Les personnes qui ont un minimum de familiarité avec la vie politique de notre pays n’auront aucune difficulté à s’accorder sur une évidence : mettre fin à l’ère Wade est aujourd’hui la préoccupation majeure chez bon nombre de nos compatriotes. Il n’est aussi pas difficile de prouver que l’écrasante majorité des hommes politiques sénégalais qui veulent servir leur pays et non s’en servir, préfèrent que Me Abdoulaye Wade, du fait de son âge avancé, prenne sa retraite politique peu ou prou bien méritée en février 2012. Pour améliorer les chances de l’opposition de faire partir Wade, beaucoup avaient souhaité de tout cœur que Bennoo puisse arriver à un consensus autour d’un candidat de l’unité et du rassemblement. Malheureusement, un accord sur une procédure objective pour départager Moustapha Niasse et Ousmane Tanor Dieng n’a pas pu être trouvé par la Conférence des leaders de Bennoo. Il faut cependant signaler que ce n’est pas parce qu’il n’y avait pas un moyen impartial d’y arriver. L’auteur de cette contribution a fait parvenir le 11 Novembre 2011 à un membre influent du comité de facilitation une proposition d’organisation de Caucus qui allaient impliquer l’ensemble des militants des partis membres de Bennoo. Des caucus dont le coût pour Bennoo serait négligeable. Un exercice qui pouvait se dérouler au cours d’un seul week-end et aurait permis non seulement de faire un rappel des troupes de la coalition mais surtout de donner aux militants de base l’occasion de contribuer au choix de celui pour qui ils allaient battre campagne en février et/ou mars 2012.
Quels sont les choix qui s’offrent aujourd’hui aux Sénégalaises et Sénégalais qui veulent tourner la page libéralo-wadienne?
Si on considère la capacité de drainer des foules comme étant un indicateur de la crédibilité populaire d’une candidature, les options les plus plausibles semblent être par ordre alphabétique: Ousmane Tanor Dieng, Ibrahima Fall, Moustapha Niasse, Macky Sall et Idrissa Seck. Les autres candidats sont de mon point de vue des plaisantins narcissistes. Ils ne vont qu’amuser la galerie et faire perdre aux contribuables sénégalais des centaines de millions de nos francs qui auraient pu servir à financer autre chose de plus utile sauf si les kleptocrates se les approprient.
Il va sans dire que ceux qui sont sincères dans leur désir de tourner la page libéralo-wadienne ne vont pas s’aventurer à choisir Idrissa Seck. Mody Niang nous a fourni assez de preuves qui démontrent que Ngoorsi a été bien formé dans l’art du njublang par Goorgi. L’autre facteur qui disqualifie Mr Seck est qu’il se réclame libéral pur et dur. En bon libéral qui ne recule devant rien pour renforcer son portfolio, Mr Seck n’a pas hésité une seule seconde à se servir des fonds politiques pour devenir comme il le dit lui-même «très riche». N’ayant jamais vu ou entendu Idrissa Seck faire son mea-culpa pour s’être illégitimement enrichi sur le dos des gorgorlus, il m’est permis d’imaginer, qu’une fois au pouvoir, il sera enclin d’utiliser la voie du njublang pour s’enrichir davantage.
Macky Sall se réclame aussi du libéralisme. Je ne suis pas cependant certain que cet ancien militant d’AJ/MRDN est pleinement conscient de ce que signifie être libéral dans un pays où l’écrasante majorité est faite de gorgorlus qui tirent le diable par la queue. Ma lecture de son comportement sur le terrain politique est que Macky Sall est un politicien qui se cherche encore et n’a donc pas une idée précise de la direction où il veut amener le pays. Les manigances machiavéliques de son ancien mentor l’ont poussé, bien malgré lui, au devant de la scène. Tout laisse croire qu’il est surtout animé par le seul désir de prouver à Me Wade et à son fils Karim qu’ils ont commis l’erreur fatale de le pousser à la porte de sortie sans qu’il ait été déloyal à leur égard. Il faut aussi reconnaître que la partie visible de l’équipe de Mr Sall inspire peu de confiance. A l’image de l’individu qui se fait appeler «el pistolero» ; il exhibe un déficit criard en expérience de gestion de la chose publique. En passant en revue les multiples déclarations que Moustapha Cissé Lô a faites dans la presse sénégalaise, l’idée de le voir devenir un conseil écouté d’un Président de la République du Sénégal est terrifiante pour le politologue que je suis. La gestion minutieuse du désordre qui sera hérité de Me Wade requiert une équipe et un chef qui connaissent bien les rouages de l’Etat du Sénégal. Des individus qui ne seront pas facilement rendus ivres par le pouvoir et sont familiers avec les règles du jeu des relations internationales. Macky Sall et son équipe ont encore un long chemin à faire avant d’arriver à cette destination.
