Les voilà donc qui s’étrillent seuls dans un espace clos sans aucune possibilité d’intervention d’un arbitre endogène conciliateur. À l’intérieur du terrain où ils sont amenés à livrer bataille, ils n’étaient pas attendus. Et ils ne pourront pas être compris par le peuple qui réclame en urgence une solution pour l’emploi des jeunes et l’augmentation du pouvoir d’achat des populations plus qu’autre chose. Le fait que les régulateurs sociaux sont ainsi mis hors jeu montre la dangerosité du conflit. C’est donc une première que les Sénégalais soient engagés dans un conflit politique où les protagonistes ne seront entendus que par le pouvoir judiciaire qui n’est pas un arbitre politique.
Le conflit ivoirien qui a débouché après 10 ans de blocage du jeu démocratique suivi d’une partition du pays et de la mort de plus 3000 personnes est parti d’une qualification juridico-institutionnelle d’un acte politique discriminatoire et diabolisant pris par le pouvoir exécutif pour éliminer politiquement le camp politique adverse avec l’aide d’un conseil constitutionnel aux ordres. Et on avait vu là-bas que plus la surenchère verbale et sa tonalité allaient crescendo, plus la menace sur la stabilité de ce pays s’était accrue jusqu’à provoquer l’intervention de l’armée et finalement la guerre.
Au Sénégal on assiste à la même dynamique. Mais il n’y aura pas de guerre. Parce que la puissance de l’autorité des régulateurs sociaux éteindra le feu en cas de risque d’embrasement, même si tenus à l’écart pour le moment par la qualification juridico-institutionnelle du conflit, ces derniers ne pourront pas empêcher qu’il s’allume.
Il faut rappeler que le point de départ de la crise des rapports entre l’opposition actuelle et le pouvoir date de la fin de la passation de service entre les deux derniers présidents de la République. Elle a été déclenchée à partir des titres de presse qui faisaient état de fait de vols de voitures de la présidence et d’objets divers appartenant au Palais. Et elle se poursuit avec l’institution d’une cour de répression de l’enrichissement illicite. Donc de par son origine et sa nature, le différent n’a pas son inscription dans le registre des conflits bon enfant qui ont fait respirer la démocratie sénégalaise durant son parcours exemplaire. De plus, le type de discours politique qui l’anime est nouveau dans l’hagiographie sénégalaise. Il est, comme ce fut le cas en Côte d'Ivoire, celui d’un appel citoyen à un meurtre politique légal de l’adversaire. Là-bas c’était fait au nom de l’ « ivoirité ». Ici on le fait au nom de la traque des biens mal acquis. La nouveauté de la démarche dans notre pays est d’autant plus réelle qu’on utilise un discours assertif qui se construit autour de concepts qui chosifient, stigmatisent et criminalisent des hommes d’État bénéficiant d’assises politiques, sociales, communautaires et religieuses. Face à un tel discours attentatoire à la dignité et à la moralité d’acteurs politiques qui aspirent à gouverner le pays, il ne peut pas y avoir un espace de négociation coopérative où se positivent les conflits démocratiques. Avec ce type de conflits donc, produits par un discours stigmatisant, une seule posture émergente est mise en perspective. C’est celle de ceux qui comptent et non de celle de ceux que l’on compte. Ceux qui comptent reçoivent des distinctions honorifiques dans des Ambassades européennes accréditées chez nous. Et là on peut valablement suspecter le parti-pris de l’impérialisme de la vertu civique. Ceux que l’on compte reçoivent des convocations de la gendarmerie nationale. Et là aussi, la présomption de culpabilité a déjà condamné des dignitaires ciblés.
Voilà deux institutions qui interviennent sous des formes différentes comme des bras armés par des exécutifs dans un conflit politique où on a écarté les régulateurs sociaux au profit d’acteurs du système de veille international sur la vertu civique.
La seule possibilité qui est laissée à chaque adversaire dans l’arène est celle de sortir seul vivant quand l’autre est mort et doit disparaitre de la scène politique par une délation fatale qui doit lui faire perdre son honorabilité. La règle imposée est que c’est celui qui communiquera mieux et plus dans l’arène qui tuera et vivra. La différence entre le régime sortant et le régime entrant est que le premier a moins beaucoup parlé que communiquer que le second.
