Le 31 janvier 2012, l’Histoire retiendra que trois évènements majeurs s’étaient déroulés au Sénégal : la formidable mobilisation populaire et citoyenne contre un Projet de Coup d’Etat Constitutionnel sur fond de Programme de dévolution monarchique du pouvoir ; la violence institutionnelle, impulsive et engagée, traduction d’une Terreur d’Etat activée ; enfin, la position lucide et patriotique de la haute hiérarchie maraboutique de Léona Niassène.
Si, tout au cours de l’évolution des sociétés humaines, un rapport dialectique lie l’oppression à la résistance, pour trouver en l’expérience sénégalaise, une parfaite illustration, force est d’avouer que la position de la Famille Religieuse des Niassène sur la grande question nationale de l’heure, est d’une grande portée idéologique, sociale et politique.
Ils sont, en effet, nombreux, les exemples attestant de la connivence structurelle du pouvoir politique avec les Ordres Religieux. La quasi – totalité des pouvoirs non – démocratiques, voire certains pouvoirs démocratiques même, ont fait des hiérarques religieux, des appendices, des relais idéologiques indispensables au maintien de leur domination sur les Classes populaires. Du reste, cette situation ténue sous tous les cieux du monde, a nourri des postures philosophiques de rejet de la Religion généralement considérée comme « l’opium du peuple, le cœur d’un monde sans cœur, le soupir de la créature affamée » ! (Karl MARX).
C’est ce même rejet qui explique que la plupart des Révolutions qui ont scandé l’Histoire, auront été profondément « anti – cléricales », particulièrement en Europe. La Loi de 1905 séparant, officiellement, en France, l’Eglise de l’Etat, instaurant de fait la Laïcité de l’Etat, dans des conditions émotionnelles rarement vécues dans ce pays, entre dans cette perspective. Tout cela est bien connu, pour ne point mériter davantage de développement.
Mais, au Sénégal, les acrimonies de notre trajectoire historique nationale, exigent un traitement singulier de la « question religieuse », surtout que celle – ci imprègne, très fortement, le vécu social quotidien de l’écrasante majorité de nos compatriotes.
Bien avant l’expansion fulgurante de l’Islam en Afrique Occidentale, les pouvoirs aristocratiques traditionnels sollicitaient, dans leur périmètre décisionnel, les avis de Marabouts exclusivement à leurs services. Cet « Islam de Cour » traduisait, de fait, une double réalité : la montée en puissance de l’Islam, d’une part et, d’autre part, le besoin de légitimation idéologique de pouvoirs confrontés à des contraintes (tant internes, qu’externes) majeures ! A côté de cet « Islam officiel », se développait, progressivement, un « Islam social » érodant les fondements de ces pouvoirs et porteur d’espérances fortes.
Du reste, c’était un vrai retour aux Valeurs fondatrices de l’Islam, sans aucun doute « la plus terrestre des Religions Révélées ».
Aussi, contrairement à une idée faussement et savamment distillée, l’Islam ne tardera pas à porter les profondes aspirations populaires, à prendre la direction des révoltes sociales et du mouvement historique de résistance des peuples contre la pénétration Européenne dans notre Sous – Région.
Il est ainsi, historiquement irréfutable, que les plus grandes résistances armées à la pénétration armée des puissances coloniales en Afrique, portent l’empreinte indélébile de l’Islam, à travers d’illustres représentants meublant aujourd’hui encore, plus d’un siècle après, la mémoire collective de nos peuples. Les grandes figures de SHAYKU Umar TALL, de l’Almamy Samory TOURE, de Maba DIAKHOU BÂ Almamy du BADIBOU, d’Ahmadou TALL…, renvoient aux plus belles pages de luttes des peuples de notre Sous – Région, contre la pénétration coloniale européenne. En vérité, ils situaient leurs actions dans le sillage de l’épopée héroïque du Prophète Muhammad Ibn Abdallah (PSL) qui conquit militairement la Mekke en 630 ap. JC et dans celles de ses plus proches Compagnons qui firent du DJAZIRAT AL ARAB, le noyau central de l’Islam. Du reste, le titre général porté par les Résistants Musulmans (« Almamy » ou « Emir des Croyants), renseigne sur leur niveau particulièrement élevé de la pratique du culte et de la gestion du pouvoir. « Almamy », autrement dit « Imam », dans la tradition musulmane originelle, est une reproduction, à une échelle inférieure, de la « UMMA » telle que pensée, organisée et dirigée par le Prophète Muhammad PSL) lui – même. A savoir, en lui, sont fusionnés les pouvoirs temporel et spirituel.
