Pour Serigne Cheikh Ahmed Tidiane Sy, l’islam a légué son
patrimoine scientifique et éthique à toutes les cultures et civilisations pour
qu’elles puissent s’interférer, se soutenir et se renouveler sous la
supervision de ce message de grande qualité. Il soutient, d’ailleurs, que sous
le prisme de l’Unicité de Dieu, l’islam ne voit que l’Unité de l’Humanité. Cette
égalité de condition n’est remise en cause que de manière temporaire et
alternée par les vicissitudes de l’Histoire qui, à tour de rôle, distribuent
puissance et décadence « Wa Tilkal
Ayyâmu nudâwiluhâ bayna Nâsi ». Il ne manquera pas, toutefois, de
rappeler que malgré l’ingéniosité des concepteurs des systèmes les plus
sophistiqués, cette marche du monde n’a jamais pu échapper à la volonté du Sage
Savant (Al-‘Alîmul Hakîm).
Dans cette partie de sa démonstration, Serigne Cheikh citera,
l’auteur de l’Evolution de l’Islam (C-Levy,
1960), Raymond Charles, commentant l’orientaliste français, Louis Gardet, qui
rappelait qu’il devenait urgent que l’Occident revînt aux valeurs spirituelles
et religieuses en plus de son rôle scientifique ; ces valeurs sans
lesquelles il retombera, sans doute, dans une forme de non-sens et d’absurde
malgré ses conquêtes et explorations.
A cette époque précise, Serigne Cheikh exprimait une
espérance de voir les Civilisations jouer leur véritable rôle en construisant
plus qu’elles ne détruisent et à comprendre le mouvement de libération des pays
dominés ainsi que l’affranchissement des « damnés de la terre » comme
l’une des plus sages leçons de l’Histoire sur le caractère passager de toutes
les dominations. Il espérait, comme il le disait, que ces civilisations
accueillissent les donnes de l’Histoire et les grands évènements des temps
nouveaux en les admettant de manière positive.
Hélas, pour Al-Maktoum, cela n’était possible que dans un
état d’esprit ou ne dominait pas ce qu’il appelle une certaine
« philosophie de la décadence ».
A vrai dire, c’est la manière dont il décrit les effets d’une
telle philosophie qui imprime à la pensée de Serigne Cheikh toute sa dimension
universelle et avant-gardiste pour son époque.
En réalité, il nous peignait le contexte d’un monde
contemporain où, tel qu’il le disait dans les années 60, « les plus riches du globe assaillent les
pauvres et thésaurisent leurs avoirs au détriment même de tout esprit de
fraternité et de rapprochement, déniant aux dominés l’ambition de l’avoir et de
l’accumulation, et par-dessus tout, prétendent que le bonheur et la réussite
sont l’apanage des seuls riches des civilisations industrialisées jusqu’à même se prévaloir d’une prétendue
élection les plaçant au-dessus de tous les autres ». Et à Serigne
Cheikh de leur rétorquer, en empruntant le style coranique : « Pourquoi donc êtes- vous constamment punis
par le biais de la guerre, des dégâts de l’alcoolisme, de la cupidité, des
jeux, de l’injustice, de la mesquinerie, de la tendance à l’exploitation ?
Vous êtes donc de simples humains ! ».
Soulignant l’inanité et le non–sens d’une civilisation
prétentieuse et dénuée d’éthique et de morale qu’il critiquait, Al-Maktoum se
résolut à étaler sa vision d’un monde où on pourrait parler de « civilisation »
dans son sens noble.
Selon lui, il faut espérer que la Civilisation humaine, dans
son essence, « puisse retrouver la toute
la splendeur qu’elle mérite et sans laquelle la terre deviendra une
« boucherie » où, un jour ou l’autre, ceux à qui l’on a enlevé leur
dignité pour en faire « des vaches, des chevaux et des loups », se
révolteront contre les patrons et grands industriels, les habitants des
capitales et des gratte-ciels pour recouvrer l’honneur de l’Humanité ».
Pour Serigne Cheikh Tidiane Sy si l’humanité en arrive à ce
point, alors « plus d’humanité et
point de civilisation ! ».
Vision ne pouvait être plus futuriste. Il aura bien fallu
attendre la fin du XXème siècle, que le communisme s’effondre, que
Jean-Christophe Ruffin parle d’« empire » et de « nouveaux
barbares », qu’un certain Huntington théorise le « choc des
civilisations », que le 11 septembre se produise, qu’Emmanuel Todd prédise
la « fin de l’Empire », qu’on envahisse des pays souverains au mépris
du droit international, que le capitalisme mondial soit frappé par une crise
inouïe, que le terme de régulation réintègre le vocabulaire économique et
financier, que la jeunesse du monde arabe se dresse contre l’injustice des
potentats, qu’une réelle crise de confiance s’installe entre les gouvernés et
les gouvernants pour comprendre enfin le vrai sens et la nécessité de l’éthique
dans les rapports politiques et économiques !
