DAKARACTU.COM - C’est le jour de sa déclaration de candidature que les plus jeunes des Sénégalais ont découvert cet homme au teint noir foncé, à la chevelure généreuse, au regard de félin, au français châtié et au wolof du patelin. Ibrahima Fall, car c’est de lui qu’il s’agit, est sorti de l’écran-radar des Sénégalais depuis 1992, quand il a quitté notre pays pour devenir sous-secrétaire général aux Droits de l’homme de l’Onu et directeur général adjoint de l’Office des Nations unies à Genève. Au bout d’une carrière qu’il a commencée comme assistant en droit public à l’université d’Amiens en 1969 et qu’il a terminée en qualité de président du Groupe international de contact sur la Guinée en 2010, en passant par de nombreuses péripéties, Ibrahima Fall s’estime aujourd’hui prêt, à 69 ans révolus, à assumer la plus haute fonction de l’Etat. On le croirait si la capacité à diriger un pays se mesurait au nombre de lignes sur le curriculum vitae de celui qui y aspire. Il a, en effet, tout été ou presque, en une vie passée à pas de charge : assistant à l’université d’Amiens ; chargé d’enseignement, maître de conférences agrégé et professeur agrégé titulaire à l’université de Dakar ; doyen de la faculté des sciences juridiques et économiques ; ministre de l’Enseignement supérieur ; ministre des Affaires étrangères ; sous-secrétaire général aux droits de l’homme de l’Onu et directeur général adjoint de l’Office des Nations unies à Genève ; sous-secrétaire général aux affaires politiques de l’Onu à New York chargé des affaires politiques africaines ; sous-secrétaire général et représentant spécial du secrétaire général de l’Onu pour la Région des Grands Lacs ; représentant spécial du président de la commission de l’Union africaine pour la Guinée…
« Pendant toutes ces années où il goûtait au confort douillet de la vie de fonctionnaire international, on ne l’avait jamais entendu, pas même une fois, se prononcer sur les difficultés croissantes des Sénégalais, s’indigne la députée Ndéye Fatou Touré. C’est cela qui me gêne dans la candidature de ce nouveau venu qui découvre subitement que nos compatriotes souffrent de tous les maux du monde. »
Ibrahima Fall invoque son obligation de réserve dans sa vie passée d’employé des Nations unies pour expliquer son mutisme tout au long des dix-neuf années écoulées. Ce retraité a choisi son timing pour se jeter dans la mare à crocodiles de la politique, même si son nom revient sans cesse depuis des années comme alternative aux politiques qui dirigent le pays.
Mais il a pris le temps de bien consulter avant de se jeter dans l’aventure. En dehors des autorités religieuses et coutumières du pays (ses contacts très hauts placés à Touba et à son Tivaouane natal notamment), il a rencontré plusieurs leaders d’opinion, de mouvements de jeunesse, d’associations de femme… Il a également parlé à de nombreuses personnalités étrangères. Son long parcours à l’étranger l’a doté d’un épais carnet d’adresses. Ibrahima Fall est l’un des rares candidats en lice aujourd’hui capable de joindre quand il veut Ban Ki-moon, le secrétaire général des Nations-Unies, n’importe quel chef d’Etat africain de son choix, n’importe quel chef de la diplomatie en Europe ou aux Etats-Unis…
Il a d’ailleurs reçu récemment à Dakar et dans la plus grande discrétion une délégation de la Cour pénale internationale (CPI) et fait partie des personnes-ressources dont l’avis compte dans la résolution de nombre de conflits africains comme la crise ivoirienne.
Rien ne prédisposait à un tel destin ce fils d’un puisatier et d’une ménagère, qui porte le nom de Cheikh Ibra Fall, le principal disciple du guide des mourides, Cheikh Ahmadou Bamba. Baptisé avec de l’argent issu du « Maajaal » (« une sorte d’aumône collectée par son père qui fut Baye Fall »), il a réussi à se hisser au sommet par le biais de l’élitisme républicain secrété par l’école. Celui qui a été inscrit à l’école française par accident a enseigné à tous ceux qui font le Sénégal d’aujourd’hui : Souleymane Ndéné Ndiaye, Ousmane Ngom, Mamadou Lamine Loum, Ousmane Tanor Dieng, Abdoulaye Diop, Abdoulaye Baldé, Sada Ndiaye, Serigne Diop, Me Mame Adama Guéye, Me Boucounta Diallo, Me Nafissatou Diop…
Est-ce suffisant pour prétendre nous gouverner ? Ibrahima Fall, qui a fait sa rentrée politique le 24 septembre à Tivaouane, et se trouvait hier 26 à Ziguinchor, doit d’abord relever le défi de se faire connaître du Sénégalais lambda. Mais aussi et surtout des jeunes qui constituent le gros du corps électoral et qui ne le connaissent pas. S’il a une plus grande cybernotoriété (il a plus de 11 000 fans sur Facebook, plus que tous les candidats à l’exception de Cheikh Bamba Dièye), il doit commencer, pour plaire aux moins de 35 ans, par se couper les cheveux et parler un wolof moins terroir. Mais aussi faire un énorme travail de terrain. Le temps qui lui est imparti semble toutefois ne pas suffir pour lui permettre de mener tout ce travail politique. Ayant le profil de l’homme qui pouvait sortir le Sénégal de l’emprise des politiciens et le relancer sur de nouvelles bases, Ibrahima Fall semble ne pas s'être donné le temps ni les moyens politiques de son ambition.
