantant dans cette zone, les compagnies ont déplacé des villages entiers. Puis, elles ont ravagé les cultures agricoles pour le tracé des pipelines. Et comme pour ajouter du malheur au malheur, la pollution par hydrocarbures asphyxie les mangroves où les poissons étaient autrefois nombreux. Résultat des courses : des bandes armées d'hommes cagoulés sillonnent les mangroves du delta du Niger à bord de leurs insaisissables speedboats. Leurs cibles ? les pétroliers. Leurs armes ? de traditionnelles kalachnikovs. Leur tactique ? essentiellement l'enlèvement de travailleurs étrangers. A cela, s’ajoute le terrorisme du mouvement Boko Haram dont la revendication identitaire islamiste se greffe à un sentiment de révolte sur la corruption généralisée dans le secteur pétrolier.
Niveau corruption des élites politiques justement, rien que concernant les avoirs restitués par Berne à Lagos et qui ont été détournés par le dictateur Abacha, le montant s’élève à 321 millions de Francs Suisse, environ 177 milliards de FCFA. Cela donne une idée de l’ampleur du phénomène.
8000 km au Nord du Nigéria, la Norvège, autre pays producteur de pétrole. De 1960 à 1990, le consensus politique bâti par les anciens Premier ministre Gehardsen, puis Ekofisk et le Comité Tempo a fait éclore un fonds souverain, la Norges Bank Investment Management (NBIM), où le gouvernement peut stocker les recettes issues du pétrole et du gaz. Cela se fait par le biais de transferts réguliers du capital des revenus issus du pétrole et du gaz (impôts et taxes diverses, droit d’exploitations, dividendes sur les participations de l’Etat, etc.) vers le fonds spécial.
La spécificité du fonds réside dans le fait que le gouvernement ne peut qu’utiliser le rendement réel du fonds pour accroitre sa marge de manœuvre dans les politiques de l’Etat-Providence. De plus, une rigueur salutaire impose que l’Etat ne peut ponctionner au maximum que 4% des bénéfices réels dégagés par le fonds. C’est en quelque sorte une épargne pour les Norvégiens, à qui le fonds appartient. Quand, on pense que l’objectif communautaire de l’UEMOA en termes de déficit public vise un plafond de 3% à l’horizon 2020, en voici une piste concrète de son atteinte !
Le fonds norvégien a atteint un nouveau record le mardi 12 septembre 2017, passant la barre symbolique des 1 000 milliards de dollars d'encours sous gestion, soit 2,7 fois le PIB de la Norvège. L’allocation d’actifs s’effectue désormais à travers 60% d’actions, 35% d’actifs obligataires et 5% d’immobilier, tout cela hors Norvège. Ce fonds souverain est le premier actionnaire de deux tiers des entreprises du CAC 40, parmi lesquels Axa, Air Liquide, Carrefour, Capgemini, Renault, Sanofi, Gemalto ou encore la Société Générale.
Il est évident qu’il faut s’inspirer dans notre cas plus du modèle norvégien que de nos amis nigérians en mettant en place un fonds spécial adapté à nos contraintes locales.
Ainsi, outre la fin budgétaire de l’utilisation des ressources d’un tel fonds, le financement des besoins de l’Etat-Providence au Sénégal est crucial et pourrait se faire selon la clé de répartition intelligente avec des objectifs clairs et précis. Par exemple, il semble utile d’avoir un programme de 15 ans pour construire dans chacune des régions administratives un grand hôpital pour lifter la santé de nos concitoyens.
Autre piste d’investissement, les infrastructures nationales structurantes. L’idée de construire un barrage qui traverse tout le pays du Nord au Sud pourrait permettre de doper considérablement les rendements agricoles et de catalyser un réel développement de nos terroirs, sans compter la dimension de l’élevage et de la lutte contre l’avancée du désert et des aléas climatiques. Le cercle vertueux que ce type de projet créera est d’un diamètre insoupçonné, tellement de paramètres entrent en jeu pour modifier dans le bon sens des pans entiers de notre économie.
Ces petites idées nous semble-t-il peuvent améliorer le vécu des populations et signer définitivement la fin du sous-développement de notre pays. C’est cela notre mission sacerdotale et notre exigence de legs à nos futurs enfants.
Seydina NDIAYE
Banquier
Prenons le cas du Nigeria. Cet immense pays d’Afrique produit 2,5 millions de barils de pétrole par jour. Un pactole considérable, mais une richesse inaccessible pour l'immense majorité de la population. L'Etat nigérian, qui ponctionne 60% des recettes pétrolières des compagnies étrangères, est censé les redistribuer aux différents Etats du pays.