L’ancien régime a été éliminé non pas parce qu’il n’avait pas un bon bilan, mais parce qu’il n’a pas communiqué efficacement sur son bilan. Le paradoxe est qu’avec la deuxième alternance le président sortant a perdu de manière extraordinaire avec un bilan positif extraordinaire. La communication a été incontestablement la clé de l’énigme. Résultat des courses, c’est la même arme qui l’a abattu hier qui est utilisée encore aujourd’hui pour l’achever. À preuve, l’appel au meurtre politique qui était lancé dans la campagne contre le candidat sortant se poursuit encore sous une autre forme avec l’appel à la délation des « voleurs de la République ».
L’appel au meurtre politique s’exprimait avec cette chanson GORGUI DEENA SOUL LEN KO (gorgui est mort enterrons-le). Elle soutenait une procession portant un cercueil mortuaire où il y avait l’inscription de son nom. À partir du moment où de tels faits inélégants associés à des discours d’appel à la mort de l’adversaire politique sont tolérés et acceptés dans l’espace public, la charge pour faire désirer d’autres crimes politiques réels ne peut plus s’arrêter. Dans cette perspective, il ya de quoi s’inquiéter de voir chez nous le syndrome ivoirien avec la création de cette « cour pour la traque des biens mal acquis » qui doit condamner dans les règles de l’art, l’adversaire politique au tribunal du jugement des membres de l’opposition seuls « auteurs de crimes économiques ».
L’atmosphère de paix qui court durant les convocations des responsables du PDS ne doit pas faire rêver. Pendant plus de 10 ans, les Ivoiriens ont pensé qu’ils étaient un peuple sans histoire incapable de rentrer dans la barbarie de la guerre civile. Au Sénégal, il ne faut surtout pas faire la même erreur en laissant le conflit se développer sans l’intervention des régulateurs endogènes et permettre à l’impérialisme de la vertu de donner sa caution morale à ceux qui divisent le pays en 2 camps ennemis pour ensuite s’offrir le prétexte de supplanter les régulateurs sociaux dans le rôle de maintien de la paix quand cela va brûler. Il est dangereux de croire qu’un Parti politique comme le PDS qui a un parcours de lutte de 26 ans dans l’opposition contre un Parti-Etat va se laisser éliminer politiquement par un argument juridico institutionnel sans se défendre politiquement et montrer sa capacité de résistance et même de nuisance.
Enfermés tous les deux protagonistes à double tour avec interdiction de sortie de celui qui a sur le front l’estampille de voleurs de biens publics, on peut dire silence on tue du PDS avec la complicité d’arbitres habilités à intervenir sur des contentieux qui relèvent de la vertu civique. Face à de telles violations des droits humains et de la démocratie, il est à se demander : où est la RADDHO ? Où est le Forum civil ? Où est l’ONDH ? Que font la France, les Etats-Unis, l’Union européenne ? Ces pays qui ont exercé une veille sur le respect de la vertu civique au Sénégal et dont les ambassadeurs ont fait preuve de promptitude à condamner sur ce registre Maître Wade et à prendre langue avec l’opposition d’alors qui est au pouvoir aujourd’hui.
J’appelle mon ami Macky Sall à sortir de cette rupture piégée qui prépare une guerre civile. Pour éviter le syndrome ivoirien, je l’invite à se débarrasser des tueurs à gage politique socialo-communistes qui ne vivent et n’existent que par et dans les luttes de classes ou de clans dont l’Afrique n’a pas besoin. L’Afrique a besoin de forcer le passage dans une logique de vitesse et de raccourcis pour accéder à l’émergence dans une unité dynamique. Et les querelles politiques sur les coûts sociaux et moraux à payer pour ce passage ne font que nous retarder davantage face aux pays émergents qui se sont décomplexés sur ces questions d’angélisme civique et ont pris le large en creusant l’écart qui nous sépare d’eux. Je lui souhaite d’aspirer à incarner un leadership panafricain qui manque aujourd’hui et que le Sénégal à travers lui doit prendre en charge pour faire aboutir le combat de l’unité politique gage du développement rapide du continent. Pour prétendre assumer un tel leadership, il lui faut faire la preuve de sa capacité à réconcilier ses compatriotes et à les fédérer autour des principes de l’unité politique qui est le socle sur lequel on peut bâtir un État fédéral régional panafricain objectif ultime de la CEDEAO. Macky Sall a fait preuve de génie politique en surfant sur les complots intérieurs et extérieurs contre le Sénégal. Il a réussi ainsi à nous éviter l’arrivée d’hommes politiques revanchards auxiliaires du néocolonialisme qui ont été aux affaires de manière inexperte. Macky Sall dispose par ce fait de tous les atouts stratégiques et de la capacité à fédérer les Sénégalais autour de cet objectif toujours visé, mais jamais atteint pour qu’enfin des pères fondateurs du panafricanisme comme Cheikh Anta DIOP et K. Nkrumah puissent dormir en paix.
