Sanctionner Macky ou Préserver la démocratie ? (par Fallou Guèye)

Jeudi 17 Mars 2016 23:33


La campagne référendaire a démarré avec deux camps bien distincts. Celui du OUI et celui du NON. Ils sont nettement séparés par un écran qui empêche aux simples citoyens d’accéder à la vérité pour choisir le pour ou le  contre. Le camp du NON développe une stratégie de campagne fondée sur l’agitation émotionnelle, les valeurs morales, l’éthique, le non respect de la parole donnée par Macky. Avec tout l’argumentaire tiré de notre culture qui réprimande le non respect de la parole donnée, d'une part ; et d’autre part avec l’interprétation de l’avis ou décision du Conseil Constitutionnel, ils perturbent l’esprit des honnêtes gens en semant le doute, la méfiance, la confusion et même l’intoxication. Et avec eux, ceux qui jugent que le Conseil Constitutionnel a rendu un avis non conforme et non une décision. Ils arrivent tous à la même conclusion logique du NON ou du boycott /abstention du référendum. Ainsi, l’émotion comme le juridisme deviennent les deux faces de la même réalité négative. Et dans cette perspective, la personne de Macky qui aurait des intentions inavouées, des pièges cachés, est fortement présente dans les esprits. Le spectre de la dépénalisation de l’homosexualité, de la possibilité d’un troisième mandat, de la suppression du deuxième tour etc. est agité pour faire peur aux électeurs peu avertis.
Le véritable débat autour de la simple question du référendum, à savoir si les quinze points de révision constitutionnelle sont une avancée ou un recul pour notre démocratie n’est pas posé ? Apprécier le comportement de Macky Sall, faire son bilan, ou discutailler sur les notions juridiques de décision et d’avis ou bien apprécier l’opportunité ou non de la tenue du référendum est beaucoup plus évoqué. Et l’analphabétisme et l’ignorance aidant, la confusion s’installe facilement dans les populations qui sont manipulées afin de satisfaire des intérêts politiciens qui ne sont pas du tout les leurs. Et ainsi, la stratégie n’est plus dans la recherche de la réponse à la question du référendum mais dans celle de la conquête du pouvoir par la déstabilisation. Rendre illégitime le pouvoir de Macky Sall par un NON massif pour le pousser à la démission devient désormais le but ; et tous les moyens sont utilisés pour y arriver. Pour s’en convaincre, il suffit simplement d’interroger leur mentor Abdoulaye Wade dont la déclaration dans la presse en la personne de son conseiller Pape Samba Mboup faisant état de sa disponibilité à diriger un gouvernement d’union nationale en dit long. Interrogeons aussi  Idrissa Seck qui est allé dans le même sens en clamant tout haut dans la presse que “la seule chose qu’on demande à Macky Sall, c’est de quitter la tête de notre pays” (dixit). Et la dernière déclaration en date est celle du groupe qui s’appelle “TERMINUS 2017” qui, dans son manifeste-plan en 5 points affirme clairement son objectif de terminer le mandat de Macky Sall en 2017, alors que le même groupe avait au préalable sorti une déclaration dans laquelle il appelait à voter OUI sur la base des 15 points du référendum.
En tous cas, ils font tomber les masques et révèlent au grand jour la véritable face du PDS et Cie. qui se démènent pour conquérir le paradis perdu car la descente aux enfers a trop duré. Alors, penser un seul instant que le référendum i.e. le renforcement de la démocratie de ce pays les intéresse est une faute politique inadmissible. Car, il ne fait l’ombre d’aucun doute que ces réformes constituent bel et bien une avancée si minime soit elle. Ce n’est point du Wadisme avec son troisième mandat. 
Elles sont certes insuffisantes pour un renforcement plus approfondi de notre démocratie qui consacre la confiance du peuple dans sa justice par une indépendance plus grande de celle-ci vis-à-vis de l’exécutif. Mais, si l’approfondissement de l’État de droit est compris comme une lutte continue de conquêtes démocratiques progressives, nul ne devrait rejeter ces acquis qui sont le résultat de plusieurs années de lutte, de sacrifices de vies humaines dont le momentum le plus récent a été le 23 juin 2011.  La personne de Macky Sall, le messager, est beaucoup moins importante que ces réformes, le message. S’obscurcir l’esprit par un débat de personne et sanctionner négativement le messager, et avec lui, notre démocratie c’est aussi une faute politique grave avec des conséquences irréparables. Distinguer le messager du message, c’est sortir la personne de Macky Sall de la question référendaire pour y répondre avec lucidité. L’attitude maximaliste est aussi dangereuse que l’extrémisme qui exige TOUT ou RIEN. Il est indéniable que ces réformes ne répondent pas totalement à nos attentes, i.e. celles du peuple des Assises mais, la situation concrète des rapports de force étant ce qu’elle est, est-ce réaliste d’observer une attitude infantile de l’idéologisme ?