Le doyen Ibrahima Fall aurait pu être une excellente option s’il était pourvu d’un appareil capable d’attirer vers lui le vote utile des anti-Wadistes. Mon ami Buuba Diop épaulé par des centaines de personnes qui travaillent d’arrache-pied avec une abnégation presque totale, rêve de faire de lui le Yaya Boni sénégalais. Force est de reconnaître que les chances réelles de Mr Fall sont très limitées. Bien qu’étant très visible chez les intellectuels qui constituent une infime minorité de la population, Mr Fall souffre d’un déficit de représentation dans le Sénégal des profondeurs.
Ce déficit aurait pu être comblé si sa campagne avait démarré trois à quatre ans avant le 26 février 2012. Avec son Wolof parfait, Mr Fall va certainement charmer les téléspectateurs au cours de la campagne électorale. Cheikh Anta Diop avait suscité en 1983 le même type d’enthousiasme. Mais l’écrasante majorité de ceux et celles qui ont aimé ce que Cheikh disait avaient choisi de voter pour le PDS qui, à leur yeux, était perçu comme étant mieux placé que le RND pour mettre fin au règne du PS. «Bu mako wotelee iit defay melni dama sanni sama kart» (Voter pour lui équivaut à jeter ma carte dans la poubelle) est une des raisons pour lesquelles les candidats de la gauche historique n’ont jamais dépassé les 3% du suffrage des Sénégalais ceci malgré leurs excellents messages de campagne. Ceux qui vont voter utile afin que la page libérale puisse être tournée vont choisir le candidat qui est le plus présent sur le terroir avec lequel ils sont familiers. Dans la majeure partie des cas cela ne risque pas d’être le Doyen Fall malgré la probité morale que tous lui reconnaissent.
Moustapha Niasse était de mon point de vue le candidat le mieux placé en 2007 pour battre Me Wade. Dans une de mes contributions que Walfadjri et Nettali avaient publiée sous le titre: La CPA candidature unique ou candidature plurielle; je disais ceci pour argumenter mon point de vue; «il y a deux facteurs qui peuvent rendre plus facile la crédibilisation des candidatures d’Abdoulaye Bathily et de Moustapha Niasse. Le premier est qu’Ils peuvent légitimement demander aux Sénégalaises et Sénégalais qui ont été les actrices et acteurs des deux glorieuses du 27 Février et 19 Mars 2000, mais sont déçus par la manière dont l’ère de l’alternance a été gérée, de leur donner la chance de rectifier le tir. Il n’est pas difficile d’imaginer qu’une suite positive pourra être réservée à cette demande car Moustapha Niasse et Abdoulaye Bathily n’ont jamais cessé de critiquer la manière dont Abdoulaye Wade et le PDS ont non seulement confisqué la victoire de la CA2000 et du FAL mais aussi renié toutes les promesses qui ont été faites à leurs compatriotes durant la campagne électorale de 2000». «La différence de taille qu’il y aura entre l’effort de crédibilisation de la candidature de Abdoulaye Bathily et Moustapha Niasse sera que le premier et son parti n’ont jamais récolté 10% du suffrage des sénégalais alors que le second peut légitimement défendre qu’en 2000 n’eût été le soutien du pôle de gauche, Abdoulaye Wade ne lui aurait pas damé le pion pour faire face à Abdou Diouf au deuxième tour».
Entre 2007 et 2012 des événements qui ont fait perdre à Moustapha Niasse sa légitimité morale de 2007 se sont passés. D’abord, il y a eu l’élection présidentielle en 2007 à laquelle Mr Niasse a participé. Cette élection de 2007 a vu le poids électoral de Niasse dégringoler de 17% à moins de 6%. Pour expliquer cette chute vertigineuse de Niasse, certains accusent Wade et Macky d’avoir pipé les dés. Si tel est le cas Tanor a certainement dû connaître le même sort que Niasse. Ce qui veut dire mathématiquement que la différence relative actuelle entre leurs poids électoraux reflète la réalité des forces politiques sur le terrain. Il est vrai que Niasse bénéficie aujourd’hui du soutien de la LD/MPT.
