PRÉSIDENTIELLE 2017 : Le Pds à quitte ou double avec la candidature de Karim

Dans sa lutte pour la libération du fils de l’ancien président de la République, le Parti démocratique sénégalais (Pds) a fait de Karim Wade, le 21 mars dernier, son candidat à la prochaine présidentielle. Cette décision qui constitue un acte fort, à l’endroit de l’État sénégalais, n’est toutefois sans conséquence. Pour cause, le verdict de la Cour suprême qui a débouté le pourvoi en cassation de Karim Wade a confirmé l’arrêt de la Crei condamnant celui-ci à six ans de prison ferme. Aujourd’hui, il ne reste que l’internationalisation de l’affaire pour forcer l’État à libérer le candidat du Pds, voire une hypothétique grâce présidentielle que Karim Wade, lui-même, a refusée. Question à mille balles : le Pds n’est-il pas en train de manier un couteau à double tranchant ? En s’évertuant en effet à proclamer, urbi et orbi, qu’il n’a pas de Plan B et que Karim Wade est et reste son unique candidat, la formation libérale ne risque-t-elle pas de se retrouver sans porte-étendard à la prochaine présidentielle ? Voire de s’enfermer dans une sorte de voie sans issue qui pourrait lui être fortement préjudiciable en 2017.


PRÉSIDENTIELLE 2017 : Le Pds à quitte ou double avec la candidature de Karim

Karim Wade a été désigné, le 21 mars dernier, candidat du Pds pour la prochaine présidentielle, prévue pour 2017 sauf revirement de dernière minute de Macky Sall. C’était à l’issue d’une réunion du bureau politique des Libéraux, transformée par la suite en congrès extraordinaire. Pour bon nombre d’observateurs de la scène politique sénégalaise, cette décision de la direction du Pds relevait d’une stratégie visant à contraindre l’État à libérer l’ancien ministre d’État, emprisonné dans le cadre de la traque des biens supposés mal acquis. Ces derniers se sont notamment fondés sur la proximité de la date du congrès qui a validé la candidature de Karim Wade et du 23 mars, jour retenu par la Crei pour rendre son verdict dans le cadre du procès d’enrichissement illicite opposant l’État du Sénégal à Karim Wade et co-inculpés.

La réunion du bureau politique du Pds, sorte de congrès extraordinaire express, avait d’ailleurs été présidée par Me Abdoulaye Wade, secrétaire général national du parti. Au début des travaux, la commission chargée de la supervision des opérations, indiquant que certaines candidatures ont été rejetées pour n’avoir pas rempli toutes les conditions d’éligibilité, avait annoncé sept candidatures dont la sérénité de projet de candidature suscita moult interrogations. Il s’agissait notamment de Serigne Mbacké Ndiaye, Amadou Kâne Diallo, Habib Sy, Karim Meissa Wade, Mohamadou Mountaga Guèye, Aïda Ndiongue, Amadou Seydi et autre Doudou Dieng. Peu avant le début du vote, certains prétendants comme la femme d’affaires Aïda Ndiongue, Habib Sy et Serigne Mbacké Ndiaye jetaient l’éponge au profit de Wade fils. Désormais seul, contre quatre candidats dont trois expatriés, non seulement absents des lieux mais totalement inconnus des électeurs libéraux, Karim Wade sortait naturellement vainqueur avec 157 voix sur les 168 suffrages valablement exprimés. En prison au moment de ce congrès, sa candidature avait été soutenue par la fédération Pds de Dakar et présentée par le porte-parole du Pds, Babacar Gaye.

Toutefois, chez les libéraux, ce processus qui a conduit à la désignation officielle de Karim Wade comme candidat du parti fut loin de faire l’unanimité. Pis, la convocation du congrès extraordinaire par Me Wade a failli même occasionner l’implosion du parti pourtant comptable de quarante ans d’existence. La première fausse note vint en effet de Me Madické Niang. En effet, annoncé au départ comme candidat à la candidature du Pds, l’ancien ministre d’État, ministre des Affaires étrangères qui avait été pressenti par Me Wade pour diriger la commission chargée de recevoir les candidatures, a annoncé son retrait de la compétition.