Amadou Lamine FAYE Tel : 77 563 40 62 E. mail alfconsulting@yahoo.fr
Le conflit ivoirien qui a débouché après 10 ans de blocage du jeu démocratique suivi d’une partition du pays et de la mort de plus 3000 personnes est parti d’une qualification juridico-institutionnelle d’un acte politique discriminatoire et diabolisant pris par le pouvoir exécutif pour éliminer politiquement le camp politique adverse avec l’aide d’un conseil constitutionnel aux ordres. Et on avait vu là-bas que plus la surenchère verbale et sa tonalité allaient crescendo, plus la menace sur la stabilité de ce pays s’était accrue jusqu’à provoquer l’intervention de l’armée et finalement la guerre.
Au Sénégal on assiste à la même dynamique. Mais il n’y aura pas de guerre. Parce que la puissance de l’autorité des régulateurs sociaux éteindra le feu en cas de risque d’embrasement, même si tenus à l’écart pour le moment par la qualification juridico-institutionnelle du conflit, ces derniers ne pourront pas empêcher qu’il s’allume.
Il faut rappeler que le point de départ de la crise des rapports entre l’opposition actuelle et le pouvoir date de la fin de la passation de service entre les deux derniers présidents de la République. Elle a été déclenchée à partir des titres de presse qui faisaient état de fait de vols de voitures de la présidence et d’objets divers appartenant au Palais. Et elle se poursuit avec l’institution d’une cour de répression de l’enrichissement illicite. Donc de par son origine et sa nature, le différent n’a pas son inscription dans le registre des conflits bon enfant qui ont fait respirer la démocratie sénégalaise durant son parcours exemplaire. De plus, le type de discours politique qui l’anime est nouveau dans l’hagiographie sénégalaise. Il est, comme ce fut le cas en Côte d'Ivoire, celui d’un appel citoyen à un meurtre politique légal de l’adversaire. Là-bas c’était fait au nom de l’ « ivoirité ». Ici on le fait au nom de la traque des biens mal acquis. La nouveauté de la démarche dans notre pays est d’autant plus réelle qu’on utilise un discours assertif qui se construit autour de concepts qui chosifient, stigmatisent et criminalisent des hommes d’État bénéficiant d’assises politiques, sociales, communautaires et religieuses. Face à un tel discours attentatoire à la dignité et à la moralité d’acteurs politiques qui aspirent à gouverner le pays, il ne peut pas y avoir un espace de négociation coopérative où se positivent les conflits démocratiques. Avec ce type de conflits donc, produits par un discours stigmatisant, une seule posture émergente est mise en perspective. C’est celle de ceux qui comptent et non de celle de ceux que l’on compte. Ceux qui comptent reçoivent des distinctions honorifiques dans des Ambassades européennes accréditées chez nous. Et là on peut valablement suspecter le parti-pris de l’impérialisme de la vertu civique. Ceux que l’on compte reçoivent des convocations de la gendarmerie nationale. Et là aussi, la présomption de culpabilité a déjà condamné des dignitaires ciblés.
Voilà deux institutions qui interviennent sous des formes différentes comme des bras armés par des exécutifs dans un conflit politique où on a écarté les régulateurs sociaux au profit d’acteurs du système de veille international sur la vertu civique.
La seule possibilité qui est laissée à chaque adversaire dans l’arène est celle de sortir seul vivant quand l’autre est mort et doit disparaitre de la scène politique par une délation fatale qui doit lui faire perdre son honorabilité. La règle imposée est que c’est celui qui communiquera mieux et plus dans l’arène qui tuera et vivra. La différence entre le régime sortant et le régime entrant est que le premier a moins beaucoup parlé que communiquer que le second.
L’ancien régime a été éliminé non pas parce qu’il n’avait pas un bon bilan, mais parce qu’il n’a pas communiqué efficacement sur son bilan. Le paradoxe est qu’avec la deuxième alternance le président sortant a perdu de manière extraordinaire avec un bilan positif extraordinaire. La communication a été incontestablement la clé de l’énigme. Résultat des courses, c’est la même arme qui l’a abattu hier qui est utilisée encore aujourd’hui pour l’achever. À preuve, l’appel au meurtre politique qui était lancé dans la campagne contre le candidat sortant se poursuit encore sous une autre forme avec l’appel à la délation des « voleurs de la République ».