Même le rajout du score de Bathily en 2007 à celui de Niasse n’empêche pas au poids électoral de Tanor de faire à peu près le double de la somme des poids électoraux de Niasse et Bathily en février 2007. Y a-t-il eu des départs massifs du PS et des adhésions record à l’AFP pour effacer cette différence? La réponse la plus crédible à cette question est: NON! En fait si on se fie aux médias sénégalais, le PS semble avoir attiré vers lui beaucoup de nouvelles adhésions. Des jeunes comme Barthélémy Diaz et Malick Noël Seck, des universitaires comme le nouvel agrégé de grammaire Oumar Sangharé, des vétérans de la lutte pour la bonne gouvernance comme Pierre Sané, l’ancien patron d’Amnesty International, ont décidé de venir épauler Ousmane Tanor Dieng. Tout laisse croire que ceci n’est que le «tip of the iceberg» des nouvelles adhésions au PS «New look». Les personnes qui voteront utile, c'est-à-dire celles dont le choix sera surtout déterminé que par ce qu’elles perçoivent comme étant les chances du candidat de sortir vainqueur, vont avoir plus tendance à choisir Tanor au lieu de Niasse.
L’autre évènement qui a fait perdre à Niasse sa légitimité morale de 2007 est la tenue des Assises nationales. La feuille de route qui est issue de cette rencontre a rendu caduque la nécessité de faire de la rectification de l’alternance le point focal d’un programme de développement politique du Sénégal. Parce qu’en fait rectifier l’alternance signifie mettre en œuvre le programme de la CA2000 qui a été bafoué par Me Wade. Or, ce programme de la CA2000 est largement inférieur à celui qui est sorti des Assises. Le Spectrum des personnes qui ont participé à son élaboration est de loin supérieur à celui des individus qui avaient contribué à la rédaction du programme de la CA2000. Il y a eu une plus grande variété aussi bien du point de vue de la couleur idéologique des participants que de leurs domaines d’expertise en matière de développement politique et économique. Niasse et Tanor se sont tous les deux engagés à mettre en œuvre, autant qu’ils le pourront, le programme des Assises nationales. Les feuilles de route qu’ils ont promis de suivre s’ils sont élus sont donc identiques. Parler d’une mission de rectification de l’alternance dont Niasse serait le porteur ou s’arcbouter à l’idée qu’une fois élu Tanor va ramener les méthodes de gouvernance d’avant 2000 est une aberration. Ce faisant Moustapha Niasse a aujourd’hui objectivement perdu l’avantage qu’il avait en 2007 sur Ousmane Tanor Dieng.
La dignité avec laquelle Tanor et ses compagnons comme El hadji Mansour Mbaye, Doudou Ndiaye Coumba Rose, Abdoulaye Elimane Kane, Niadiar Sène, Mame Bounama Sall, Aminata Mbengue Ndiaye, Aissatou Tall Sall, Serigne Mbaye Thiam, Khalifa Sall, Abdoulaye Wilane et des milliers d’autres militants PS ont stoïquement accepté de faire la traversée du désert, honore la classe politique sénégalaise. Nous savons tous que Me Wade et ses partisans n’ont pas lésiné sur les menaces et sur l’offre de moyens alléchants pour les faire plier. Babacar Diagne, Mbaye Jacques Diop, Abdourahime Agne, Mbaye Diouf, Aida Mbodji et plusieurs centaines d’autres qui jettent aujourd’hui leur dévolu sur Me Wade après l’avoir accusé d’être un diable personnifié pour faire plaisir à Abdou Diouf, ne diront pas le contraire. L’illégalité de l’usage des deniers publics du Sénégal pour détruire le Parti socialiste qui leur avait pourtant tout donné et les souffrances de milliers de leurs compatriotes qui auraient pu être abrégées par les millions qu’ils ont reçus du Pape du Sopi ne les ont pas fait hésiter. Il n’est donc pas exagéré de dire que le PS de 2012 est très différent du PS de 2000.
L’essentiel des membres de ce parti qui y étaient attirés par la possibilité d’un gain personnel facile, en d’autres termes la mauvaise graine du parti, a aujourd’hui migré vers le camp libéral. Il est impensable que Tanor et les vrais militants socialistes, qui ont accepté de vivre dignement la défaite de 2000, leur rouvrent les portes du parti. Il est tout aussi difficile d’imaginer que durant cette traversée du désert, Tanor et ses compagnons n’aient pas appris à mieux être en phase avec la volonté du peuple sénégalais.
