De l’humanitaire au scandale : le volontaire de la Croix-Rouge face à 7 ans de prison pour des faits troublants au Novotel


L’affaire qui a éclaboussé la Croix-Rouge et l’hôtel Novotel en pleine pandémie de Covid-19 revient sous les feux de l’actualité. Hier, la Chambre criminelle de Dakar a examiné le dossier de B.N., ancien volontaire de la Croix-Rouge et plombier de son état, accusé de viol sur une patiente confinée dans l’hôtel durant la crise sanitaire. Une affaire complexe où contradictions, zones d’ombre et éléments tangibles se mêlent, rendant le verdict incertain. L’Observateur, qui rapporte les détails de l’audience, revient sur cet épisode marquant.

 

Un contexte lourd : quand le drame frappe en pleine pandémie

 

En 2020, le Novotel de Dakar, réquisitionné pour accueillir les malades atteints du Covid-19, devient le théâtre d’un incident sordide. Mb.G., une patiente confinée, accuse B.N., un agent humanitaire censé veiller sur elle, de l’avoir violée dans sa chambre d’hôtel. À l’époque, cette accusation avait provoqué un tollé général, poussant le ministre de la Santé, Abdoulaye Diouf Sarr, à se constituer partie civile aux côtés de la victime.

 

Selon le témoignage de la plaignante, B.N., après avoir gagné sa confiance en se montrant attentif à ses besoins, serait entré de force dans sa chambre, l’aurait immobilisée sur le lit, et aurait utilisé un gant chirurgical comme préservatif pour commettre l’acte. Des propos glaçants que l’accusé a fermement niés.

 

Un récit troublant, mais incohérent

 

Face à la cour, la victime a relaté avec émotion les événements qui, selon elle, se seraient produits ce jour-là. Elle explique avoir tenté de contacter le service médical après les faits, sans succès. Cependant, son témoignage a été entaché par des contradictions notables, oscillant entre les accusations de viol et celles de tentative de viol.

 

Les avocats de la défense ont exploité ces incohérences pour fragiliser l’accusation, soulignant également l’absence de preuves physiques déterminantes. En effet, un certificat médical n’a révélé qu’une ancienne déchirure mineure non hémorragique, insuffisante pour établir de manière formelle un rapport sexuel non consenti.

 

Le parquet, cependant, a avancé une autre hypothèse : les incohérences dans le récit de la victime pourraient être liées à un traumatisme post-agression. « Les victimes de violences sexuelles présentent souvent des lacunes dans leur mémoire », a rappelé le procureur, demandant toutefois la requalification des faits en attentat à la pudeur et non en viol, et requérant une peine de 7 ans de prison ferme.

 

Une défense offensive et un verdict attendu

 

Pour sa part, l’accusé B.N. maintient fermement son innocence. Il affirme que sa seule interaction avec Mb.G. a été professionnelle, consistant à lui fournir son numéro en cas de besoin. « Je ne suis jamais entré dans sa chambre. Je restais toujours au seuil de la porte », a-t-il déclaré à la barre.

 

Son avocat a plaidé l’acquittement, arguant qu’en l’absence de preuves matérielles concluantes et avec un certificat médical non incriminant, l’accusation reposait davantage sur des suppositions que sur des faits établis.

 

Un scandale humanitaire aux retombées durables

 

Au-delà de ce cas individuel, cette affaire met en lumière la fragilité du système d’assistance mis en place en période de crise. Si le rôle des volontaires de la Croix-Rouge a été salué dans la gestion de la pandémie, cet incident jette une ombre sur les protocoles de sécurité et le contrôle des personnels intervenants dans des lieux aussi sensibles.

 

En attendant le délibéré prévu pour le 21 janvier, l’affaire reste un rappel douloureux des défis éthiques et humains rencontrés lors des moments de crise. Si la culpabilité de B.N. est confirmée, ce sera une tache indélébile non seulement pour l’accusé, mais aussi pour les institutions associées à cette affaire.

 

Selon L’Observateur, les yeux sont désormais rivés sur le verdict, qui pourrait clore une page sombre de la gestion de la pandémie au Sénégal, tout en laissant place à des débats sur la protection des victimes et la présomption d’innocence dans des contextes où les preuves restent difficiles à établir.

Mercredi 8 Janvier 2025
Dakaractu