La victoire armée des Européens, n’a guère permis la modélisation de la « UMMA » en Afrique Occidentale. L’impossible construction d’un cadre unitaire structurant dans un espace totalement contrôlé par un conquérant armé d’une Religion autre, favorisa, entre autres facteurs, la fragmentation du dispositif. L’absence d’un centre unique de référence et de direction, allait, inexorablement, conduire à l’avènement des Confréries. Celles – ci, étaient d’emblée combattues par le pouvoir colonial instruit par les expériences guerrières des Résistances musulmanes, surtout que leurs porte – étendards s’opposaient, sur maints aspects, à l’ordre colonial. Les Résistances dites « Culturelles» d’un Cheikh Ahmadou Bamba MBACKE dans les campagnes et d’un El Hadji Malick SY dans les Villes, en attestent pleinement. La radicalité du discours ou du comportement, poussa le pouvoir colonial à prendre des mesures d’une extrême brutalité, illustrées par les deux Exils imposés à Cheikh Ahmadou Bamba et par la scélérate Loi de 1903 règlementant les Ecoles Coraniques visant, principalement, El Hadji Malick SY!
Il est vrai que pour de multiples raisons, le pouvoir colonial accepta de s’accommoder du fait social et idéologique profondément ancré au cœur de la vie des populations, que constituaient les Confréries. C’était le résultat d’un constat tiré d’un vécu conflictuel dont l’un des plus grands épisodes fut, en 1940, le refus historique de Cheikh Anta MBACKE (frère d’Ahmadou Bamba) de se soumettre aux injonctions coloniales !
La pacification des rapports entre le pouvoir colonial et les forces maraboutiques organisées en Confréries, rendit possible la collaboration entre les Elites politiques Sénégalaises de l’époque avec ces dernières. Nul besoin d’entrer, à cet effet, dans les détails des rapports que tant SENGHOR, DIOUF que WADE, entretenaient ou entretiennent encore, avec les Confréries, singulièrement avec leurs hiérarchies, à la recherche d’un « NDIGËL » garant de leur maintien au pouvoir!
Mais, aujourd’hui, le contexte historique, social et politique a changé. Les mutations qui affectent la sphère mondiale et la société sénégalaise, déteignent sur la dynamique interne de toutes les Confréries. Au sein de celles – ci, de « nouvelles Elites » imprégnées d’Islam Orthodoxe ou diplômées des grandes Ecoles d’Occident, du Japon ou de Chine, affirment leurs voix qu’elles associent à celles de la citoyenneté en pleine ascension, pour exiger un nouvel ordre socioéconomique, voire politique.
Pourtant, cette aspiration à la préservation de la cohésion nationale et de la paix civile, est également présente dans de nombreux cercles religieux, fondamentalement attachés aux Valeurs de l’Islam. C’est, précisément, sous cet angle, qu’il faut appréhender la grande sortie de la hiérarchie religieuse de LEONA NIASSENE. Elle est proprement inédite dans l’Histoire politique et sociale de notre pays. Jamais, auparavant, une Confrérie, à ce niveau hiérarchique, n’avait attaqué aussi justement et aussi clairement, un pouvoir en place dont elle est l’un des supports incontestés. En exigeant du Président de la République, qu’il « rende le tablier », au motif que le peuple ne veut plus de lui, la hiérarchie de LEONA a pris faits et causes pour la vérité. Elle a montré que l’Islam n’est guère partisan de la passivité et de la fatalité. Qu’il est, tout au contraire, une arme acérée entre les mains des populations. Il est clair que la brèche ouverte par LEONA sera transformée en un vaste boulevard que d’autres amis et disciples de l’Islam ne tarderont pas à emprunter! Ce sera, dans tous les cas, au grand bonheur de notre vaillant peuple !