Mon amie Penda Mbow que j’aime appeler la «lingeer de la République» justifie son choix pour Niasse en ces termes; «Au sein de la large panoplie de candidats, Moustapha Niasse est le mieux placé pour assurer cette transition pacifique et ordonnée vers un Sénégal plus prospère, plus démocratique et plus juste». La véracité de cette assertion ne fait pas l’ombre d’un doute si on sort Ousmane Tanor Dieng de l’échantillon à partir duquel le choix est fait. Mais si on se base sur les critères révélés au grand public qui ont été mis en avant par Bennoo et si Ousmane Tanor Dieng fait partie des choix possibles, il est en toute objectivité difficile de ne pas arriver à conclusion que Mr Dieng est de loin le mieux placé pour offrir au peuple des Assises nationales l’opportunité de mettre en œuvre leur programme. Un autre mauvais procès qui est fait à Tanor est l’argument selon lequel on ne peut pas enlever le PS qui en 2000 avait bouclé ses 40ans de pouvoir et le faire revenir de sitôt.
Si ceci est le cas, Niasse devrait être exclu des choix possibles. Il a joué, aussi bien du point de vue des responsabilités que de la durée, des rôles plus importants que ceux de Tanor dans le PS durant ces 40 ans. Il est permis de douter que Niasse aurait quitté le PS si Diouf l’avait choisi durant «un congrès sans débat» à la place de Tanor ou lui avait proposé une place de son choix dans le Gouvernement qui a suivi les législatives de 1998. Si travailler pour l’élection de Tanor est considéré comme un effort de faire revenir le PS, il devrait objectivement en être de même pour Niasse. Les américains avaient chassé du pouvoir les républicains en 1976 après la rocambolesque affaire du Watergate. Ils avaient choisi «Jimmy Who?»(Jimmy l’inconnu) à la place de Gerald Ford pour sanctionner les violeurs de leur Constitution. Ils ont voté massivement pour Ronald Reagan en 1980. Les républicains qui avaient bien appris leur leçon ont fait un si bon travail aux yeux des américains qu’ils les ont maintenu au pouvoir de 1980-1992.
Le seul pêché d’Ousmane Tanor Dieng est d’avoir hérité de la direction d’un parti politique qui avait trop duré au pouvoir. Beaucoup oublient, ou ne savent pas, que Mr Dieng n’a commencé à occuper des fonctions importantes au sein du Parti socialiste qu’au milieu des années 90. Le mérite que toute personne objective doit cependant lui reconnaître, c’est d’avoir transformé le PS de 2000 en une organisation politique qui attire des intellectuels de haut calibre dont l’engagement pour la cause du socialisme démocratique ne saurait souffrir l’ombre d’un doute objectif.
Ousmane Tanor Dieng a un handicap majeur qu’il partage avec Abdoulaye Bathily qui, de mon point de vue, aurait pu être un excellent Président du Sénégal. Il leur manque la capacité de faire transparaître une chaleur humaine durant leur interaction avec le public. Ils sont tous les deux perçus par ceux et celles qui n’ont jamais eu la chance de les avoir approchés, comme des individus froids et distants. Comme je le disais à Pierre Sané dans la note où je le félicitais d’avoir rejoint Tanor; «Ousmane Tanor Dieng est un des hommes politiques les plus incompris du Sénégal. Son honnêteté et son STYLE DIRECT s'accommodent très mal avec le MASLA Sénégalais. C'est d’ailleurs pour cela que beaucoup le perçoivent comme un ARROGANT alors qu’il est bien loin de l’être. Tanor est une des rares personnalités politiques sénégalaises qui ne font jamais des promesses qu'ils ne sont pas sûrs de pouvoir tenir». Tanor est victime de son background culturel serer. Sa ligne de conduite est dictée au quotidien par les philosophies serer du «Caaxaan faaxee » et du «o koor jom fo fula».
Georges Clemenceau disait que; «La politique c’est l’art du possible». Le seul candidat qui a aujourd’hui à sa disposition un appareil politique capable de faire face au PDS et Me Wade est Ousmane Tanor Dieng. La présence du PS dans tous les recoins du pays donne à Mr Dieng les moyens de pouvoir bénéficier du Vote Utile de ceux et celles qui en ont marre de voir le Sénégal continuer sa chute libre vers l’incertain. Ceux et celles qui ont pratiqué Ousmane Tanor Dieng, savent qu’il est loyal dans ses engagements et va plutôt préférer mourir que décevoir si les Sénégalaises et Sénégalais lui confient la responsabilité de présider les destinées de notre pays. Ce que je connais personnellement de ce fils de Nguéniène me laisse croire qu’il fera de l’accomplissement de cette mission sa raison de vivre. C’est un homme de devoir et de responsabilité. Le Jom sénégalais, fortement ancré en lui, sera le phare qui va guider le choix du comportement qu’il va exiger des membres de l’équipe qu’il va diriger.