« Pendant toutes ces années où il goûtait au confort douillet de la vie de fonctionnaire international, on ne l’avait jamais entendu, pas même une fois, se prononcer sur les difficultés croissantes des Sénégalais, s’indigne la députée Ndéye Fatou Touré. C’est cela qui me gêne dans la candidature de ce nouveau venu qui découvre subitement que nos compatriotes souffrent de tous les maux du monde. »
Ibrahima Fall invoque son obligation de réserve dans sa vie passée d’employé des Nations unies pour expliquer son mutisme tout au long des dix-neuf années écoulées. Ce retraité a choisi son timing pour se jeter dans la mare à crocodiles de la politique, même si son nom revient sans cesse depuis des années comme alternative aux politiques qui dirigent le pays.
Mais il a pris le temps de bien consulter avant de se jeter dans l’aventure. En dehors des autorités religieuses et coutumières du pays (ses contacts très hauts placés à Touba et à son Tivaouane natal notamment), il a rencontré plusieurs leaders d’opinion, de mouvements de jeunesse, d’associations de femme… Il a également parlé à de nombreuses personnalités étrangères. Son long parcours à l’étranger l’a doté d’un épais carnet d’adresses. Ibrahima Fall est l’un des rares candidats en lice aujourd’hui capable de joindre quand il veut Ban Ki-moon, le secrétaire général des Nations-Unies, n’importe quel chef d’Etat africain de son choix, n’importe quel chef de la diplomatie en Europe ou aux Etats-Unis…
Il a d’ailleurs reçu récemment à Dakar et dans la plus grande discrétion une délégation de la Cour pénale internationale (CPI) et fait partie des personnes-ressources dont l’avis compte dans la résolution de nombre de conflits africains comme la crise ivoirienne.
Rien ne prédisposait à un tel destin ce fils d’un puisatier et d’une ménagère, qui porte le nom de Cheikh Ibra Fall, le principal disciple du guide des mourides, Cheikh Ahmadou Bamba. Baptisé avec de l’argent issu du « Maajaal » (« une sorte d’aumône collectée par son père qui fut Baye Fall »), il a réussi à se hisser au sommet par le biais de l’élitisme républicain secrété par l’école. Celui qui a été inscrit à l’école française par accident a enseigné à tous ceux qui font le Sénégal d’aujourd’hui : Souleymane Ndéné Ndiaye, Ousmane Ngom, Mamadou Lamine Loum, Ousmane Tanor Dieng, Abdoulaye Diop, Abdoulaye Baldé, Sada Ndiaye, Serigne Diop, Me Mame Adama Guéye, Me Boucounta Diallo, Me Nafissatou Diop…
Est-ce suffisant pour prétendre nous gouverner ? Ibrahima Fall, qui a fait sa rentrée politique le 24 septembre à Tivaouane, et se trouvait hier 26 à Ziguinchor, doit d’abord relever le défi de se faire connaître du Sénégalais lambda. Mais aussi et surtout des jeunes qui constituent le gros du corps électoral et qui ne le connaissent pas. S’il a une plus grande cybernotoriété (il a plus de 11 000 fans sur Facebook, plus que tous les candidats à l’exception de Cheikh Bamba Dièye), il doit commencer, pour plaire aux moins de 35 ans, par se couper les cheveux et parler un wolof moins terroir. Mais aussi faire un énorme travail de terrain. Le temps qui lui est imparti semble toutefois ne pas suffir pour lui permettre de mener tout ce travail politique. Ayant le profil de l’homme qui pouvait sortir le Sénégal de l’emprise des politiciens et le relancer sur de nouvelles bases, Ibrahima Fall semble ne pas s'être donné le temps ni les moyens politiques de son ambition.