Chômage au Sénégal : 20,3 % des actifs touchés, une hausse alarmante


Le chômage reste un défi majeur au Sénégal, avec un taux élargi de 20,3 % enregistré au troisième trimestre 2024. Ce chiffre, révélé par l’Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD), marque une hausse de 0,8 point par rapport à la même période en 2023 (19,5 %). Ce constat met en lumière une crise profonde, exacerbée par des disparités notables liées au genre, au lieu de résidence, et au profil des jeunes.

 

Deux définitions pour un problème complexe

 

L’ANSD applique deux méthodologies pour mesurer le chômage :

1. Le chômage strict : Selon le Bureau International du Travail (BIT), il concerne les individus sans emploi, disponibles pour travailler, et ayant cherché activement un poste dans les quatre semaines précédentes. Pour le troisième trimestre 2024, ce taux est estimé à 5,3 %.

2. Le chômage élargi : Plus adapté au contexte sénégalais, il inclut les individus sans emploi, disponibles pour travailler, mais n’ayant pas activement cherché un emploi pour des raisons indépendantes de leur volonté. Ce taux est de 20,3 %, reflétant mieux les réalités locales.

 

Une crise féminisée : Les femmes, premières victimes

 

Les chiffres du troisième trimestre 2024 soulignent une véritable fracture genrée .

 

Le chômage élargi met en évidence des disparités de genre marquées :

Femmes : 32,9 %, soit près du triple de celui des hommes.

Hommes : 11,8 %.

 

 Cette différence s’explique par plusieurs facteurs :

1. Inégalités structurelles : Les femmes font face à des obstacles culturels et sociaux qui limitent leur accès au marché du travail, notamment dans les zones rurales où les normes traditionnelles freinent leur participation économique.

2. Double fardeau : Les responsabilités domestiques et familiales pèsent lourdement sur les femmes, réduisant leur disponibilité pour occuper des emplois rémunérés.

3. Précarité des opportunités : Lorsqu’elles travaillent, les femmes sont souvent cantonnées à des emplois informels ou précaires, avec peu de perspectives d’évolution.

 

Ces écarts sont liés à plusieurs facteurs structurels, notamment l’accès limité des femmes au marché du travail formel, les barrières socioculturelles, et leur concentration dans des secteurs informels ou précaires.

 

Le poids des zones rurales

 

Le chômage élargi est plus élevé en milieu rural (21,9 %) qu’en milieu urbain (19,2 %). Dans les zones rurales, la dépendance à l’agriculture expose les travailleurs aux aléas climatiques et limite les opportunités économiques. À l’inverse, les villes, bien qu’offrant plus d’emplois formels, font face à une surpopulation croissante et à une saturation du marché du travail urbain, aggravée par l’exode rural.

 

Les jeunes NEET : Une bombe à retardement

 

Le rapport de l’ANSD met également en lumière la situation des jeunes âgés de 15 à 24 ans, non en emploi, ni en éducation, ni en formation (NEET). Ils représentent 34,1 % de cette tranche d’âge, un taux inquiétant qui monte à 42,7 % en milieu rural et touche particulièrement les jeunes femmes (43,7 %).

 

Conséquences socio-économiques

 

Les répercussions du chômage sont multiples :

Appauvrissement des ménages : Le chômage réduit le pouvoir d’achat et l’accès aux services essentiels.

Migration irrégulière : Le manque d’opportunités pousse de nombreux jeunes à tenter l’émigration, souvent au péril de leur vie..

Tensions sociales : L’inaction face au chômage alimente les frustrations et peut accentuer les conflits sociaux.

 

Recommandations pour une réponse efficace

 

Pour faire face à cette crise, plusieurs actions s’imposent :

1. Développement rural : Investir dans l’agriculture moderne et les infrastructures rurales pour diversifier les sources de revenus.

2. Soutien à l’entrepreneuriat : Faciliter l’accès au financement et aux formations pour encourager les initiatives économiques locales.

3. Éducation et formation professionnelle : Adapter les programmes aux besoins des secteurs porteurs comme la technologie et les énergies renouvelables.

4. Réduction des inégalités de genre : Mettre en place des politiques pour autonomiser les femmes économiquement.

 

 

 

Avec un taux de chômage élargi atteignant 20,3 %, le Sénégal fait face à une crise structurelle qui menace sa cohésion sociale et son développement économique. La situation des femmes, des jeunes et des zones rurales appelle à des politiques audacieuses et inclusives pour transformer cette crise en opportunité de redynamisation du marché du travail.

Mercredi 8 Janvier 2025
Dakaractu