Diomaye (Ndongo) Faye,
Ancien coordinateur du directoire de Campagne de la CA2000/FAL en Amérique du Nord
Ancien Coordinateur du Mouvement pour les Assises de la Gauche(MAG)
Membre du Directoire de campagne d’Abdoulaye Bathily en 2007
Chercheur en stratégie de développement politique
New Jersey, USA
Cilawkuut@cs.com
Quels sont les choix qui s’offrent aujourd’hui aux Sénégalaises et Sénégalais qui veulent tourner la page libéralo-wadienne?
Si on considère la capacité de drainer des foules comme étant un indicateur de la crédibilité populaire d’une candidature, les options les plus plausibles semblent être par ordre alphabétique: Ousmane Tanor Dieng, Ibrahima Fall, Moustapha Niasse, Macky Sall et Idrissa Seck. Les autres candidats sont de mon point de vue des plaisantins narcissistes. Ils ne vont qu’amuser la galerie et faire perdre aux contribuables sénégalais des centaines de millions de nos francs qui auraient pu servir à financer autre chose de plus utile sauf si les kleptocrates se les approprient.
Il va sans dire que ceux qui sont sincères dans leur désir de tourner la page libéralo-wadienne ne vont pas s’aventurer à choisir Idrissa Seck. Mody Niang nous a fourni assez de preuves qui démontrent que Ngoorsi a été bien formé dans l’art du njublang par Goorgi. L’autre facteur qui disqualifie Mr Seck est qu’il se réclame libéral pur et dur. En bon libéral qui ne recule devant rien pour renforcer son portfolio, Mr Seck n’a pas hésité une seule seconde à se servir des fonds politiques pour devenir comme il le dit lui-même «très riche». N’ayant jamais vu ou entendu Idrissa Seck faire son mea-culpa pour s’être illégitimement enrichi sur le dos des gorgorlus, il m’est permis d’imaginer, qu’une fois au pouvoir, il sera enclin d’utiliser la voie du njublang pour s’enrichir davantage.
Macky Sall se réclame aussi du libéralisme. Je ne suis pas cependant certain que cet ancien militant d’AJ/MRDN est pleinement conscient de ce que signifie être libéral dans un pays où l’écrasante majorité est faite de gorgorlus qui tirent le diable par la queue. Ma lecture de son comportement sur le terrain politique est que Macky Sall est un politicien qui se cherche encore et n’a donc pas une idée précise de la direction où il veut amener le pays. Les manigances machiavéliques de son ancien mentor l’ont poussé, bien malgré lui, au devant de la scène. Tout laisse croire qu’il est surtout animé par le seul désir de prouver à Me Wade et à son fils Karim qu’ils ont commis l’erreur fatale de le pousser à la porte de sortie sans qu’il ait été déloyal à leur égard. Il faut aussi reconnaître que la partie visible de l’équipe de Mr Sall inspire peu de confiance. A l’image de l’individu qui se fait appeler «el pistolero» ; il exhibe un déficit criard en expérience de gestion de la chose publique. En passant en revue les multiples déclarations que Moustapha Cissé Lô a faites dans la presse sénégalaise, l’idée de le voir devenir un conseil écouté d’un Président de la République du Sénégal est terrifiante pour le politologue que je suis. La gestion minutieuse du désordre qui sera hérité de Me Wade requiert une équipe et un chef qui connaissent bien les rouages de l’Etat du Sénégal. Des individus qui ne seront pas facilement rendus ivres par le pouvoir et sont familiers avec les règles du jeu des relations internationales. Macky Sall et son équipe ont encore un long chemin à faire avant d’arriver à cette destination.
Le doyen Ibrahima Fall aurait pu être une excellente option s’il était pourvu d’un appareil capable d’attirer vers lui le vote utile des anti-Wadistes. Mon ami Buuba Diop épaulé par des centaines de personnes qui travaillent d’arrache-pied avec une abnégation presque totale, rêve de faire de lui le Yaya Boni sénégalais. Force est de reconnaître que les chances réelles de Mr Fall sont très limitées. Bien qu’étant très visible chez les intellectuels qui constituent une infime minorité de la population, Mr Fall souffre d’un déficit de représentation dans le Sénégal des profondeurs.
