En 2014, le gouvernement du Sénégal a lancé le Programme d’accélération de la cadence de l’agriculture sénégalaise (Pracas). L’un des composants phares et prioritaires de ce programme est le Programme National d’Autosuffisance en Riz (PNAR) dont l’objectif est d’assurer la production de 1 600 000 de tonnes de riz paddy, soit environ 1 080 000 de tonnes de riz blanc, à l’horizon 2017. Hélas! Force est de constater que l’objectif n’a pas été atteint à l’échéance. Cet échec a été diversement interprété par les politiques.
Il est important de rappeler ici que le Sénégal importait 902 526 tonnes de riz blanc en 2013 pour combler le gap entre la production et la consommation (ANSD). Cela posait deux problèmes fondamentaux : i) la forte dépendance de notre consommation de riz vis-à-vis de l’extérieur et la flambée de ses prix rendent le pays vulnérable ; ii) le déficit de la balance commerciale se creuse ; la part des importations tournait autour de 200 milliards FCFA en 2013 et représentait ainsi 6,4% des importations du Sénégal (ANSD). La justification première de la mise en place du PNAR semblerait être la lutte contre ces obstacles.
L’autosuffisance en riz consiste pour le Sénégal à produire toute la quantité de riz dont il a besoin pour sa consommation sans faire recours au commerce international. Pour atteindre cet objectif, il est nécessaire de jouer à la fois sur deux leviers. Le premier est d’augmenter la production du riz ; le second est d’encourager la diminution de la consommation du riz en diversifiant la base alimentaire du pays.
Cependant, dans la mise en œuvre, l’accent est beaucoup mis sur le premier levier, notamment la production. L’Etat a massivement investi dans ce programme en augmentant les surfaces emblavées et les équipements agricoles mis à la disposition des riziculteurs. Cette approche productiviste parait limitée. En effet, dans ce cas de figure, le principal indicateur avancé généralement par l’Etat est la quantité de production annuelle et non la quantité de riz importée. Or, la quantité de l’importation du riz est plus concrète et vérifiable comme indicateur. Par exemple, les importations de riz passent de 918 000 tonnes à 851 000 tonnes entre 2013 et 2016. Sur la même période, la production rizicole passe de 436 153 tonnes à 950 779 tonnes (Gouvernement). Il y a un paradoxe car l’accroissement de la production n’a pas impacté significativement la baisse des importations. Cela peut être justifié par trois facteurs :
• la consommation de riz au Sénégal a augmenté significativement durant cette période. Dans ce cas les «brillants esprits» du ministère de l’agriculture auraient été trompés dans ses prévisions de la demande de riz. Ce qui serait insupportable et impardonnable vu le budget qui a été consacré à ce programme (environ 424,7 milliards de FCFA et représente 73% du budget du PRACAS) ;
• le riz produit localement a rencontré un problème d’écoulement. Dans ce cas, il y aurait une défaillance dans la coordination du mécanisme de régulation de l’offre et de la demande ;
• Les statistiques avancées sur la production de riz sont fausses et largement surévaluées ;
Le troisième facteur me semble être le plus proche de la réalité. C’est toute l’utilité de revoir les statistiques agricoles du Sénégal qui sont généralement très contestées par les acteurs du secteur agricole. C’est pourquoi, il est nécessaire de confier à l’Agence Nationale de Statistique et de la Démographique (ANSD) la collecte des données agricoles. Sinon, il faudrait une bonne coordination du système des statistiques du Sénégal. Cela donnerait plus de crédibilité et de fiabilité à nos statistiques agricoles. De plus, il faudrait harmoniser les indicateurs de production du riz. En effet, à la place du riz paddy, le riz blanc doit être considéré comme le seul indicateur de production. Cela permettrait de faciliter la compréhension des uns et des autres sur le niveau réel de production.
Cependant, au-delà des politiques, il faudrait mettre l’accent sur les actions publiques. Un concept politique ne vaut que ce que valent ceux qui sont chargés de la mise en œuvre. A l’instar des précédentes politiques agricoles, le document du PRACAS en lui-même semble être excellent mais c’est toujours dans la mise en œuvre qu’on constate les imperfections. Pour cette raison, il n’est pas étonnant de remarquer, depuis 1958, que les objectifs principaux des politiques agricoles au Sénégal restent toujours les mêmes à savoir l’accroissement de la production et la diversification des cultures.