L’appel au meurtre politique s’exprimait avec cette chanson GORGUI DEENA SOUL LEN KO (gorgui est mort enterrons-le). Elle soutenait une procession portant un cercueil mortuaire où il y avait l’inscription de son nom. À partir du moment où de tels faits inélégants associés à des discours d’appel à la mort de l’adversaire politique sont tolérés et acceptés dans l’espace public, la charge pour faire désirer d’autres crimes politiques réels ne peut plus s’arrêter. Dans cette perspective, il ya de quoi s’inquiéter de voir chez nous le syndrome ivoirien avec la création de cette « cour pour la traque des biens mal acquis » qui doit condamner dans les règles de l’art, l’adversaire politique au tribunal du jugement des membres de l’opposition seuls « auteurs de crimes économiques ».
L’atmosphère de paix qui court durant les convocations des responsables du PDS ne doit pas faire rêver. Pendant plus de 10 ans, les Ivoiriens ont pensé qu’ils étaient un peuple sans histoire incapable de rentrer dans la barbarie de la guerre civile. Au Sénégal, il ne faut surtout pas faire la même erreur en laissant le conflit se développer sans l’intervention des régulateurs endogènes et permettre à l’impérialisme de la vertu de donner sa caution morale à ceux qui divisent le pays en 2 camps ennemis pour ensuite s’offrir le prétexte de supplanter les régulateurs sociaux dans le rôle de maintien de la paix quand cela va brûler. Il est dangereux de croire qu’un Parti politique comme le PDS qui a un parcours de lutte de 26 ans dans l’opposition contre un Parti-Etat va se laisser éliminer politiquement par un argument juridico institutionnel sans se défendre politiquement et montrer sa capacité de résistance et même de nuisance.
Enfermés tous les deux protagonistes à double tour avec interdiction de sortie de celui qui a sur le front l’estampille de voleurs de biens publics, on peut dire silence on tue du PDS avec la complicité d’arbitres habilités à intervenir sur des contentieux qui relèvent de la vertu civique. Face à de telles violations des droits humains et de la démocratie, il est à se demander : où est la RADDHO ? Où est le Forum civil ? Où est l’ONDH ? Que font la France, les Etats-Unis, l’Union européenne ? Ces pays qui ont exercé une veille sur le respect de la vertu civique au Sénégal et dont les ambassadeurs ont fait preuve de promptitude à condamner sur ce registre Maître Wade et à prendre langue avec l’opposition d’alors qui est au pouvoir aujourd’hui.
J’appelle mon ami Macky Sall à sortir de cette rupture piégée qui prépare une guerre civile. Pour éviter le syndrome ivoirien, je l’invite à se débarrasser des tueurs à gage politique socialo-communistes qui ne vivent et n’existent que par et dans les luttes de classes ou de clans dont l’Afrique n’a pas besoin. L’Afrique a besoin de forcer le passage dans une logique de vitesse et de raccourcis pour accéder à l’émergence dans une unité dynamique. Et les querelles politiques sur les coûts sociaux et moraux à payer pour ce passage ne font que nous retarder davantage face aux pays émergents qui se sont décomplexés sur ces questions d’angélisme civique et ont pris le large en creusant l’écart qui nous sépare d’eux. Je lui souhaite d’aspirer à incarner un leadership panafricain qui manque aujourd’hui et que le Sénégal à travers lui doit prendre en charge pour faire aboutir le combat de l’unité politique gage du développement rapide du continent. Pour prétendre assumer un tel leadership, il lui faut faire la preuve de sa capacité à réconcilier ses compatriotes et à les fédérer autour des principes de l’unité politique qui est le socle sur lequel on peut bâtir un État fédéral régional panafricain objectif ultime de la CEDEAO. Macky Sall a fait preuve de génie politique en surfant sur les complots intérieurs et extérieurs contre le Sénégal. Il a réussi ainsi à nous éviter l’arrivée d’hommes politiques revanchards auxiliaires du néocolonialisme qui ont été aux affaires de manière inexperte. Macky Sall dispose par ce fait de tous les atouts stratégiques et de la capacité à fédérer les Sénégalais autour de cet objectif toujours visé, mais jamais atteint pour qu’enfin des pères fondateurs du panafricanisme comme Cheikh Anta DIOP et K. Nkrumah puissent dormir en paix.
Amadou Lamine FAYE Tel : 77 563 40 62 E. mail alfconsulting@yahoo.fr