Ce déficit aurait pu être comblé si sa campagne avait démarré trois à quatre ans avant le 26 février 2012. Avec son Wolof parfait, Mr Fall va certainement charmer les téléspectateurs au cours de la campagne électorale. Cheikh Anta Diop avait suscité en 1983 le même type d’enthousiasme. Mais l’écrasante majorité de ceux et celles qui ont aimé ce que Cheikh disait avaient choisi de voter pour le PDS qui, à leur yeux, était perçu comme étant mieux placé que le RND pour mettre fin au règne du PS. «Bu mako wotelee iit defay melni dama sanni sama kart» (Voter pour lui équivaut à jeter ma carte dans la poubelle) est une des raisons pour lesquelles les candidats de la gauche historique n’ont jamais dépassé les 3% du suffrage des Sénégalais ceci malgré leurs excellents messages de campagne. Ceux qui vont voter utile afin que la page libérale puisse être tournée vont choisir le candidat qui est le plus présent sur le terroir avec lequel ils sont familiers. Dans la majeure partie des cas cela ne risque pas d’être le Doyen Fall malgré la probité morale que tous lui reconnaissent.
Moustapha Niasse était de mon point de vue le candidat le mieux placé en 2007 pour battre Me Wade. Dans une de mes contributions que Walfadjri et Nettali avaient publiée sous le titre: La CPA candidature unique ou candidature plurielle; je disais ceci pour argumenter mon point de vue; «il y a deux facteurs qui peuvent rendre plus facile la crédibilisation des candidatures d’Abdoulaye Bathily et de Moustapha Niasse. Le premier est qu’Ils peuvent légitimement demander aux Sénégalaises et Sénégalais qui ont été les actrices et acteurs des deux glorieuses du 27 Février et 19 Mars 2000, mais sont déçus par la manière dont l’ère de l’alternance a été gérée, de leur donner la chance de rectifier le tir. Il n’est pas difficile d’imaginer qu’une suite positive pourra être réservée à cette demande car Moustapha Niasse et Abdoulaye Bathily n’ont jamais cessé de critiquer la manière dont Abdoulaye Wade et le PDS ont non seulement confisqué la victoire de la CA2000 et du FAL mais aussi renié toutes les promesses qui ont été faites à leurs compatriotes durant la campagne électorale de 2000». «La différence de taille qu’il y aura entre l’effort de crédibilisation de la candidature de Abdoulaye Bathily et Moustapha Niasse sera que le premier et son parti n’ont jamais récolté 10% du suffrage des sénégalais alors que le second peut légitimement défendre qu’en 2000 n’eût été le soutien du pôle de gauche, Abdoulaye Wade ne lui aurait pas damé le pion pour faire face à Abdou Diouf au deuxième tour».
Entre 2007 et 2012 des événements qui ont fait perdre à Moustapha Niasse sa légitimité morale de 2007 se sont passés. D’abord, il y a eu l’élection présidentielle en 2007 à laquelle Mr Niasse a participé. Cette élection de 2007 a vu le poids électoral de Niasse dégringoler de 17% à moins de 6%. Pour expliquer cette chute vertigineuse de Niasse, certains accusent Wade et Macky d’avoir pipé les dés. Si tel est le cas Tanor a certainement dû connaître le même sort que Niasse. Ce qui veut dire mathématiquement que la différence relative actuelle entre leurs poids électoraux reflète la réalité des forces politiques sur le terrain. Il est vrai que Niasse bénéficie aujourd’hui du soutien de la LD/MPT.
Même le rajout du score de Bathily en 2007 à celui de Niasse n’empêche pas au poids électoral de Tanor de faire à peu près le double de la somme des poids électoraux de Niasse et Bathily en février 2007. Y a-t-il eu des départs massifs du PS et des adhésions record à l’AFP pour effacer cette différence? La réponse la plus crédible à cette question est: NON! En fait si on se fie aux médias sénégalais, le PS semble avoir attiré vers lui beaucoup de nouvelles adhésions. Des jeunes comme Barthélémy Diaz et Malick Noël Seck, des universitaires comme le nouvel agrégé de grammaire Oumar Sangharé, des vétérans de la lutte pour la bonne gouvernance comme Pierre Sané, l’ancien patron d’Amnesty International, ont décidé de venir épauler Ousmane Tanor Dieng. Tout laisse croire que ceci n’est que le «tip of the iceberg» des nouvelles adhésions au PS «New look». Les personnes qui voteront utile, c'est-à-dire celles dont le choix sera surtout déterminé que par ce qu’elles perçoivent comme étant les chances du candidat de sortir vainqueur, vont avoir plus tendance à choisir Tanor au lieu de Niasse.