Depuis 50 ans, date de la découverte du premier gisement pétrolier, la malédiction est tombée sur la région sud du pays. En s'implantant dans cette zone, les compagnies ont déplacé des villages entiers. Puis, elles ont ravagé les cultures agricoles pour le tracé des pipelines. Et comme pour ajouter du malheur au malheur, la pollution par hydrocarbures asphyxie les mangroves où les poissons étaient autrefois nombreux. Résultat des courses : des bandes armées d'hommes cagoulés sillonnent les mangroves du delta du Niger à bord de leurs insaisissables speedboats. Leurs cibles ? les pétroliers. Leurs armes ? de traditionnelles kalachnikovs. Leur tactique ? essentiellement l'enlèvement de travailleurs étrangers. A cela, s’ajoute le terrorisme du mouvement Boko Haram dont la revendication identitaire islamiste se greffe à un sentiment de révolte sur la corruption généralisée dans le secteur pétrolier.
Niveau corruption des élites politiques justement, rien que concernant les avoirs restitués par Berne à Lagos et qui ont été détournés par le dictateur Abacha, le montant s’élève à 321 millions de Francs Suisse, environ 177 milliards de FCFA. Cela donne une idée de l’ampleur du phénomène.
8000 km au Nord du Nigéria, la Norvège, autre pays producteur de pétrole. De 1960 à 1990, le consensus politique bâti par les anciens Premier ministre Gehardsen, puis Ekofisk et le Comité Tempo a fait éclore un fonds souverain, la Norges Bank Investment Management (NBIM), où le gouvernement peut stocker les recettes issues du pétrole et du gaz. Cela se fait par le biais de transferts réguliers du capital des revenus issus du pétrole et du gaz (impôts et taxes diverses, droit d’exploitations, dividendes sur les participations de l’Etat, etc.) vers le fonds spécial.
La spécificité du fonds réside dans le fait que le gouvernement ne peut qu’utiliser le rendement réel du fonds pour accroitre sa marge de manœuvre dans les politiques de l’Etat-Providence. De plus, une rigueur salutaire impose que l’Etat ne peut ponctionner au maximum que 4% des bénéfices réels dégagés par le fonds. C’est en quelque sorte une épargne pour les Norvégiens, à qui le fonds appartient. Quand, on pense que l’objectif communautaire de l’UEMOA en termes de déficit public vise un plafond de 3% à l’horizon 2020, en voici une piste concrète de son atteinte !
Le fonds norvégien a atteint un nouveau record le mardi 12 septembre 2017, passant la barre symbolique des 1 000 milliards de dollars d'encours sous gestion, soit 2,7 fois le PIB de la Norvège. L’allocation d’actifs s’effectue désormais à travers 60% d’actions, 35% d’actifs obligataires et 5% d’immobilier, tout cela hors Norvège. Ce fonds souverain est le premier actionnaire de deux tiers des entreprises du CAC 40, parmi lesquels Axa, Air Liquide, Carrefour, Capgemini, Renault, Sanofi, Gemalto ou encore la Société Générale.
Il est évident qu’il faut s’inspirer dans notre cas plus du modèle norvégien que de nos amis nigérians en mettant en place un fonds spécial adapté à nos contraintes locales.
Ainsi, outre la fin budgétaire de l’utilisation des ressources d’un tel fonds, le financement des besoins de l’Etat-Providence au Sénégal est crucial et pourrait se faire selon la clé de répartition intelligente avec des objectifs clairs et précis. Par exemple, il semble utile d’avoir un programme de 15 ans pour construire dans chacune des régions administratives un grand hôpital pour lifter la santé de nos concitoyens.
Autre piste d’investissement, les infrastructures nationales structurantes. L’idée de construire un barrage qui traverse tout le pays du Nord au Sud pourrait permettre de doper considérablement les rendements agricoles et de catalyser un réel développement de nos terroirs, sans compter la dimension de l’élevage et de la lutte contre l’avancée du désert et des aléas climatiques. Le cercle vertueux que ce type de projet créera est d’un diamètre insoupçonné, tellement de paramètres entrent en jeu pour modifier dans le bon sens des pans entiers de notre économie.
Ces petites idées nous semble-t-il peuvent améliorer le vécu des populations et signer définitivement la fin du sous-développement de notre pays. C’est cela notre mission sacerdotale et notre exigence de legs à nos futurs enfants.
Seydina NDIAYE
Banquier
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