Notre pays s’achemine vers une semaine décisive dans sa marche politique. Par ces temps de tension politique où chaque acteur de l’espace public (politiciens, journalistes, musiciens, société civile) prétend parler au nom du peuple (askan wee nu ñor, entend-on répéter à l’envi), le citoyen lambda doit se réapproprier sa parole, trop longtemps usurpée par des « voix du peuple » autoproclamées. Il doit se faire entendre sur une question qui suscite autant de passions politiques que le parrainage. A l’heure où les politiciens exigent un consensus autour du processus électoral, sans nous dire comment y parvenir s’ils persistent dans leur refus de dialoguer, il appartient à la grande masse silencieuse de Sénégalais de se prononcer. Certains le font déjà, et le font bien, y compris sur Dakaractu. Les pourfendeurs du parrainage évoquent, comme principal motif, la volonté inavouée du pouvoir d’éliminer des concurrents, autrement dit de se choisir ses adversaires par sélection au niveau du Conseil constitutionnel, soupçonné à tort ou à raison d’être aux ordres de l’Exécutif. A lire entre les lignes de leurs différents arguments, cette partialité présumée du juge constitutionnel pose, de façon diffuse, davantage la question du mécanisme de collecte et de validation des signatures et d’acceptation des candidatures que celle du principe-même du parrainage : comment mettre en place un mécanisme de collecte et de validation inviolable ? Voilà à quoi la présentation contribution tente de répondre. Il appartient aux lecteurs/électeurs d’en apprécier la pertinence (ou non) et d’approfondir la réflexion sur le mécanisme, y compris par des contre-propositions. Ouvrons le dialogue et prononçons-nous sur le sujet, si nous voulons nous réapproprier notre parole si longtemps usurpée. A l’ère des TIC, rien ne nous empêche de dématérialiser le mécanisme de collecte et de validation des signatures. Il s’agit, pour les acteurs des élections (politiciens, administration, juges, société civile, observateurs, personnalités neutres, informaticiens, etc.) d’en définir ensemble les règles et de veiller à leur application. En quelques points, il pourrait s’agir de : 1. Définir et distribuer un canevas de collecte commun à tous les candidats. Par exemple, un fichier Excel avec des champs prédéfinis : numéro d’ordre (1 à 65000 ou 70000), prénoms et nom de l’électeur, numéro de carte d’électeur, département et un espace pour insérer la carte d’électeur photographiée ou scannée qui fera office de signature et confirmera que l’électeur a bel et bien reçu et parrainé le candidat, qui ne s’est pas contenté de copier des noms à partir du fichier électronique remis par la DAF lors des dernières législatives ; 2. Doter chaque candidat d’un appareil électronique permettant d’enregistrer ses parrainages et de photographier ou scanner la carte d’électeur de chaque parrain ; 3. Créer un algorithme permettant à chaque candidat de vérifier sur-le-champ que chaque parrainage obtenu est valide. Ainsi, une fois connecté à Internet et au site Web de la DAF, cet algorithme doit pouvoir confronter automatiquement les données de l’électeur avec celles du fichier national et les valider si le parrain n’a pas déjà « signé » pour un autre candidat ; 4. Désactiver (temporairement et pour une durée à définir), au moyen du même algorithme, chaque parrain qui aura signé pour un candidat afin d’éviter les signatures multiples et les rejets qui risquent de s’ensuivre au niveau du Conseil constitutionnel. Cela contribuera aussi à prévenir la vente/l’achat de signatures ; 5. Lier, toujours à l’aide de l’algorithme, la signature de chaque parrain à un code préalablement attribué à chaque candidat. Ainsi, en cas d’invalidation d’un parrain par l’algorithme, il sera possible de vérifier sur-le-champ quel candidat il a déjà parrainé. S’il nie l’avoir parrainé, il sera possible d’introduire une requête. L’attribution d’un code à chaque candidat et l’obligation de le lier à chaque signature obtenue forceront la limitation des parrains au nombre/pourcentage convenu. De ce fait, un candidat qui en a le potentiel et les moyens n’ira pas recueillir des millions de signatures rien que pour priver ses adversaires de parrains. En plus de restaurer la confiance mutuelle des acteurs politiques, de favoriser des économies sur les plans logistique et financier, ce mécanisme permettra à chaque candidat de vérifier ses signatures à l’avance, d’éliminer les doublons (à travers la désactivation automatique des parrainages validés par l’algorithme) et au Conseil constitutionnel de faire son travail en quelques clics. Par exemple, pour l’obligation faite aux candidats de collecter des signatures dans un certain nombre de départements, il suffira de trier les signatures par département pour avoir la liste des parrains de chaque candidat par département. Cela évitera au juge un travail manuel laborieux et fortement aléatoire et son implication personnelle se réduira pratiquement à des vérifications sommaires, mais surtout objectives, fondées sur les données issues de la machine. Pour terminer, je rappelle que cette contribution cherche à prévenir la crise qui se profile à l’horizon. Réfléchissons ensemble sur un mécanisme juste et équitable pour tous. Faisons confiance à nos informaticiens nationaux pour nous trouver un MÉCANISME DÉMATÉRIALISÉ INVIOLABLE. Une fois cette question réglée, nous pourrons aborder celle du bulletin unique, une question que la dématérialisation peut résoudre. Un vote dématérialisé est parfaitement réalisable dans notre Sénégal de 2018, à l’ère des projecteurs (pour afficher les listes dans les bureaux de vote), des écrans tactiles (pour voter dans les isoloirs en appuyant sur le candidat de son choix), etc. Rien que sur le papier, nous économiserions des milliards et sauverions des forêts entières ! Moustapha Kane Sénégalais lambda
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