L’autre évènement qui a fait perdre à Niasse sa légitimité morale de 2007 est la tenue des Assises nationales. La feuille de route qui est issue de cette rencontre a rendu caduque la nécessité de faire de la rectification de l’alternance le point focal d’un programme de développement politique du Sénégal. Parce qu’en fait rectifier l’alternance signifie mettre en œuvre le programme de la CA2000 qui a été bafoué par Me Wade. Or, ce programme de la CA2000 est largement inférieur à celui qui est sorti des Assises. Le Spectrum des personnes qui ont participé à son élaboration est de loin supérieur à celui des individus qui avaient contribué à la rédaction du programme de la CA2000. Il y a eu une plus grande variété aussi bien du point de vue de la couleur idéologique des participants que de leurs domaines d’expertise en matière de développement politique et économique. Niasse et Tanor se sont tous les deux engagés à mettre en œuvre, autant qu’ils le pourront, le programme des Assises nationales. Les feuilles de route qu’ils ont promis de suivre s’ils sont élus sont donc identiques. Parler d’une mission de rectification de l’alternance dont Niasse serait le porteur ou s’arcbouter à l’idée qu’une fois élu Tanor va ramener les méthodes de gouvernance d’avant 2000 est une aberration. Ce faisant Moustapha Niasse a aujourd’hui objectivement perdu l’avantage qu’il avait en 2007 sur Ousmane Tanor Dieng.
La dignité avec laquelle Tanor et ses compagnons comme El hadji Mansour Mbaye, Doudou Ndiaye Coumba Rose, Abdoulaye Elimane Kane, Niadiar Sène, Mame Bounama Sall, Aminata Mbengue Ndiaye, Aissatou Tall Sall, Serigne Mbaye Thiam, Khalifa Sall, Abdoulaye Wilane et des milliers d’autres militants PS ont stoïquement accepté de faire la traversée du désert, honore la classe politique sénégalaise. Nous savons tous que Me Wade et ses partisans n’ont pas lésiné sur les menaces et sur l’offre de moyens alléchants pour les faire plier. Babacar Diagne, Mbaye Jacques Diop, Abdourahime Agne, Mbaye Diouf, Aida Mbodji et plusieurs centaines d’autres qui jettent aujourd’hui leur dévolu sur Me Wade après l’avoir accusé d’être un diable personnifié pour faire plaisir à Abdou Diouf, ne diront pas le contraire. L’illégalité de l’usage des deniers publics du Sénégal pour détruire le Parti socialiste qui leur avait pourtant tout donné et les souffrances de milliers de leurs compatriotes qui auraient pu être abrégées par les millions qu’ils ont reçus du Pape du Sopi ne les ont pas fait hésiter. Il n’est donc pas exagéré de dire que le PS de 2012 est très différent du PS de 2000.
L’essentiel des membres de ce parti qui y étaient attirés par la possibilité d’un gain personnel facile, en d’autres termes la mauvaise graine du parti, a aujourd’hui migré vers le camp libéral. Il est impensable que Tanor et les vrais militants socialistes, qui ont accepté de vivre dignement la défaite de 2000, leur rouvrent les portes du parti. Il est tout aussi difficile d’imaginer que durant cette traversée du désert, Tanor et ses compagnons n’aient pas appris à mieux être en phase avec la volonté du peuple sénégalais.
Mon amie Penda Mbow que j’aime appeler la «lingeer de la République» justifie son choix pour Niasse en ces termes; «Au sein de la large panoplie de candidats, Moustapha Niasse est le mieux placé pour assurer cette transition pacifique et ordonnée vers un Sénégal plus prospère, plus démocratique et plus juste». La véracité de cette assertion ne fait pas l’ombre d’un doute si on sort Ousmane Tanor Dieng de l’échantillon à partir duquel le choix est fait. Mais si on se base sur les critères révélés au grand public qui ont été mis en avant par Bennoo et si Ousmane Tanor Dieng fait partie des choix possibles, il est en toute objectivité difficile de ne pas arriver à conclusion que Mr Dieng est de loin le mieux placé pour offrir au peuple des Assises nationales l’opportunité de mettre en œuvre leur programme. Un autre mauvais procès qui est fait à Tanor est l’argument selon lequel on ne peut pas enlever le PS qui en 2000 avait bouclé ses 40ans de pouvoir et le faire revenir de sitôt.
