L'Aménagement du Territoire : un outil pour la résolution de la crise casamançaise


L'Aménagement du Territoire : un outil pour la résolution de la crise casamançaise
Depuis environ 35 ans la Casamance est secouée par un conflit qui a fait des centaines de victimes et plombé l’économie de toute une région aux potentialités énormes. Appartenant à la zone sud du Sénégal, la Casamance est caractérisée par une bonne pluviométrie, des terres fertiles, des ressources forestières particulièrement abondantes. Une situation contraire à la partie nord du pays très soumis aux incertitudes climatiques du Sahel, où la dégradation des ressources naturelles est très prononcée. Ces caractéristiques géographiques différentes entre le Nord et le Sud du Sénégal sont marquées par une discontinuité territoriale, avec notamment l’enclave de la Gambie. L’absence de continuité territoriale, aux impacts énormes en termes de mobilité et d’échanges, constitue un handicap qu’il faut lever par un bon aménagement du territoire.
Au-delà des potentialités hydro-agricoles et forestières immenses, la position géographique de la Casamance est une belle ouverture vers les pays limitrophes que sont la Gambie, la Guinée Bissau et la République de Guinée. Les principales villes que sont Kolda et Ziguinchor disposent d’atouts énormes pour devenir des pôles d’échanges sous régionaux. 
Le potentiel touristique est également un pilier économique de la zone, mais son exploitation ne serait porteuse de croissance profitable aux populations que si les conditions politiques et infrastructurelles nécessaires sont mises en place par l’Etat du Sénégal. Bref, il faudra plus de courage en matière d’aménagement du territoire. Exploiter les potentialités et améliorer les performances de la zone seraient un excellent levier pour résoudre le conflit casamançais. Selon Roger Brunet cité par Ciattoni et Veyret (2007), « aménager le territoire vise d’abord à en améliorer la performance » dans le but de réduire les disparités spatiales, de satisfaire les besoins des populations quel que soit le lieu de résidence. Il faut réduire les disparités et mieux connecter les territoires. La position géographique et le contexte imposent des dispositions politiques concrètes et spéciales en Casamance. Des équipements et infrastructures structurants sont nécessaires pour faire face aux aléas de la discontinuité territoriale afin de mieux répondre aux besoins des populations vivant en Casamance. 
Certes, l’Etat du Sénégal a consenti d’énormes investissements dans le cadre de l’Agence nationale pour la Relance des Activités économiques et sociales en Casamance (ANRAC), du Programme d’Urgence de Développement communautaire (PUDC), du Projet Pôle de Développement de la Casamance (PPDC) (zone test phase 2 Acte III), du  Programme d'Urgence de Modernisation des Axes et Territoires frontaliers (PUMA) lancé en 2017, mais il faut repenser et renforcer ces efforts à l’endroit de la zone Sud. 
La construction d’un pont sur le fleuve Gambie, et les bateaux ne suffiront pas. Il faut connecter la Casamance au reste du Sénégal par une voie de contournement de la Gambie, qui à partir de Koungheul sur la Route nationale 1 rejoint Kolda. Cette option aura également l’avantage de créer de nouveaux territoires, mais de relancer aussi les économies au niveau des villes de Koungheul et Kolda. 
Par ailleurs, il faudra davantage d’infrastructures et d’équipements structurants de pointe à Ziguinchor et à Kolda, pour faire de ces villes de véritables pôles de développement. Les potentialités agricoles et touristiques doivent être mieux valorisées et intégrées dans une économie locale solide, afin de faire de la Casamance un bassin d’emplois.
La ville de Ziguinchor, située à environ 140 Km de Bissau et à 150 Km de Banjul, a une excellente position géographique à exploiter dans la cadre de l’intégration sous-régionale. L’Etat doit davantage investir dans cette ville pour que les populations n’aient plus besoin de se rendre à Dakar pour un quelque service.  Ceci permettra de créer une justice spatiale, un mieux-être gage d’une stabilité socio-politique.
L’aménagement du territoire est un outil au service du développement territorial. Il est une action publique volontaire (Ciattoni, Veyret, 2007) qu’il faut mettre en branle en Casamance, avec courage et vision globale, pour réduire les déséquilibres et créer un mieux-être, par conséquent dissiper toute velléité fractionniste.    


Momath Talla NDAO
Kaffrine
Lundi 5 Février 2018




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