Dans une zone de turbulence causée par une remontée de la flèche depuis le mois de décembre, le Sénégal cherche des moyens de sortir la tête de l'eau. Les autorités étatiques, en concertation avec les spécialistes du Comité national de gestion des épidémies (CNGE), ont cru devoir trouver le salut dans l'état d'urgence assorti d'un couvre-feu qui s'est révélé à ce jour inefficace, car les cas de covid-19 ne cessent de grimper.
Les chiffres relevés par Dakaractu dans un article paru le 1er février l'ont suffisamment montré. Le mois de janvier a vu défiler pas moins de 7.382 cas positifs, soit le 1/3 des contaminations enregistrées depuis l'apparition de l'épidémie au Sénégal. Cette hausse vertigineuse des cas inquiète mais questionne surtout la stratégie mise en place pour combattre cet ennemi invisible. Où le bât a-t-il blessé ? Des avis et témoignages recueillis par Dakaractu accusent la prise en charge à domicile.
Adoptée dès la première vague de l'épidémie, cette option visait le désengorgement des structures hospitalières. Dans un premier temps, les cas dit asymptomatiques ont été accueillis dans des sites dédiés pour un traitement spécifique. Ensuite, il a été décidé de suivre les patients qui ne présentent pas de signes cliniques à distance.
Diagnostiqué positif à son retour au Sénégal, un modou-modou qui habite Touba a du mal à contenir sa colère. « Après que j'ai été testé positif, je devais être interné ou mis en quarantaine, mais on m'a juste donné un numéro à appeler. Je devais m'en tenir à ça. Je suis laissé à mon propre sort pour vous dire la vérité. Je suis retourné à l'hôpital pour savoir ce que je devais faire, surtout que je n'avais reçu aucun traitement. Finalement, j'ai eu une femme au téléphone qui m'a dit clairement qu'au ministere de la Santé, ils sont dépassés par la situation actuelle », confie le modou-modou qui a recquis l'anonymat.
« Il est dans tous ses états car il se considère comme un « otage ». « Je suis bloqué au Sénégal alors que j'ai des obligations à remplir à l'Extérieur », se plaint-il. Une expatriée sénégalaise qui a récemment séjourné à Thiès a préféré braver l'interdit. « Je ne pouvais plus me fier à ce système de santé qui ne respecte pas les patients », se justifie-t-elle dans un entretien avec Dakaractu.
Après l'apparition de quelques signes dont des maux de tête atroces, elle a fait le test qui s'est révélé positif le 31 décembre dernier. Trois jours après, la voilà en France. « Je me suis présenté à l'aéroport avec mes documents de voyage et personne ne m'a demandé de test négatif. J'ai quand même observé les gestes-barrières mais je ne pouvais plus rester au Sénégal. À l'hôpital de Dixième où je me suis rendue pour savoir ce qui était prévu pour des cas comme moi, on m'a fait poireauter pendant 3 heures de temps, sans réponse », renchérit-elle. Ces deux expériences ne seraient que la partie visible de l'iceberg.
Du côté du ministère de la Santé et de l'Action sociale, l'heure n'est pas au découragement. Selon le Directeur de la Maladie, le Dr Babacar Guèye, la stratégie de la prise en charge à domicile s'est révélée bénéfique. « On a eu les réponses attendues dans la PECADOM », se réjouit le Directeur de la Maladie qui veut pour preuve les guéris enregistrés à domicile. Depuis le début de la maladie, renseigne-t-il, 12.441 cas ont été déclarés guéris à domicile. Ce chiffre représente plus de la moitié des rémissions constatées sous nos tropiques.
Toutefois, les conditions dans lesquelles les certificats de guérison sont délivrés aux patients suivis à domicile font l'objet de débats. Pour certains cas, la guérison serait déclarée sans au préalable avoir été confirmée par un test. Le Dr Guèye qui ne dit pas le contraire, justifie ce procédé par une recommandation de l'Organisation mondiale de la Santé datant de mai 2020, mais qui est régulièrement mise à jour. Dans le cadre de la PECADOM, avise-t-il, le patient qui ne présente pas de signes cliniques peut être déclaré guéri au bout de 10 jours. Pour les patients symptomatiques, le délai est de 13 jours, ajoute-t-il non sans insister sur la nécessité de respecter les mesures barrières pendant sept à dix jours après la déclaration de la guérison. Cette démarche, fut-elle demandée par l'Organisation mondiale de la santé, ne risque-t-elle pas de contribuer à propager le virus ? Le Dr Babacar Guèye est formel : « Il n'y a aucun risque de propagation ».
À l'en croire, les cas asymptomatiques ne peuvent pas transmettre le virus, dix jours après le diagnostic. « Maintenant, pour des raisons administratives, il peut arriver qu'il fasse le Test RT PCR s'il veut voyager où qu'on le lui demande dans son entreprise », précise-t-il. Mais encore faudrait-il que les tests ne soient plus un calvaire pour les cas suspects.
Des pieds et des mains pour recevoir les résultats des tests
Informaticien dans une institution financière de la place, un homme âgé d'une trentaine d'années court depuis la semaine dernière derrière les résultats de son test. « j'ai ressenti des maux de tête et des frissonnements. J'ai décidé de faire le test pour être fixé. J'ai été redirigé vers l'hôpital Philippe Maguilène Senghor où des prélèvements ont été effectués. Je leur ai laissé mes coordonnées en espérant être rappelé dans les meilleurs délais. Seulement, 48 heures après, je n'ai pas eu de nouvelles. J'y suis retourné, et à ma grande surprise, ils m'ont dit que je devais encore patienter. Le lendemain, je suis reparti et cette fois je me suis rendu au laboratoire de l'hôpital, mais on m'a fait comprendre que je devais me renseigner auprès de l'Institut Pasteur de Dakar », déplore-t-il.
« Finalement, après une semaine de quarantaine chez moi, j'ai décidé de poursuivre mes occupations, sinon je risque de porter préjudice à mon employeur. Le pire, c'est que je vis en famille et s'il s'avère que je suis positif, je peux transmettre le virus à mon entourage constitué de ma femme, de mes enfants et des autres membres de ma famille » ; martèle-t-il. Tous les efforts de Dakaractu pour entrer en contact avec le médecin chef du district sanitaire de Dakar Ouest ont été vains.
Mis dans la confidence du courroux de l'informaticien, le Directeur de la Maladie rappelle pour sa part que le principe est de mettre à la disposition des cas suspects les résultats de leurs tests 24 ou 48 heures après. « Après réception des prélèvements, les laboratoires informent les districts sanitaires qui, à leur tour, informent le patient. Mais il peut arriver que certains patients ne soient pas joignables», explique-t-il tout en admettant que des efforts doivent être faits au niveau local pour revoir l'organisation ou encore améliorer la coordination pour une meilleure efficacité. Le maître mot pour venir à bout de cette épidémie qui a eu raison de 666 personnes au Sénégal.
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