Prof Malick Luc SARR
asmilksarr@yahoo.fr
Si, tout au cours de l’évolution des sociétés humaines, un rapport dialectique lie l’oppression à la résistance, pour trouver en l’expérience sénégalaise, une parfaite illustration, force est d’avouer que la position de la Famille Religieuse des Niassène sur la grande question nationale de l’heure, est d’une grande portée idéologique, sociale et politique.
Ils sont, en effet, nombreux, les exemples attestant de la connivence structurelle du pouvoir politique avec les Ordres Religieux. La quasi – totalité des pouvoirs non – démocratiques, voire certains pouvoirs démocratiques même, ont fait des hiérarques religieux, des appendices, des relais idéologiques indispensables au maintien de leur domination sur les Classes populaires. Du reste, cette situation ténue sous tous les cieux du monde, a nourri des postures philosophiques de rejet de la Religion généralement considérée comme « l’opium du peuple, le cœur d’un monde sans cœur, le soupir de la créature affamée » ! (Karl MARX).
C’est ce même rejet qui explique que la plupart des Révolutions qui ont scandé l’Histoire, auront été profondément « anti – cléricales », particulièrement en Europe. La Loi de 1905 séparant, officiellement, en France, l’Eglise de l’Etat, instaurant de fait la Laïcité de l’Etat, dans des conditions émotionnelles rarement vécues dans ce pays, entre dans cette perspective. Tout cela est bien connu, pour ne point mériter davantage de développement.
Mais, au Sénégal, les acrimonies de notre trajectoire historique nationale, exigent un traitement singulier de la « question religieuse », surtout que celle – ci imprègne, très fortement, le vécu social quotidien de l’écrasante majorité de nos compatriotes.
Bien avant l’expansion fulgurante de l’Islam en Afrique Occidentale, les pouvoirs aristocratiques traditionnels sollicitaient, dans leur périmètre décisionnel, les avis de Marabouts exclusivement à leurs services. Cet « Islam de Cour » traduisait, de fait, une double réalité : la montée en puissance de l’Islam, d’une part et, d’autre part, le besoin de légitimation idéologique de pouvoirs confrontés à des contraintes (tant internes, qu’externes) majeures ! A côté de cet « Islam officiel », se développait, progressivement, un « Islam social » érodant les fondements de ces pouvoirs et porteur d’espérances fortes.
Du reste, c’était un vrai retour aux Valeurs fondatrices de l’Islam, sans aucun doute « la plus terrestre des Religions Révélées ».
Aussi, contrairement à une idée faussement et savamment distillée, l’Islam ne tardera pas à porter les profondes aspirations populaires, à prendre la direction des révoltes sociales et du mouvement historique de résistance des peuples contre la pénétration Européenne dans notre Sous – Région.
Il est ainsi, historiquement irréfutable, que les plus grandes résistances armées à la pénétration armée des puissances coloniales en Afrique, portent l’empreinte indélébile de l’Islam, à travers d’illustres représentants meublant aujourd’hui encore, plus d’un siècle après, la mémoire collective de nos peuples. Les grandes figures de SHAYKU Umar TALL, de l’Almamy Samory TOURE, de Maba DIAKHOU BÂ Almamy du BADIBOU, d’Ahmadou TALL…, renvoient aux plus belles pages de luttes des peuples de notre Sous – Région, contre la pénétration coloniale européenne. En vérité, ils situaient leurs actions dans le sillage de l’épopée héroïque du Prophète Muhammad Ibn Abdallah (PSL) qui conquit militairement la Mekke en 630 ap. JC et dans celles de ses plus proches Compagnons qui firent du DJAZIRAT AL ARAB, le noyau central de l’Islam. Du reste, le titre général porté par les Résistants Musulmans (« Almamy » ou « Emir des Croyants), renseigne sur leur niveau particulièrement élevé de la pratique du culte et de la gestion du pouvoir. « Almamy », autrement dit « Imam », dans la tradition musulmane originelle, est une reproduction, à une échelle inférieure, de la « UMMA » telle que pensée, organisée et dirigée par le Prophète Muhammad PSL) lui – même. A savoir, en lui, sont fusionnés les pouvoirs temporel et spirituel.