Pourtant, dès les années 1960, Serigne Cheikh, ce penseur
avant-gardiste, l’avait intégré dans sa conception d’une civilisation
universelle durable à laquelle l’islam et les Musulmans devraient contribuer à
la mesure de la pertinence du message Mohammedien. Certainement, pour théoriser
une telle conception et l’harmoniser avec le message islamique au-delà des
particularismes, il fallait compter sur la vision d’un Cheikh Tidiane Sy, ce
« philosophe de son temps » (faylasûfu
‘açrihi) –comme le dit Serigne Maodo Sy – armé d’un sens élevé de la
critique constructive et d’une audace de l’alternative, libératrices des
conformismes coutumiers (âda), puisse
l’exprimer en toute responsabilité.
patrimoine scientifique et éthique à toutes les cultures et civilisations pour
qu’elles puissent s’interférer, se soutenir et se renouveler sous la
supervision de ce message de grande qualité. Il soutient, d’ailleurs, que sous
le prisme de l’Unicité de Dieu, l’islam ne voit que l’Unité de l’Humanité. Cette
égalité de condition n’est remise en cause que de manière temporaire et
alternée par les vicissitudes de l’Histoire qui, à tour de rôle, distribuent
puissance et décadence « Wa Tilkal
Ayyâmu nudâwiluhâ bayna Nâsi ». Il ne manquera pas, toutefois, de
rappeler que malgré l’ingéniosité des concepteurs des systèmes les plus
sophistiqués, cette marche du monde n’a jamais pu échapper à la volonté du Sage
Savant (Al-‘Alîmul Hakîm).
Dans cette partie de sa démonstration, Serigne Cheikh citera,
l’auteur de l’Evolution de l’Islam (C-Levy,
1960), Raymond Charles, commentant l’orientaliste français, Louis Gardet, qui
rappelait qu’il devenait urgent que l’Occident revînt aux valeurs spirituelles
et religieuses en plus de son rôle scientifique ; ces valeurs sans
lesquelles il retombera, sans doute, dans une forme de non-sens et d’absurde
malgré ses conquêtes et explorations.
A cette époque précise, Serigne Cheikh exprimait une
espérance de voir les Civilisations jouer leur véritable rôle en construisant
plus qu’elles ne détruisent et à comprendre le mouvement de libération des pays
dominés ainsi que l’affranchissement des « damnés de la terre » comme
l’une des plus sages leçons de l’Histoire sur le caractère passager de toutes
les dominations. Il espérait, comme il le disait, que ces civilisations
accueillissent les donnes de l’Histoire et les grands évènements des temps
nouveaux en les admettant de manière positive.
Hélas, pour Al-Maktoum, cela n’était possible que dans un
état d’esprit ou ne dominait pas ce qu’il appelle une certaine
« philosophie de la décadence ».
A vrai dire, c’est la manière dont il décrit les effets d’une
telle philosophie qui imprime à la pensée de Serigne Cheikh toute sa dimension
universelle et avant-gardiste pour son époque.
En réalité, il nous peignait le contexte d’un monde
contemporain où, tel qu’il le disait dans les années 60, « les plus riches du globe assaillent les
pauvres et thésaurisent leurs avoirs au détriment même de tout esprit de
fraternité et de rapprochement, déniant aux dominés l’ambition de l’avoir et de
l’accumulation, et par-dessus tout, prétendent que le bonheur et la réussite
sont l’apanage des seuls riches des civilisations industrialisées jusqu’à même se prévaloir d’une prétendue
élection les plaçant au-dessus de tous les autres ». Et à Serigne
Cheikh de leur rétorquer, en empruntant le style coranique : « Pourquoi donc êtes- vous constamment punis
par le biais de la guerre, des dégâts de l’alcoolisme, de la cupidité, des
jeux, de l’injustice, de la mesquinerie, de la tendance à l’exploitation ?
Vous êtes donc de simples humains ! ».
Soulignant l’inanité et le non–sens d’une civilisation
prétentieuse et dénuée d’éthique et de morale qu’il critiquait, Al-Maktoum se
résolut à étaler sa vision d’un monde où on pourrait parler de « civilisation »
dans son sens noble.
Selon lui, il faut espérer que la Civilisation humaine, dans
son essence, « puisse retrouver la toute
la splendeur qu’elle mérite et sans laquelle la terre deviendra une
« boucherie » où, un jour ou l’autre, ceux à qui l’on a enlevé leur
dignité pour en faire « des vaches, des chevaux et des loups », se
révolteront contre les patrons et grands industriels, les habitants des
capitales et des gratte-ciels pour recouvrer l’honneur de l’Humanité ».
Pour Serigne Cheikh Tidiane Sy si l’humanité en arrive à ce
point, alors « plus d’humanité et
point de civilisation ! ».
Vision ne pouvait être plus futuriste. Il aura bien fallu
attendre la fin du XXème siècle, que le communisme s’effondre, que
Jean-Christophe Ruffin parle d’« empire » et de « nouveaux
barbares », qu’un certain Huntington théorise le « choc des
civilisations », que le 11 septembre se produise, qu’Emmanuel Todd prédise
la « fin de l’Empire », qu’on envahisse des pays souverains au mépris
du droit international, que le capitalisme mondial soit frappé par une crise
inouïe, que le terme de régulation réintègre le vocabulaire économique et
financier, que la jeunesse du monde arabe se dresse contre l’injustice des
potentats, qu’une réelle crise de confiance s’installe entre les gouvernés et
les gouvernants pour comprendre enfin le vrai sens et la nécessité de l’éthique
dans les rapports politiques et économiques !
Pourtant, dès les années 1960, Serigne Cheikh, ce penseur
avant-gardiste, l’avait intégré dans sa conception d’une civilisation
universelle durable à laquelle l’islam et les Musulmans devraient contribuer à
la mesure de la pertinence du message Mohammedien. Certainement, pour théoriser
une telle conception et l’harmoniser avec le message islamique au-delà des
particularismes, il fallait compter sur la vision d’un Cheikh Tidiane Sy, ce
« philosophe de son temps » (faylasûfu
‘açrihi) –comme le dit Serigne Maodo Sy – armé d’un sens élevé de la
critique constructive et d’une audace de l’alternative, libératrices des
conformismes coutumiers (âda), puisse
l’exprimer en toute responsabilité.
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