Frustrés par cette décision de leur secrétaire général, certains responsables comme le dernier Premier ministre de Me Wade, Souleymane Ndéné Ndiaye, tout en boycottant le congrès, ont claqué la porte du Pds pour créer leur propre parti politique, quelques jours après. A contrario, d’autres responsables comme Aida Mbodj, ancienne ministre libérale, absente lors dudit congrès et Modou Diagne Fada, le patron du Groupe parlementaire libéral qui s’était clairement prononcé contre la tenue de ce congrès, ont décidé de rester dans le Pds et d’y mener la lutte. En effet, quelques jours plus tard, on assistait à une fronde ouverte avec des responsables comme l’ancien ministre libéral de la Jeunesse Mamadou Lamine Keita et des parlementaires comme Fatou Thiam pour réclamer des réformes et la tenue d’un congrès de renouvellement des instances du Pds.

LA CREI INTRANSIGEANTE FACE AU «DIKTAT» DU PDS 

La mobilisation et le semblant de « pression» exercé par le Pds n’y fit rien. La Crei rend son verdict, le 23 mars comme prévu. Karim Wade et coaccusés sont reconnus coupables du délit d’enrichissement illicite. La sentence est lourde. Dans leur arrêt de condamnation, le juge Henry Grégoire Diop et ses assesseurs retiennent une peine de 06 ans de prison ferme assortie d’une amende de 138 milliards de francs CFA. La Crei a également décidé la confiscation de tous les biens de Wade fils. Aussitôt tombée, la sentence alimente un débat autour des droits civiques de Karim Wade. Lors d’une conférence, le Garde des sceaux, ministre de la Justice Me Sidiki Kaba indique que Karim Wade garde ses droits civiques malgré sa condamnation à plus de cinq ans de prison. Cette sortie du ministre allait à l’encontre des avis de plusieurs juristes interrogés sur la question. S’appuyant sur le Code pénal sénégalais, la plupart de ces juristes estimaient que Karim Wade, puisque condamné au-delà de cinq ans, perdait automatiquement ses droits civiques. 

Toutefois, nonobstant cette décision de la Crei, le Pds réaffirma urbi et orbi qu’il n’a pas de plan B et que Karim Wade est et reste son candidat pour le prochaine présidentielle. Sur le terrain juridique, ses avocats, loin d’être découragés par cette condamnation, annoncent un pourvoi en cassation. Sur le plan politique, sous la conduite de Me Wade lui-même, le Pds engage une série de manifestations à la place de l’Obélisque dont la plupart ne furent pas autorisées. Il a donc fallu attendre le départ de Me Wade vers la France pour voir la situation politique se calmer un peu. Cependant, avant de s’envoler vers l’Hexagone, le 02 juin dernier, l’ancien président de la République avait tenu à apporter quelques réaménagements sans importance à la tête de son parti. Histoire de couper court à l’activisme du groupe de frondeurs, dirigé par le président du Groupe parlementaire des libéraux Modou Diagne Fada.

LA COUR SUPREME INVALIDE LE CANDIDAT KARIM

La défense de Karim Wade transfère alors l’affaire devant la Cour suprême. Le 06 aout dernier, la cour suprême qui statuait sur les sept recours déposés aux fins d’annulation de l’arrêt rendu le 23 mars dernier par la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei) contre Karim Wade et compagnie, décida de mettre en délibéré l’affaire au 20 août. A la date retenue, la juridiction rend sa décision en défaveur de Karim Wade. Dans son verdict, la plus haute juridiction rejette en effet tous les pourvois formulés par la défense et confirme ainsi l’arrêt de la Crei du 23 mars dernier. Cette décision met fin, une bonne fois pour toutes, à la bataille juridique devant les tribunaux nationaux engagée depuis le début de cette affaire par les avocats de la défense. La seule option qui reste à Karim Wade, au plan national, pour être dans la course à la présidentielle de 2017 comme candidat du Pds, reste la grâce présidentielle même s’il a clairement dit qu’il ne va jamais demander au chef de l’État sa clémence. Plus que jamais agrippé à sa ferme position de maintenir Karim Wade comme son unique candidat, le Pds annonce la poursuite du combat pour sa libération sur le terrain politique pendant que les avocats de la défense projette d’internationaliser la bataille juridique. 

