ÉTAT CIVIL : Gratuité annoncée par le Premier ministre / Serigne Mbacké Mara rappelle que les volets 1 « ont toujours été gratuits » et que Touba perdrait 60 millions par an si tous les actes étaient visés…


« J’instruis le ministre de l’Urbanisme, des Collectivités territoriales et de l’Aménagement des Territoires, en relation avec les ministres chargés de la Justice et des Finances, d’examiner, dans les plus brefs délais, la possibilité de rendre gratuites toute déclaration de naissance, décès, mariage ou divorce, ainsi que tout jugement s’y rapportant. » Cette instruction émane du Premier ministre Ousmane Sonko et a été adressée au ministre de tutelle lors du dernier conseil des ministres.

Cette annonce a suscité des inquiétudes, des interrogations et des mises au point de la part de Serigne Mbacké Mara, officier d’état civil à la mairie de Touba et président de l’association « Solidarité Sans Frontières ». Dans un entretien exclusif accordé à DakarActu-Touba, le chef religieux souligne que cette mesure, présentée comme nouvelle, ne l’est pas en réalité. « Cela a toujours été ainsi. Le code de la famille a été très clair à ce sujet. Par conséquent, si c’est le volet 1 qui est visé par le Premier ministre, je tiens à signaler qu’il n’y a rien de nouveau. Les actes gratuits concernés sont les déclarations initiales de naissance, de décès, de mariage, les extraits de naissance et les copies littérales de mariage. J’ai trouvé nécessaire de le dire en tant que personne qui soutient le projet et qui souhaite sa réussite. »

Un manque à gagner de plus de 60 millions pour la mairie de Touba si…

Partant du postulat que le Premier ministre ne parlerait pas, naturellement, des actes déjà gratuits et prévus par le code de la famille, Serigne Mbacké Mara alerte le gouvernement sur d’éventuelles difficultés. « Si jamais ce sont les copies certifiées qui sont visées par le Premier ministre, je lui rappelle que ces documents nécessitent l’achat de timbres fiscaux, générant ainsi des recettes cruciales pour les communes. Touba pourrait alors faire face à un déficit annuel potentiel de 60 millions de FCFA. Une gratuité totale, si elle était étendue à tous les actes, nous priverait de cette somme, alors que nous avons déjà voté nos budgets, défini nos perspectives et ordonné des dépenses. Ce serait un risque financier majeur pour une ville dont le budget repose en partie sur ces timbres. »

L’ancien émigré poursuit : « Je prends l’exemple de la commune voisine de Mbacké, qui a traité 90 000 jugements d’état civil en 2017. Comment aurait-elle pu le faire si tout était gratuit ? Il en va de même pour les juridictions. Une généralisation de la gratuité impliquerait des coûts logistiques et humains colossaux pour les tribunaux, déjà sous-équipés. »


Numérisation : Une solution à sécuriser avant tout

« J’engage le ministre de l’Urbanisme, des Collectivités territoriales et de l’Aménagement des Territoires, en relation avec le ministère chargé du Numérique, à accélérer la digitalisation intégrale de l’état civil. » Voilà l’autre grande instruction du Premier ministre lors du dernier conseil des ministres.

À ce propos, Serigne Mbacké Mara soulève un autre défi : la numérisation des actes falsifiés ou contenant des données erronées. Il évoque un enjeu sécuritaire majeur. « Avant de numériser, il faut sécuriser les données personnelles. Sinon, un faux acte numérisé deviendrait un "vrai" officiel, avec des conséquences graves. Que ferait le véritable propriétaire de l’acte après coup ? » Pour lui, les priorités doivent être la sécurisation des données personnelles, l’indexation fiable, la vérification des archives existantes et la formation des agents. Il insiste sur la nécessité de ne pas agir à la hâte, estimant que même si « la volonté de gratuité répond à un impératif social, sa mise en œuvre exige un financement compensatoire pour les communes, un renforcement des tribunaux en moyens matériels, un personnel formé et une numérisation sécurisée pour éviter les fraudes. La gratuité ne doit pas se faire au détriment de la viabilité des communes ou de la sécurité juridique des citoyens. »
Mercredi 19 Mars 2025
Dakaractu



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