Si ceci est le cas, Niasse devrait être exclu des choix possibles. Il a joué, aussi bien du point de vue des responsabilités que de la durée, des rôles plus importants que ceux de Tanor dans le PS durant ces 40 ans. Il est permis de douter que Niasse aurait quitté le PS si Diouf l’avait choisi durant «un congrès sans débat» à la place de Tanor ou lui avait proposé une place de son choix dans le Gouvernement qui a suivi les législatives de 1998. Si travailler pour l’élection de Tanor est considéré comme un effort de faire revenir le PS, il devrait objectivement en être de même pour Niasse. Les américains avaient chassé du pouvoir les républicains en 1976 après la rocambolesque affaire du Watergate. Ils avaient choisi «Jimmy Who?»(Jimmy l’inconnu) à la place de Gerald Ford pour sanctionner les violeurs de leur Constitution. Ils ont voté massivement pour Ronald Reagan en 1980. Les républicains qui avaient bien appris leur leçon ont fait un si bon travail aux yeux des américains qu’ils les ont maintenu au pouvoir de 1980-1992.
Le seul pêché d’Ousmane Tanor Dieng est d’avoir hérité de la direction d’un parti politique qui avait trop duré au pouvoir. Beaucoup oublient, ou ne savent pas, que Mr Dieng n’a commencé à occuper des fonctions importantes au sein du Parti socialiste qu’au milieu des années 90. Le mérite que toute personne objective doit cependant lui reconnaître, c’est d’avoir transformé le PS de 2000 en une organisation politique qui attire des intellectuels de haut calibre dont l’engagement pour la cause du socialisme démocratique ne saurait souffrir l’ombre d’un doute objectif.
Ousmane Tanor Dieng a un handicap majeur qu’il partage avec Abdoulaye Bathily qui, de mon point de vue, aurait pu être un excellent Président du Sénégal. Il leur manque la capacité de faire transparaître une chaleur humaine durant leur interaction avec le public. Ils sont tous les deux perçus par ceux et celles qui n’ont jamais eu la chance de les avoir approchés, comme des individus froids et distants. Comme je le disais à Pierre Sané dans la note où je le félicitais d’avoir rejoint Tanor; «Ousmane Tanor Dieng est un des hommes politiques les plus incompris du Sénégal. Son honnêteté et son STYLE DIRECT s'accommodent très mal avec le MASLA Sénégalais. C'est d’ailleurs pour cela que beaucoup le perçoivent comme un ARROGANT alors qu’il est bien loin de l’être. Tanor est une des rares personnalités politiques sénégalaises qui ne font jamais des promesses qu'ils ne sont pas sûrs de pouvoir tenir». Tanor est victime de son background culturel serer. Sa ligne de conduite est dictée au quotidien par les philosophies serer du «Caaxaan faaxee » et du «o koor jom fo fula».
Georges Clemenceau disait que; «La politique c’est l’art du possible». Le seul candidat qui a aujourd’hui à sa disposition un appareil politique capable de faire face au PDS et Me Wade est Ousmane Tanor Dieng. La présence du PS dans tous les recoins du pays donne à Mr Dieng les moyens de pouvoir bénéficier du Vote Utile de ceux et celles qui en ont marre de voir le Sénégal continuer sa chute libre vers l’incertain. Ceux et celles qui ont pratiqué Ousmane Tanor Dieng, savent qu’il est loyal dans ses engagements et va plutôt préférer mourir que décevoir si les Sénégalaises et Sénégalais lui confient la responsabilité de présider les destinées de notre pays. Ce que je connais personnellement de ce fils de Nguéniène me laisse croire qu’il fera de l’accomplissement de cette mission sa raison de vivre. C’est un homme de devoir et de responsabilité. Le Jom sénégalais, fortement ancré en lui, sera le phare qui va guider le choix du comportement qu’il va exiger des membres de l’équipe qu’il va diriger.
Diomaye (Ndongo) Faye,
Ancien coordinateur du directoire de Campagne de la CA2000/FAL en Amérique du Nord
Ancien Coordinateur du Mouvement pour les Assises de la Gauche(MAG)
Membre du Directoire de campagne d’Abdoulaye Bathily en 2007
Chercheur en stratégie de développement politique
New Jersey, USA
Cilawkuut@cs.com