La production de riz au Sénégal a enregistré incontestablement des résultats intéressants ces dernières années. Néanmoins, il est nécessaire d’améliorer la stratégie de mis en œuvre et de coordination des programmes agricoles pour assurer sa cohérence et son efficacité.
Youssou N’DAO, Agroéconomiste
Il est important de rappeler ici que le Sénégal importait 902 526 tonnes de riz blanc en 2013 pour combler le gap entre la production et la consommation (ANSD). Cela posait deux problèmes fondamentaux : i) la forte dépendance de notre consommation de riz vis-à-vis de l’extérieur et la flambée de ses prix rendent le pays vulnérable ; ii) le déficit de la balance commerciale se creuse ; la part des importations tournait autour de 200 milliards FCFA en 2013 et représentait ainsi 6,4% des importations du Sénégal (ANSD). La justification première de la mise en place du PNAR semblerait être la lutte contre ces obstacles.
L’autosuffisance en riz consiste pour le Sénégal à produire toute la quantité de riz dont il a besoin pour sa consommation sans faire recours au commerce international. Pour atteindre cet objectif, il est nécessaire de jouer à la fois sur deux leviers. Le premier est d’augmenter la production du riz ; le second est d’encourager la diminution de la consommation du riz en diversifiant la base alimentaire du pays.
Cependant, dans la mise en œuvre, l’accent est beaucoup mis sur le premier levier, notamment la production. L’Etat a massivement investi dans ce programme en augmentant les surfaces emblavées et les équipements agricoles mis à la disposition des riziculteurs. Cette approche productiviste parait limitée. En effet, dans ce cas de figure, le principal indicateur avancé généralement par l’Etat est la quantité de production annuelle et non la quantité de riz importée. Or, la quantité de l’importation du riz est plus concrète et vérifiable comme indicateur. Par exemple, les importations de riz passent de 918 000 tonnes à 851 000 tonnes entre 2013 et 2016. Sur la même période, la production rizicole passe de 436 153 tonnes à 950 779 tonnes (Gouvernement). Il y a un paradoxe car l’accroissement de la production n’a pas impacté significativement la baisse des importations. Cela peut être justifié par trois facteurs :
• la consommation de riz au Sénégal a augmenté significativement durant cette période. Dans ce cas les «brillants esprits» du ministère de l’agriculture auraient été trompés dans ses prévisions de la demande de riz. Ce qui serait insupportable et impardonnable vu le budget qui a été consacré à ce programme (environ 424,7 milliards de FCFA et représente 73% du budget du PRACAS) ;
• le riz produit localement a rencontré un problème d’écoulement. Dans ce cas, il y aurait une défaillance dans la coordination du mécanisme de régulation de l’offre et de la demande ;
• Les statistiques avancées sur la production de riz sont fausses et largement surévaluées ;
Le troisième facteur me semble être le plus proche de la réalité. C’est toute l’utilité de revoir les statistiques agricoles du Sénégal qui sont généralement très contestées par les acteurs du secteur agricole. C’est pourquoi, il est nécessaire de confier à l’Agence Nationale de Statistique et de la Démographique (ANSD) la collecte des données agricoles. Sinon, il faudrait une bonne coordination du système des statistiques du Sénégal. Cela donnerait plus de crédibilité et de fiabilité à nos statistiques agricoles. De plus, il faudrait harmoniser les indicateurs de production du riz. En effet, à la place du riz paddy, le riz blanc doit être considéré comme le seul indicateur de production. Cela permettrait de faciliter la compréhension des uns et des autres sur le niveau réel de production.
Cependant, au-delà des politiques, il faudrait mettre l’accent sur les actions publiques. Un concept politique ne vaut que ce que valent ceux qui sont chargés de la mise en œuvre. A l’instar des précédentes politiques agricoles, le document du PRACAS en lui-même semble être excellent mais c’est toujours dans la mise en œuvre qu’on constate les imperfections. Pour cette raison, il n’est pas étonnant de remarquer, depuis 1958, que les objectifs principaux des politiques agricoles au Sénégal restent toujours les mêmes à savoir l’accroissement de la production et la diversification des cultures.
La production de riz au Sénégal a enregistré incontestablement des résultats intéressants ces dernières années. Néanmoins, il est nécessaire d’améliorer la stratégie de mis en œuvre et de coordination des programmes agricoles pour assurer sa cohérence et son efficacité.
Youssou N’DAO, Agroéconomiste
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