La victoire armée des Européens, n’a guère permis la modélisation de la « UMMA » en Afrique Occidentale. L’impossible construction d’un cadre unitaire structurant dans un espace totalement contrôlé par un conquérant armé d’une Religion autre, favorisa, entre autres facteurs, la fragmentation du dispositif. L’absence d’un centre unique de référence et de direction, allait, inexorablement, conduire à l’avènement des Confréries. Celles – ci, étaient d’emblée combattues par le pouvoir colonial instruit par les expériences guerrières des Résistances musulmanes, surtout que leurs porte – étendards s’opposaient, sur maints aspects, à l’ordre colonial. Les Résistances dites « Culturelles» d’un Cheikh Ahmadou Bamba MBACKE dans les campagnes et d’un El Hadji Malick SY dans les Villes, en attestent pleinement. La radicalité du discours ou du comportement, poussa le pouvoir colonial à prendre des mesures d’une extrême brutalité, illustrées par les deux Exils imposés à Cheikh Ahmadou Bamba et par la scélérate Loi de 1903 règlementant les Ecoles Coraniques visant, principalement, El Hadji Malick SY!
Il est vrai que pour de multiples raisons, le pouvoir colonial accepta de s’accommoder du fait social et idéologique profondément ancré au cœur de la vie des populations, que constituaient les Confréries. C’était le résultat d’un constat tiré d’un vécu conflictuel dont l’un des plus grands épisodes fut, en 1940, le refus historique de Cheikh Anta MBACKE (frère d’Ahmadou Bamba) de se soumettre aux injonctions coloniales !
La pacification des rapports entre le pouvoir colonial et les forces maraboutiques organisées en Confréries, rendit possible la collaboration entre les Elites politiques Sénégalaises de l’époque avec ces dernières. Nul besoin d’entrer, à cet effet, dans les détails des rapports que tant SENGHOR, DIOUF que WADE, entretenaient ou entretiennent encore, avec les Confréries, singulièrement avec leurs hiérarchies, à la recherche d’un « NDIGËL » garant de leur maintien au pouvoir!
Mais, aujourd’hui, le contexte historique, social et politique a changé. Les mutations qui affectent la sphère mondiale et la société sénégalaise, déteignent sur la dynamique interne de toutes les Confréries. Au sein de celles – ci, de « nouvelles Elites » imprégnées d’Islam Orthodoxe ou diplômées des grandes Ecoles d’Occident, du Japon ou de Chine, affirment leurs voix qu’elles associent à celles de la citoyenneté en pleine ascension, pour exiger un nouvel ordre socioéconomique, voire politique.
Pourtant, cette aspiration à la préservation de la cohésion nationale et de la paix civile, est également présente dans de nombreux cercles religieux, fondamentalement attachés aux Valeurs de l’Islam. C’est, précisément, sous cet angle, qu’il faut appréhender la grande sortie de la hiérarchie religieuse de LEONA NIASSENE. Elle est proprement inédite dans l’Histoire politique et sociale de notre pays. Jamais, auparavant, une Confrérie, à ce niveau hiérarchique, n’avait attaqué aussi justement et aussi clairement, un pouvoir en place dont elle est l’un des supports incontestés. En exigeant du Président de la République, qu’il « rende le tablier », au motif que le peuple ne veut plus de lui, la hiérarchie de LEONA a pris faits et causes pour la vérité. Elle a montré que l’Islam n’est guère partisan de la passivité et de la fatalité. Qu’il est, tout au contraire, une arme acérée entre les mains des populations. Il est clair que la brèche ouverte par LEONA sera transformée en un vaste boulevard que d’autres amis et disciples de l’Islam ne tarderont pas à emprunter! Ce sera, dans tous les cas, au grand bonheur de notre vaillant peuple !
Prof Malick Luc SARR
asmilksarr@yahoo.fr