L’ACCUSATION TRAQUE LA MAIN DE HABRÉ DANS LES ARCHIVES DE LA DDS


Le parquet général a fait recours, lundi, à l’expertise d’un graphologue qui a fouillé dans les archives de la Direction de la documentation et de la sécurité (DDS), considérée comme un instrument de terreur sous le règne de l’ancien président tchadien, pour déterminer si Hissène Habré est l’auteur des différentes fiches et correspondances adressées à cette structure. Le balai des témoignages se poursuit aux Chambres africaines extraordinaires (CAE) en ce début de la troisième semaine d’audience du procès M. Habré jugé pour crimes contre l’humanité, crimes de guerre et tortures devant cette juridiction spéciale.

Le Canadien Tobin Tanaka, spécialiste en vérification d’écritures, a désigné par le procureur des CAE comme témoin en sa qualité d’examinateur judiciaire de documents. Une pile de documents lui a été transmis par le parquet général pour un travail d’analyse et d’expertise graphologique sur les archives de la très réputée DDS. Canadien anglophone et revendiquant de 22 années d’expérience dans le domaine de l’analyse et d’examen de documents, M. Tanaka, la voix posée, a été assisté par deux interprètes sénégalais. 

Devant la barre, il s’est contenté de partager son expertise dont le rapport final a été compilé dans un document de 22 pages. ‘’Je ne suis pas là pour déterminer exactement l’auteur de ces documents. J’ai fait un travail d’examen graphologique sur la base de documents complexes et parfois à quantité insuffisante’’, a-t-il précisé. Après une présentation détaillée de son travail orienté de façon ‘’à ne pas déterminer une présomption de culpabilité ou d’innocence’’ de l’accusé, Tobin Tanaka a fait l’objet d’un interrogatoire de la part des différentes parties. Il a ainsi plus cherché la maîtrise de soi que de peser sur l’argumentaire de la défense ou de l’accusation.

‘’Il y a des types de documents sur lesquels vous avez travaillé : les écritures dites connues et les écritures en litige. Après votre travail d’expertise vous pouvez dire oui ou non que l’auteur des écritures connues est aussi celui des écritures en litige ?’’, demande le procureur général des CAE, Mbacké Fall.

‘’Nous pouvons dire que quelques aspects de notre travail pourraient laisser croire que l’auteur des écritures connues pourrait être aussi celui des écritures en litige, mais je ne peux pas confirmer avec exactitude que c’est le même auteur’’, répond Tobin Takana. L’expert canadien a pointé du doigt ‘’la mauvaise qualité de certaines copies, la petite quantité de document dont il disposait et la complexité des écritures’’ pour justifier la prudence adoptée quant à la détermination exacte de l’auteur des deux lots d’écritures (celles reconnues et celles dites en litige).

Après des questions d’ordre général de la partie civile, la défense a pris le relais de l’interrogatoire pour exprimer son doute sur la fiabilité de l’expertise graphologique. ‘’En médecine, on dit souvent que le résultat d’une analyse n’est jamais fiable à 100%. Qu’en est-il de l’analyse graphologique ?’’, charge Mbaye Sène l’un des avocats commis d’office pour défendre Hissène Habré.

‘’Je ne peux pas dire de façon précise le pourcentage de fiabilité. Mais sachez qu’en analyse et examen de documents, les spécialistes estiment la probabilité d’erreurs entre 2 et 6%’’, répond M. Tanaka. ‘’Merci, je suis satisfait’’, indique Me Sène.


Source Aps
Lundi 21 Septembre 2015
Ndèye Coumba FALL