Youssou Ndour - Idrissa Seck: deux discours, une exigence, des ambitions.

DAKARACTU.COM Ce texte, publié dans le site de Charles Faye, conseiller en communication de Youssou Ndour, recense les convergences entre ce dernier et un candidat à la présidentielle. Est-ce un signe du choix qu'envisage de faire le chanteur à l'occasion de l'échéance électorale à venir ?


Un mois après Youssou Ndour, Idrissa Seck a rendu public son discours de foi, lançant ainsi sa campagne « Idy4 Président » pour la présidentielle 2012. ASI24 analyse les deux discours qui se retrouvent sur certains points, dans la forme et le fonds, et traduisent une philosophie et des principes nuancés.


Comme Youssou Ndour, le président de Rewmi a décidé de parler à ses « compatriotes », en usant du « je », ce sujet conscient de son pouvoir, de son poids social et politique. Toutefois, des différences sont à noter dans ce qui ressort comme étant « leurs ambitions » et surtout leur « philosophie de vie ».

Pour ce qui concerne l’ambition des deux hommes, la clarification a été faite. Le leader de Fekkee ma ci boole n’est pas candidat, le président de Rewmi qui entend devenir, en février 2012, le 4e président de la République du Sénégal.

Youssou Ndour affirme être du côté du peuple. « Cher compatriotes … C’est ce (son implication politique) qui explique ma décision d’être aux côtés du peuple pour faire face aux innombrables difficultés et défis (…)Jurant fidélité à mon peuple, lui rappelant ma reconnaissance, je suis et je resterai à ses côtés. »

Idrissa Seck dit : « Mes chers compatriotes, la souffrance du peuple Sénégalais m’est insupportable. Cela me pèse de constater le désarroi des femmes du Gnombato. Que dire des dizaines de milliers de jeunes du Sine, du Saloum, du Cayor, du Njambuur, du Fouta, du Sénégal oriental, et de la Casamance, qui risquent leur vie dans des pirogues de fortune pour fuir la misère ?

« Comme vous, en fils du Sénégal, je ne peux être insensible aux cris des élèves, pieds trempés dans l’eau, écoutant un maître qui réclame son salaire, pendant que des milliards de francs sont dépensés dans des festivités mondaines.

En revanche Idrissa Seck fait apparaître qu’il est « lui » appelé par les « autres ». « Je salue aujourd’hui la large coalition de 40 organisations politiques et citoyennes qui porte ma candidature. Une coalition qui s’agrandit chaque jour. »

C’est ici que le « moi » ou le « je » d’Idrissa Seck s’affirme politique. Un « je » se voulant une plateforme fédératrice. La conscience de cet état du « je » parle au subconscient des « autres » qui doivent se déterminer pour leur sauvegarde, leur avenir porté par « l’autre » avec eux.

« Je revois ces milliers de jeunes m’interpellant sur leur désir de pouvoir servir leur pays, s’occuper de leurs parents, construire une famille, bâtir un avenir », dit Idrissa Seck.

Le « je » d’Idrissa Seck est conscient de ce qu’il est et de ce qu’il porte. Un projet politique et social et une personnalité d’envergure dans les bagages : Léna Sène qui a travaillé à la Maison Blanche. L’Amérique impressionne. Qui plus est Léna Sène n’est pas n’importe qui. Son cursus et son histoire parlent pour elle.

A ce « je » qui s’est fait fort de censurer ce qui était constant et maladroit jusqu’ici dans son discours et souvent à lui reproché, s’ajoute la troisième personne du singulier. Il s’agit d’ « elle », Léna Sène. Ce n’est pas « il ».

Le clin d’œil aux femmes fortes de savoir-être et savoir faire et qui plus est porteuses de projet est une invite adroite. On peut y lire l’Universalité de Senghor. Léna Sène est métisse, elle est un carrefour culturel, elle est riche donc d’un savoir et a un sens de l’Universalisme. Dans ce monde de la globalisation, le Sénégal et les femmes ne peuvent être à la traîne. L’administration d’Obama appréciera ce clin d’œil.

Par ailleurs, Youssou Ndour et Idrissa Seck soutiennent pratiquement la même chose quand ils évoquent les valeurs. « Amal Ndierigne seen bopp, Amal ndierigne seen Waadiour, Amal Ndierigne Rewmi », dit Idrissa Seck/ « J’évoque le « Disso » parce qu’il nous parle, défend nos valeurs, et nous met en harmonie avec les différents secteurs économiques, les acteurs politiques, et les populations », dit Youssou Ndour.

Tous les deux convoquent le wolof. Paradigme, schèmes de réflexion qui renseignent sur leur maîtrise des complexités de leur société. Concernant toujours les valeurs, Youssou Ndour se veut clair sur le prochain président de la République et son administration.

« Mon engagement est de faire en sorte que nul ne croit qu’il peut faire ce qu’il veut de notre pays ; que nul n’estime qu’il peut gouverner à sa guise en toute impunité, une fois qu’il sera installé dans ses fonctions de Magistrat suprême de notre Nation (…) demander à ceux qui ambitionnent de nous gouverner, une intégrité sans faille, un sens profond de l’honneur, de l’éthique et de l’équité, une dignité avérée, un patriotisme éclairé. La Magistrature suprême de notre pays est à ce prix. Le Sénégal d’après février 2012 le revendique et le mérite. »

Idrissa Seck n’en dit pas autant, mais le « je » est conscient que « le temps est venu pour nous tous d’assumer notre destin pour éviter le triomphe du népotisme et de la mal gouvernance… ».

Chez Idrissa Seck, la défense des valeurs communes et inébranlables « qui fondent notre Nation » n’est pas une affaire personnelle, elle est l’affaire de tous. Pour Youssou Ndour, elle doit d’abord émaner de l’incarnation de la Première institution du pays et de son administration.

Par conséquent, pour Youssou Ndour, Idrissa Seck, comme tous les autres candidats à la présidentielle doivent se conformer à cette nouvelle exigence revendiquée désormais par les Sénégalais. Entre les deux hommes, il y a nuance à ce propos.

D’ailleurs, Idrissa Seck n’a pas affirmé, publiquement, le partage de cette exigence. Tous comme les autres candidats sont restés silencieux à ce sujet.

Contrairement à Youssou Ndour qui a évité les références religieuses, l’homme politique, Idrissa Seck, ne s’en prive pas. « Ces marchands ambulants, ces mécaniciens déguerpis, ces agriculteurs sont, comme nous tous, unis par la volonté de briser les chaines de l’humiliation, volonté magnifiée par Cheikh Ahmadou Bamba (Qad Fakka Kabla). Ils sont aussi à la recherche du gain licite pour protéger leur honneur, ce Kasboul Halal enseigné par Maodo. »

Une différence que l’on peut noter.

Sur la fin de leur discours, tous deux rappellent leur croyance et s’en remettent à Dieu pour le meilleur de leur pays. « Dieu bénisse le Sénégal ! », conclut l’auteur-compositeur. « Que Dieu nous permette d’accomplir cette mission de servir. Amine », termine le président de Rewmi.

Les deux discours se veulent historiques. Ils le seront certainement. Mais ils ont surtout campé le décor d’un environnement politique auquel le Sénégal aspire désormais.

Par David LY

( asi24.info ) 
Lundi 17 Octobre 2011