Après un prologue « grande frayeur », le premier acte de l’élection présidentielle sénégalaise s’est déroulé, dans le calme, le dimanche 26 février dernier. Bilan du scrutin : en route vers un second tour, entre Abdoulaye Wade (34,8%), président sortant, et Macky Sall (26,5%), son ex-premier ministre. Pur produit de l’école du chef de l’Etat en exercice, Sall défie son ex-mentor, après avoir assumé plusieurs hautes responsabilités sous son magistère. Les deux hommes se connaissent, donc, très bien.
Gagnant incontesté de l’exercice : le peuple sénégalais. Un grand peuple, citoyennement mature. A l’opposé, donc, de l’affligeant infantilisme de sa classe politique, dont l’icône historique n’a pas hésité à ruser et instrumentaliser le juge électoral, pour le passage en force d’une candidature anticonstitutionnelle. La bataille sur l’opportunité juridique et politique d’un troisième mandat aura fait oublier l’essentiel : le débat sur les programmes. Dommage. Mais tout n’est pas perdu.
Les deux candidats en lice et leur coalition respective – FAL 2012, pour Wade, et MACKY 2012, pour son challenger – vont-ils, enfin, s’affronter sur le fond ? Pour l’instant, on en est, encore, aux grandes manœuvres politiciennes : nouvelles alliances et occupation de la scène médiatique. A ce petit jeu, l’élève semble avoir pris une certaine avance sur le vieux maître. Si le même électorat devait voter, seul, le 18 (ou 25) mars prochain, et suivait les consignes des battus du premier tour, Sall serait élu haut la main.
Mais il y a les abstentionnistes. 48,3%. Ce n’est pas peu et largement de quoi inverser la tendance, clament les partisans du président Wade, d’un ballotage « peu favorable » – un sacré euphémisme, au demeurant, compte-tenu des ralliements tous azimuts à son challenger. Qui ne manque pas de revendiquer, lui aussi, sa part du vivier en sommeil, démobilisé, dit-il, par les rumeurs de fraude électronique et le spectre du vide politique brandi par le président en exercice. Si l’on s’en tenait à ces considérations, on en resterait, donc, au rase-mottes ordinaire du strict minimum démocratique.
Cependant, il y a plus glauque, avec le début d’une querelle nauséabonde, sur le vote identitaire dont aurait bénéficié, au premier tour, le challenger, aux dires de quelques (ir)responsables – heureusement pas tous – d'un camp manifestement au bord du naufrage. Mais les Sénégalais sont mûrs et largement au-dessus du poison ethnico-identitaire, à la différence de tant d’africains qui ont plombé l’avenir de leur pays, en jouant aux apprentis-sorciers.
Et il y a, évidemment, beaucoup plus lumineux, avec la velléité affichée des deux protagonistes de débattre de leur programme respectif. Lequel des deux offrira-t-il les meilleures opportunités d’avenir ? C’est sur ces bases que le Sénégal devrait choisir, en définitive, son président. On le lui souhaite, de tout cœur, en frère et voisin de longue date.
Amadou Seck
Le Calame No 823 du mardi 6 mars 2012
Gagnant incontesté de l’exercice : le peuple sénégalais. Un grand peuple, citoyennement mature. A l’opposé, donc, de l’affligeant infantilisme de sa classe politique, dont l’icône historique n’a pas hésité à ruser et instrumentaliser le juge électoral, pour le passage en force d’une candidature anticonstitutionnelle. La bataille sur l’opportunité juridique et politique d’un troisième mandat aura fait oublier l’essentiel : le débat sur les programmes. Dommage. Mais tout n’est pas perdu.
Les deux candidats en lice et leur coalition respective – FAL 2012, pour Wade, et MACKY 2012, pour son challenger – vont-ils, enfin, s’affronter sur le fond ? Pour l’instant, on en est, encore, aux grandes manœuvres politiciennes : nouvelles alliances et occupation de la scène médiatique. A ce petit jeu, l’élève semble avoir pris une certaine avance sur le vieux maître. Si le même électorat devait voter, seul, le 18 (ou 25) mars prochain, et suivait les consignes des battus du premier tour, Sall serait élu haut la main.
Mais il y a les abstentionnistes. 48,3%. Ce n’est pas peu et largement de quoi inverser la tendance, clament les partisans du président Wade, d’un ballotage « peu favorable » – un sacré euphémisme, au demeurant, compte-tenu des ralliements tous azimuts à son challenger. Qui ne manque pas de revendiquer, lui aussi, sa part du vivier en sommeil, démobilisé, dit-il, par les rumeurs de fraude électronique et le spectre du vide politique brandi par le président en exercice. Si l’on s’en tenait à ces considérations, on en resterait, donc, au rase-mottes ordinaire du strict minimum démocratique.
Cependant, il y a plus glauque, avec le début d’une querelle nauséabonde, sur le vote identitaire dont aurait bénéficié, au premier tour, le challenger, aux dires de quelques (ir)responsables – heureusement pas tous – d'un camp manifestement au bord du naufrage. Mais les Sénégalais sont mûrs et largement au-dessus du poison ethnico-identitaire, à la différence de tant d’africains qui ont plombé l’avenir de leur pays, en jouant aux apprentis-sorciers.
Et il y a, évidemment, beaucoup plus lumineux, avec la velléité affichée des deux protagonistes de débattre de leur programme respectif. Lequel des deux offrira-t-il les meilleures opportunités d’avenir ? C’est sur ces bases que le Sénégal devrait choisir, en définitive, son président. On le lui souhaite, de tout cœur, en frère et voisin de longue date.
Amadou Seck
Le Calame No 823 du mardi 6 mars 2012
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