 Cet acquis du peuple (la révision constitutionnelle) doit être sauvegardé en tant qu’une conquête dans sa longue lutte pour la démocratie et le pain.  Voter NON ou Boycotter c’est alors s’en prendre à Macky pour le sanctionner, un vote-sanction alors ; et dans ce cas, on commet l’erreur de jeter l’eau du bain avec le bébé. Or, l’esprit de discernement, l’analyse concrète de la situation concrète nous recommande de voter OUI pour nous débarrasser de la constitution de 2001 du septennat et refuser aussi à Macky et à ces successeurs de tripatouiller la constitution à sa/leur guise. N’était-ce pas le combat de toutes les forces populaires de ce pays, du 23 juin, notamment dans le pays comme dans la diaspora ? Que OUI. Ne luttions-nous pas pour un mandat de cinq ans, pour plus de devoirs au citoyen ? Qui ose penser, un seul instant, que ces 15 points sapent les bases de la démocratie ? Personne.
Alors, sortir de l’émotion, du ressentiment de la déception, de la trahison pour ne considérer que la réalité politique qui est le seul juge valable est l’exigence du moment. Et tous ceux qui ont à cœur le renforcement de notre démocratie doivent se faire violence et se démarquer de la confusion sciemment entretenue par les activistes politiciens, obsédés par le pouvoir. Oublions notre EGO personnel pour nous inscrire dans la dynamique de soutenir ce qui est progressiste. Ni la personne de Macky ni son bilan ne sont en jeu, dans ce référendum, mais plutôt l’amélioration de notre démocratie.
Le PDS et ses alliés sont bien dans leur logique du rejet de ces réformes pour, d’une part garder jalousement leur constitution, œuvre de Wade, mais aussi pour ne donner aucun crédit à Macky. Car, ce serait des points contre eux pour les compétitions électorales à venir. Rien que du calcul politicien ! Ils ne sont pas seuls dans cette posture électoraliste. Le camp du NON grouille de politiciens victimes du virus de l’électoralisme, de potentiels candidats aux futures joutes électorales. Ils saisissent cette opportunité pour se dresser contre le pouvoir, le fragiliser dès à présent et par là même commencer la campagne électorale pour les législatives de 2017 et les présidentielles de 2019, s’ils ne réussissent pas leur plan de déstabilisation du régime en place.
A côté de ces électoralistes défaitistes on trouve quelques champions de la société dite civile. Pourquoi ? C’est parce que cette société dite civile est soit embarquée ou simplement plus politicienne que les politiques eux- mêmes. En effet, comment s’expliquer la passion et surtout la promptitude avec laquelle, ils (ces chefs de la société dite civile) ont rejeté Macky et les quinze points du référendum ? C’est à la minute qui a suivi la déclaration de Macky sur les plateaux de télé et dans les journaux, au moment où les partis politiques prenaient le temps de la réflexion et du débat à l’interne pour en délibérer en convoquant leurs instances. Décidément, qui doit se plaindre de l’absence de démocratie dans les organisations ?
Enfin, comment peut-on évoquer l’économie des ressources financières pour s’opposer à la tenue du référendum ? Vaut mieux prévenir que guérir, dit-on. Les drames regrettables causés par le manque de démocratie, le non respect de la limitation et/ou de la durée du mandat présidentiel en Afrique devrait nous convaincre que la stabilisation de nos institutions n’a pas de prix. C’est l’état de bonne santé de tous les pays développés ; c’est la paix sans laquelle tout projet de développement est voué à l’échec. 
Bref, tous les démocrates sincères de ce pays qui ont combattu pour des institutions fortes et dont la seule préoccupation est de défendre la démocratie et les intérêts du peuple doivent voter OUI et appeler à voter Oui pour le seul et unique souci d’améliorer notre démocratie. L’impératif est de découvrir, dans cet écran-confusion, ce qui sert la démocratie et de jouer notre rôle de soutenir de tout ce qui va dans le sens du progrès. Votez OUI n’est nullement voter pour Macky, mais c’est voter pour la démocratie!!!

Fallou Guèye
RTA-S/ Péncoo Réew


Yusufa Niang

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