Migration Circulaire Espagne-Sénégal : entre espoir et chaos organisationnel


Le programme de migration Circulaire Espagne-Sénégal, lancé le 23 janvier 2025, suscite à la fois espoir et frustration. Conçu pour offrir à des Sénégalais des opportunités de travail saisonnier en Espagne tout en garantissant leurs droits, ce projet ambitieux initié par le Ministère de l’Intégration africaine et des Affaires étrangères constitue une avancée significative dans la gestion de la migration légale. Cependant, les dysfonctionnements observés lors de son lancement risquent d’éclipser son potentiel.

Ce programme marque une nouvelle ère pour la jeunesse sénégalaise, confrontée à un marché de l’emploi local souvent saturé. Il ouvre des perspectives de valorisation professionnelle à l’international et promet d’améliorer les conditions de vie des bénéficiaires grâce à des revenus supplémentaires.

Toutefois, cette initiative, pourtant louable, a rapidement été entachée par des difficultés organisationnelles, révélant des lacunes structurelles et administratives qui ternissent son image.

Les premières phases de candidature ont donné lieu à des scènes de chaos. Des files d’attente interminables ont envahi les tribunaux, où les candidats se pressaient pour obtenir leurs casiers judiciaires. Une situation similaire a été observée dans les Bureaux d’Accueil, d’Orientation et de Suivi (BAOS), débordés par l’afflux massif de postulants.

Ces scènes, largement relayées sur les réseaux sociaux, ont alimenté des critiques acerbes sur la gestion du programme. À l’heure où la digitalisation est censée être un pilier des politiques publiques, ces images renvoient un signal inquiétant sur l’état de la modernisation administrative au Sénégal.

Face à cette situation, le Collectif des organisations de la société civile pour des procédures de visa justes et équitables a interpellé l’État sénégalais. Dans une déclaration publique, il a recommandé une réforme urgente du processus, axée sur la digitalisation et une transparence accrue.

La création d’une plateforme numérique pour le dépôt des candidatures et le suivi des dossiers en temps réel.
Des sessions d’information pour mieux orienter les candidats.
Une assistance technique pour ceux qui rencontrent des difficultés avec les outils numériques.
Un processus de sélection à plusieurs niveaux (départemental, régional et national) pour garantir une meilleure équité.
Une publication claire des résultats pour dissiper tout soupçon de favoritisme.
Ces réformes permettraient de fluidifier le processus et de réduire les frustrations des candidats tout en renforçant la crédibilité du programme.

Au-delà des ajustements nécessaires, ce programme représente une opportunité pour le Sénégal de s’imposer comme un modèle de gestion de la migration circulaire. Mais pour y parvenir, une meilleure coordination entre les différents ministères, sous l’égide du Ministère du Travail et du Comité Interministériel de Lutte contre l’Émigration Irrégulière (CILMI), est indispensable.

De plus, une collaboration étroite avec la société civile pourrait enrichir le programme en apportant des perspectives diversifiées et des solutions pratiques aux problèmes rencontrés.

Le programme de Migration Circulaire Espagne-Sénégal est une chance pour de nombreux jeunes, mais il symbolise aussi un défi de gouvernance pour l’État sénégalais. Réussir sa mise en œuvre pourrait non seulement améliorer les conditions de vie des bénéficiaires, mais aussi renforcer l’image du Sénégal sur la scène internationale en matière de gestion migratoire.
 
 
Mercredi 29 Janvier 2025
Amadou Koundour 



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