Après ma contribution nommée : éclairages économiques sur la tension financière après la sortie du ministre de l’économie des finances et du plan, contribution publiée dans les quotidiens (24 heures et Témoin du 8 juin, lequotidien du 9 juin, walfquotidien du 11 juin et sur le site léral.net), je reviens pour parler d’un autre problème de choix économique qui fatigue les ménages et tue les entreprises : la focalisation du ministre de l’économie et des finances sur l’atteinte de la cible du déficit budgétaire fixé avec le FMI.
Cette focalisation sur l’objectif d’atteinte de la cible du déficit budgétaire fixée dans la loi de finance 2018 fatigue les ménages et tue les entreprises.
Lors de sa visite à la direction générale de la comptabilité publique et du trésor le 08 juin 2018, le ministre de l’économie disait : « L’environnement international a changé dans le second semestre de l’année 2017 avec la hausse du baril du pétrole, et on s’est retrouvé avec une moins-value de recettes de 130 milliards de fcfa. Dans cette situation pareille, le gouvernement s’était engagé sur une cible de déficit budgétaire de 337 milliards dès lors, avec la moins-value de recettes, on pouvait partir de 337 milliards plus 130 milliards soit un déficit budgétaire de 6%. Si on l’avait fait, sur le marché on n’aurait pas eu ces taux (taux d’intérêt sur les obligations). Cela ôterait au Sénégal toute crédibilité. Durant cette période 2017, nous avons pensé tout faire pour que la cible du déficit soit respectée et reporté à certaines dépenses sur 2018. En 2018 on a fait des reports de dépenses mais l’environnement a continué de se dégrader ; le pétrole a atteint 80 dollars le baril ».
Selon le ministre l’augmentation du prix du baril a créé une moins-value de recettes de 130 milliards c’est-à-dire 130 milliards de dépenses de plus par rapport à ce qui était prévu dans la loi de finance initiale 2018. Qu’a fait le ministre de l’économie avec ces 130 milliards fcfa ?
Dans sa volonté d’être un bon élève du FMI c’est-à-dire de conserver la cible du déficit budgétaire à 337 milliards comme promis, le ministre va reporter à l’année d’après des dépenses importantes pour l’amélioration du quotidien des ménages et va déshonorer ses engagements financiers vis à vis de ses fournisseurs et co-contractants. Le ministre veut respecter ses engagements avec le FMI mais respecter ses engagements avec le FMI jusqu’à contraindre les ménages et les entreprises à la souffrance pose problèmes.
Si le prix du baril du pétrole saute, le déficit aussi doit sauter peut être à des proportions moindre mais il doit sauter pour mettre à l’aise les ménages et entreprises. Si les autorités (président et ministres) sont là aujourd’hui c’est à cause des populations et des entrepreneurs (qui votent) et non à cause du FMI. Vouloir être un bon élève du FMI jusqu’à contraindre les ménages et entreprises n’est point salutaire pour un dirigeant.
De 2000 à 2005 le Sénégal a été un bon élève dans le respect de la cible du déficit. Pendant cinq (5) il était dans la moyenne des 3% fixé comme cible du déficit. Mais en 2006 à cause des problèmes énergétiques (prix du baril) le président Wade n’avait pas hésité à faire sauter le cible du déficit jusqu’à 6% pour mettre à l’aise les ménages et les entreprises. En 2011 encore, le président Wade n’avait pas hésité à faire sauter encore le cible du déficit à 6% pour faire passer le plan takkal qui avait permis aux ménages et aux entreprises de vivre plus de 5 mois sans coupures intempestives. Le déficit budgétaire comme la dette sont des instruments de création de richesse pour les ménages et les entreprises.
Le rôle de l’État est de soutenir par les dépenses l’activité globale, a fortiori lorsque le privé va mal comme au Sénégal. En 2009-2010, pour éviter l’effondrement, relancer l’activité et l’emploi, les États-Unis n’ont pas hésité à pousser leur déficit jusqu’à 13 % de leur PIB. En pleine crise financière, le secrétaire au trésor américain Henry Paulson n’avait pas hésité à faire sauter le déficit à cause de son plan de relance de 750 milliards de dollars pour régler la crise économique. Le déficit avait sauté pour soulager les ménages et les entreprises américaines.
Aujourd’hui dans ce monde en mal de croissance les pays font des choix économiques et le critère est : un pays a droit au déficit nécessaire pour obtenir un niveau satisfaisant d’activité. C’est ce que continuent à faire le Japon (déficit public prévu 5 %), les États-Unis (4,4 %) et le Royaume-Uni (3,5 %).
Dans la zone euro, en pleine crise économique (2010 à 2015) tous les pays ont fait sauter la cible du déficit fixée à 3% du PIB. Les pays de la zone euro sauf l’Allemagne (à cause de son manque d’investissement public) ont fait sauter la cible du déficit en pleine crise et ont violé le critère de convergence fixant la cible du déficit à 3%. Ils ont fait sauter le déficit pour soulager leurs ménages et entreprises.
Aujourd’hui au Sénégal si le prix du baril saute et menace la cible du déficit de 3% on le répercute sur les ménages et les entreprises pour les beaux yeux du FMI. Et pourtant quand le prix du baril chute de 75% les ménages et les entreprises ne le sentent pas.
Nos autorités de l’économie préfèrent honorer leurs engagements avec le FMI et déshonorer leurs engagements avec les ménages et les entreprises sénégalaises : soit on est avec le FMI soit on est avec le peuple. Thomas Sankara disait : « Je préfère faire un pas avec le peuple que 100 pas sans le peuple ».
