Améliorations nécessaires du programme DIOMAYE Par Dr. Abdourahmane Ba,


Le programme DIOMAYE, envisagé comme une odyssée de transformation socio-économique du Sénégal, se déploie autour d'une stratégie ambitieuse ciblant une refonte institutionnelle et judiciaire, une révolution agricole vers l'autarcie alimentaire, et une élévation substantielle du capital humain par le biais de réformes éducatives et sanitaires. Cette vision, bien que louable dans ses ambitions, requiert une évaluation rigoureuse et pragmatique des vecteurs de financement, des mécanismes de mise en œuvre, et de la viabilité économique à long terme, en particulier dans un contexte marqué par des contraintes budgétaires et une fluctuation des indices macroéconomiques.

La transmutation institutionnelle et la consolidation de l'état de droit, pierres angulaires du programme, ambitionnent de catalyser un environnement propice aux investissements et à l'essor économique. Cependant, l'implémentation de telles réformes exige une approche résolue pour surmonter les réticences structurelles et favoriser une synergie entre les divers organes gouvernementaux. Le succès de cette entreprise réside dans la capacité à instaurer une culture de transparence et d'efficacité, fondamentale pour rassurer les investisseurs et stimuler l'activité économique.

En ce qui concerne le développement agricole, le programme vise à éradiquer l'insécurité alimentaire et à dynamiser le tissu économique rural par l'innovation et la modernisation des pratiques agricoles. Toutefois, le passage de l'agriculture traditionnelle à une agriculture plus productive et durable nécessite des investissements considérables en recherche et développement, ainsi qu'une amélioration des infrastructures de stockage et de distribution, pour augmenter le rendement et réduire les pertes post-récolte. Cette transformation implique également une formation accrue des agriculteurs aux méthodes agroécologiques et aux technologies de pointe, condition sine qua non pour une agriculture compétitive sur le marché global.

L'allocation de ressources significatives aux secteurs de l'éducation et de la santé témoigne d'une volonté de forger un capital humain qualifié, pivot d'une économie moderne et diversifiée. Néanmoins, l'alignement de ces investissements sur les besoins du marché du travail et l'adéquation avec les secteurs porteurs de croissance constituent des enjeux cruciaux. Il est impératif d'orchestrer une refonte des curricula éducatifs et de rehausser la qualité des soins de santé pour garantir que ces secteurs contribuent effectivement au développement socio-économique du pays.

La question épineuse du financement des ambitions du programme DIOMAYE interpelle, face à l'opacité des sources de financement envisagées. Bien que l'augmentation des recettes de l'État esquisse une marge de manœuvre, les pressions inflationnistes et les contraintes budgétaires accrues exigent une exploration méticuleuse de mécanismes de financement novateurs. La mobilisation de capitaux à travers des instruments financiers alternatifs, tels que les obligations souveraines vertes ou les partenariats public-privé, pourrait offrir des avenues prometteuses pour le financement de projets structurants, à condition de maintenir une discipline budgétaire rigoureuse.

Les défis liés à la volatilité des prix des matières premières et à l'inflation, qui menacent la stabilité macroéconomique, requièrent une vigilance constante et une capacité d'adaptation des politiques économiques. Ces aléas, exacerbés par une conjoncture économique mondiale incertaine, soulignent l'importance d'une stratégie économique proactive pour préserver l'équilibre budgétaire et assurer une croissance économique durable.

La contraction de la masse monétaire et la raréfaction des liquidités posent un dilemme quant à la capacité de financer efficacement le programme sans induire des pressions inflationnistes additionnelles. L'innovation financière et la diversification des sources de financement se présentent comme des impératifs pour contourner ces contraintes, nécessitant une gouvernance financière exemplaire pour mitiger les risques et assurer la soutenabilité du programme.

Face aux obstacles bureaucratiques et aux déficits capacitaires des institutions, une réforme administrative s'impose pour fluidifier les procédures et renforcer l'efficacité opérationnelle des services publics. Cette démarche, essentielle pour accélérer l'implémentation des projets, exige une approche holistique visant à décloisonner les services et à promouvoir une culture de la performance au sein de l'administration.

La réforme monétaire projetée, avec l'introduction d'une nouvelle devise, évoque des risques significatifs pour la stabilité financière du pays. Cette entreprise audacieuse doit s'appuyer sur une analyse approfondie des impacts potentiels et être accompagnée d'une stratégie de communication claire pour naviguer cette transition avec prudence, tout en préservant la confiance des acteurs économiques et la cohésion au sein de l'espace monétaire régional.

Enfin, l'absence d'un plan détaillé pour catalyser l'innovation et favoriser le développement industriel suscite des préoccupations quant à la capacité du programme à engendrer une diversification économique pérenne. La conception de politiques incitatives pour l'innovation, le renforcement des écosystèmes entrepreneuriaux, et la facilitation de l'accès aux financements pour les start-ups et les PME innovantes constituent des leviers essentiels pour insuffler une dynamique de croissance durable et résiliente.

En synthèse, le programme DIOMAYE incarne une ambition réformatrice pour le Sénégal, mais son succès repose sur une orchestration minutieuse des politiques économiques, une gestion financière judicieuse, et une implémentation stratégique. La transition vers un développement socio-économique équilibré et inclusif exige une alchimie délicate entre réformes audacieuses, investissements ciblés, et innovation, sous-tendue par une rigueur analytique et une flexibilité opérationnelle face aux contingences économiques et aux évolutions du marché global.

Dr. Abdourahmane Ba,

Expert international en évaluation des politiques publiques

Kaolack, Sénégal

 
Jeudi 4 Avril 2024
Dakaractu




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