Un conseil d’administration doit se tenir lundi 26 octobre alors que certains s’interrogent sur la succession de Pierre Berger
La mort brutale du PDG d’Eiffage a plongé le troisième groupe français de BTP (derrière Vinci et Bouygues) dans la stupeur. Le décès de Pierre Berger, victime d’une crise cardiaque à l’âge de 47 ans, a été annoncé vendredi 23 octobre. Il avait succédé au fondateur de l’entreprise, Jean-François Roverato, en 2012.
Pierre Berger avait obtenu son baccalauréat à 15 ans. Il était polytechnicien et diplômé de l’école des Ponts et Chaussées. Père de 3 enfants, Pierre Berger a suivi un parcours inhabituel dans le monde du BTP, en refusant de devenir fonctionnaire au terme de ses études, préférant créer sa propre entreprise.
Après notamment une carrière chez Vinci, il rejoint Eiffage en 2010 et, arrivé à la tête du groupe, il s’emploie à redresser les marges, refinancer les concessions des Autoroutes Paris-Rhin-Rhône et remettre le cap sur l’international, notamment en Afrique et au Moyen-Orient.
« UN DE NOS FLEURONS »
Les réactions ont été nombreuses. « Il était à la tête de l’un de nos fleurons qui participe du rayonnement du génie français, » a indiqué dans un communiqué le président du Medef Pierre Gattaz selon lequel Pierre Berger avait su « poursuivre avec vision la croissance du groupe et renforcer sa dynamique de conquête des marchés internationaux ».
La ministre du logement Sylvia Pinel a rappelé que le patron d’Eiffage avait « engagé des réalisations majeures tant en matière de logements, bureaux et commerces, que sur le plan des infrastructures et de l’aménagement des territoires ». De son côté, Philippe Luppo, coordinateur CFDT à Eiffage, a parlé d’un homme « qui ne manquait pas de charisme ». Le ministre de l’économie Emmanuel Macron a lui aussi évoqué un « dirigeant charismatique qui a poursuivi le développement du groupe Eiffage ».
La CGT, par la voix de Jean-Claude Saillard, de la branche Énergie du groupe, s’est montrée moins élogieuse, rappelant la restructuration de la branche « métal » avec la suppression de 239 postes et la fermeture de deux usines dans l’Est de la France, et reprochant des manques dans le dialogue social régnant à Eiffage.
HÉRITIER DE LA TOUR EIFFEL
Eiffage est constitué de la fusion progressive de plusieurs groupes français. Le nom est apparu en 1993 quand Fougerolle, une entreprise fondée en 1844, a absorbé la SAE, société née en 1924 qui a notamment percé le tunnel sous la Manche.
Le groupe abrite aussi la société Eiffel Constructions métalliques, descendante des ateliers de l’ingénieur Gustave Eiffel à qui l’on doit la fameuse tour ou encore le Grand Palais à Paris Parmi les réalisations les plus célèbres d’Eiffage et de ses prédécesseurs, on peut citer le pont de Tancarville en 1955, l’opéra de Sydney en 1972 ou encore le palais Omnisports de Paris-Bercy en 1984, la Pyramide du Louvre en 1989, ou encore le viaduc de Millau en 2004…
Eiffage participe à plusieurs concessions et partenariats public privé sur de grands ouvrages d’infrastructures, comme actuellement sur la ligne à grande vitesse Bretagne-Pays de la Loire, le prolongement de la ligne de métro 14 à Paris, la modernisation du port de Lomé au Togo ou l’écluse d’Anvers en Belgique.
UN QUART DU CAPITAL AUX SALARIÉS
En 2014, le groupe, qui emploie 66 000 collaborateurs, a réalisé un chiffre d’affaires de 14 milliards d’euros, en baisse, entre autres, à cause de la contraction des travaux routiers en France. Il a dégagé cependant un bénéfice en légère hausse, à 275 millions d’euros. Fin août le groupe a annoncé un bénéfice net en hausse de 14,5 % au premier semestre, à 79 millions d’euros, et confirmé ses objectifs pour 2015 d’une « nouvelle progression » du résultat net.
Côté à la Bourse de Paris, Eiffage y est valorisé à 5,4 milliards d’euros, une valeur qui a plus que doublé depuis 1992. Le capital est détenu à hauteur de 24,3 % par ses salariés tandis que l’État, via Bpifrance, est le deuxième actionnaire depuis 2006 avec environ 14 % des parts.
L’INCERTITUDE DE LA SUCCESSION
Eiffage doit maintenant se trouver un nouveau dirigeant alors que plusieurs observateurs s’inquiètent d’une absence de successeur putatif. Certains évoquent un retour, même temporaire, de Jean-François Roverato, à la direction d’Eiffage, comme Total avait rappelé son ancien président Thierry Desmarest après l’accident mortel de Christophe de Margerie en avion.
« Le groupe sera bien plus facile à diriger que dans la situation dans laquelle (Pierre berger) l’a trouvé, le souci c’est qu’il cumulait les fonctions de président et de directeur général, ce qui est toujours délicat », analyse cependant un expert selon lequel « il y aura certainement des candidats en interne peut-être pour assurer la transition avant de chercher à l’extérieur par la suite ».
Un conseil d’administration doit se tenir lundi 26 octobre.
LA CROIX (avec AFP)
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