En Afrique nos ministres de l’économie et des finances ont souvent pour objectif d’être des bons élèves du FMI à la défaveur du peuple. Leur objectif est clair : intégrer le FMI à la fin de leur magistère au ministère.
El Hadji Mansour Samb
Economiste et auteur du livre : Les Limites du PSE
Cette focalisation sur l’objectif d’atteinte de la cible du déficit budgétaire fixée dans la loi de finance 2018 fatigue les ménages et tue les entreprises.
Lors de sa visite à la direction générale de la comptabilité publique et du trésor le 08 juin 2018, le ministre de l’économie disait : « L’environnement international a changé dans le second semestre de l’année 2017 avec la hausse du baril du pétrole, et on s’est retrouvé avec une moins-value de recettes de 130 milliards de fcfa. Dans cette situation pareille, le gouvernement s’était engagé sur une cible de déficit budgétaire de 337 milliards dès lors, avec la moins-value de recettes, on pouvait partir de 337 milliards plus 130 milliards soit un déficit budgétaire de 6%. Si on l’avait fait, sur le marché on n’aurait pas eu ces taux (taux d’intérêt sur les obligations). Cela ôterait au Sénégal toute crédibilité. Durant cette période 2017, nous avons pensé tout faire pour que la cible du déficit soit respectée et reporté à certaines dépenses sur 2018. En 2018 on a fait des reports de dépenses mais l’environnement a continué de se dégrader ; le pétrole a atteint 80 dollars le baril ».
Selon le ministre l’augmentation du prix du baril a créé une moins-value de recettes de 130 milliards c’est-à-dire 130 milliards de dépenses de plus par rapport à ce qui était prévu dans la loi de finance initiale 2018. Qu’a fait le ministre de l’économie avec ces 130 milliards fcfa ?
Dans sa volonté d’être un bon élève du FMI c’est-à-dire de conserver la cible du déficit budgétaire à 337 milliards comme promis, le ministre va reporter à l’année d’après des dépenses importantes pour l’amélioration du quotidien des ménages et va déshonorer ses engagements financiers vis à vis de ses fournisseurs et co-contractants. Le ministre veut respecter ses engagements avec le FMI mais respecter ses engagements avec le FMI jusqu’à contraindre les ménages et les entreprises à la souffrance pose problèmes.
Si le prix du baril du pétrole saute, le déficit aussi doit sauter peut être à des proportions moindre mais il doit sauter pour mettre à l’aise les ménages et entreprises. Si les autorités (président et ministres) sont là aujourd’hui c’est à cause des populations et des entrepreneurs (qui votent) et non à cause du FMI. Vouloir être un bon élève du FMI jusqu’à contraindre les ménages et entreprises n’est point salutaire pour un dirigeant.
De 2000 à 2005 le Sénégal a été un bon élève dans le respect de la cible du déficit. Pendant cinq (5) il était dans la moyenne des 3% fixé comme cible du déficit. Mais en 2006 à cause des problèmes énergétiques (prix du baril) le président Wade n’avait pas hésité à faire sauter le cible du déficit jusqu’à 6% pour mettre à l’aise les ménages et les entreprises. En 2011 encore, le président Wade n’avait pas hésité à faire sauter encore le cible du déficit à 6% pour faire passer le plan takkal qui avait permis aux ménages et aux entreprises de vivre plus de 5 mois sans coupures intempestives. Le déficit budgétaire comme la dette sont des instruments de création de richesse pour les ménages et les entreprises.
Le rôle de l’État est de soutenir par les dépenses l’activité globale, a fortiori lorsque le privé va mal comme au Sénégal. En 2009-2010, pour éviter l’effondrement, relancer l’activité et l’emploi, les États-Unis n’ont pas hésité à pousser leur déficit jusqu’à 13 % de leur PIB. En pleine crise financière, le secrétaire au trésor américain Henry Paulson n’avait pas hésité à faire sauter le déficit à cause de son plan de relance de 750 milliards de dollars pour régler la crise économique. Le déficit avait sauté pour soulager les ménages et les entreprises américaines.
Aujourd’hui dans ce monde en mal de croissance les pays font des choix économiques et le critère est : un pays a droit au déficit nécessaire pour obtenir un niveau satisfaisant d’activité. C’est ce que continuent à faire le Japon (déficit public prévu 5 %), les États-Unis (4,4 %) et le Royaume-Uni (3,5 %).
Dans la zone euro, en pleine crise économique (2010 à 2015) tous les pays ont fait sauter la cible du déficit fixée à 3% du PIB. Les pays de la zone euro sauf l’Allemagne (à cause de son manque d’investissement public) ont fait sauter la cible du déficit en pleine crise et ont violé le critère de convergence fixant la cible du déficit à 3%. Ils ont fait sauter le déficit pour soulager leurs ménages et entreprises.
Aujourd’hui au Sénégal si le prix du baril saute et menace la cible du déficit de 3% on le répercute sur les ménages et les entreprises pour les beaux yeux du FMI. Et pourtant quand le prix du baril chute de 75% les ménages et les entreprises ne le sentent pas.
Nos autorités de l’économie préfèrent honorer leurs engagements avec le FMI et déshonorer leurs engagements avec les ménages et les entreprises sénégalaises : soit on est avec le FMI soit on est avec le peuple. Thomas Sankara disait : « Je préfère faire un pas avec le peuple que 100 pas sans le peuple ».
En Afrique nos ministres de l’économie et des finances ont souvent pour objectif d’être des bons élèves du FMI à la défaveur du peuple. Leur objectif est clair : intégrer le FMI à la fin de leur magistère au ministère.
El Hadji Mansour Samb
Economiste et auteur du livre : Les Limites du PSE
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