Au regard du dernier développement de cette affaire avec la décision de la Cour suprême, force est toutefois de reconnaître que ce combat pour faire de Karim Wade le porte-flambeau du Pds, lors de la prochaine présidentielle, semble être une bataille perdue d’avance. Et cela, malgré le quitus de Sidiki Kaba, ministre de la Justice, certifiant que Karim Wade bénéficiait encore de ses droits civiques. Après 41 ans d’existence, le Pds devenu parti d’opposition tend tout droit vers des lendemains encore plus incertains. A défaut de voir en effet son candidat sortir de prison avant la présidentielle qui se profile, et sans Plan B, la formation libérale ne risque-t-il pas d’être confrontée à une floraison de candidats alternatifs, internes au Pds avec le groupe des frondeurs et autres frustrés qui avancent, tapis dans l’ombre ?  Pour beaucoup d’observateurs d’ailleurs, le spectre d’une implosion avec cette obstination du Pds autour du candidat Karim menace ouvertement le parti de Me Wade, à l’approche d’échéances électorales où tout est dans l’ordre du possible.


Sud Quotidien
 

Mercredi 26 Août 2015
Dakar actu




1.Posté par Jules le 26/08/2015 15:30
Deux procédures distinctes coexistent selon la forme de grâce adoptée. Si la mesure est collective, elle part du Président de la République.
Lorsqu’elle est individuelle, elle est provoquée par toute personne qui y a intérêt et qui forme alors un recours en grâce. Les grâces collectives ne nécessitent pas de recours de la part des intéressés. Cette forme est accordée d’office par le Président de la République à l’occasion des fêtes nationales comme celle de l’Indépendance et à l’entrée en fonction d’un nouveau Chef de l’Exécutif. Cet acte unilatéral abrège les lenteurs de procédure. Il permet aussi au Président de la République d’accorder collectivement par décret en l’absence de requête individuelle, des remises de peines pour limiter la surpopulation carcérale. Dans ce cas la grâce est octroyée aux condamnés qui remplissent les conditions précisées par le décret de grâce.
En France la procédure de grâce collective a été supprimée pour n’avoir pas été pour la première fois utilisée par le Président SARKOZY en juillet 2008. Par contre pour bénéficier d’une grâce individuelle, il faut un recours en grâce adressée au Président de la République par voie hiérarchique. Le recours suspend le recouvrement des amendes si l’autorité le demande. Cette requête est instruite par le parquet et étudiée par la Direction des Affaires criminelles et des grâces du Ministère de la Justice. Les avis de certaines autorités judiciaires et de l’Administration pénitentiaire peuvent être sollicités. Mais c’est le Président de la République qui accorde ou non la grâce.
Si le recours concerne l’exécution d’une peine le dossier devra être transmis au Conseil supérieur de la Magistrature. Le conseil émet un avis qui ne lie pas le Président de la République. Accordée, le condamné ne peut la refuser, elle a un caractère obligatoire. Elle fait l’objet d’un décret lequel est notifié à l’intéressé par le Procureur de la République du lieu de l’incarcération. Le recours en grâce peut être formé par plusieurs personnes qui ont un intérêt matériel ou moral. Il peut s’agir du condamné, de sa famille, de son Avocat ou de son ami.
Aucun recours n’est possible contre la décision du Président de la République devant les juridictions administratives. Il peut en outre être introduit sur proposition du Juge de l’Application des Peines (JAP) ou du chef de l’établissement pénitentiaire après avis de la Commission de l’application des peines (CAP). Si le recours est rejeté, le requérant peut en former de nouveau. Pour appuyer sa requête, il peut invoquer tout élément de fait comme un état de mauvaise santé ou de bonne conduite carcérale.



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