Chirac : morceaux choisis des "Mémoires" d'un président


Du discours du Vel d'Hiv' au refus de la guerre en Irak en passant par la dissolution de 1997 et le "choc" du 21 avril 2002, le regard de Jacques Chirac sur douze ans de mandat présidentiel. Portrait acide de Nicolas Sarkozy, clins d'oeil à François Hollande et Nicolas Hulot, Jacques Chirac s'invite dans la campagne. Morceaux choisis du tome II de ses Mémoires, Le temps présidentiel (Nil), 2011, 624 p., 22 euros.

Qu'est-ce qu'être président?

On n'accède pas à la magistrature suprême sans une volonté tenace, constante d'y parvenir, ni l'intime conviction, chevillée au corps, du destin qui nous y conduit. L'une et l'autre m'ont été très utiles au cours des dernières années pour ne jamais renoncer à une ambition que beaucoup jugeaient irréalisable.

Pour tout dire, je n'ai douté à aucun moment que, après deux échecs successifs, cette troisième tentative serait couronnée de succès. D'abord parce que j'avais tiré les leçons de mes échecs précédents, en m'affranchissant peu à peu d'une appartenance trop partisane qui limitait ma relation avec les Français et m'empêchait de mieux percevoir la réalité concrète des problèmes qu'ils devaient affronter. Ensuite parce que l'expérience d'une traversée du désert dont j'avais moi-même pris le risque en laissant à un concurrent inattendu la responsabilité du gouvernement s'est révélée une épreuve bénéfique et même salutaire (...)

Il ne suffit pas de remporter une élection présidentielle pour s'imposer comme le"président de tous les Français", selon la formule consacrée. Y parvenir exige à tout le moins une certaine évolution personnelle, la prise de conscience d'une métamorphose nécessaire et même indispensable, sous peine de ne jamais franchir le simple statut de chef de parti.

 


Jacques Chirac et Dominique de Villepin, alors secrétaire général de l'Elysée, le 27 avril 1996, dans les jardins de l'Elysée.AFP/JACQUES DEMARTHON

 

Dominique de Villepin, un "antidote à l'esprit courtisan"

Le plus difficile, dans l'exercice du pouvoir, est de se doter de collaborateurs qui osent affirmer ce qu'ils pensent à celui qui les dirige, sans craindre de lui déplaire, ni se contenter d'abonder dans le sens de ce que lui, selon eux, souhaite entendre. Le phénomène de cour est inhérent au fonctionnement des entourages. C'est un mal inévitable qui peut devenir fatal si l'on ne dispose pas de solides contre-feux pour en limiter les effets. Homme de caractère comme on en dénombre peu au sein de l'appareil d'État, inventif, fougueux, stimulant, riche d'une expérience internationale acquise dès sa jeunesse, peu enclin à masquer ses convictions ou à atténuer ses jugements, Dominique de Villepin est un excellent antidote à cet esprit courtisan où la servilité le dispute toujours au conformisme (...)

Sans qu'on le sache, Dominique de Villepin a été dans l'ombre un de mes relais les plus efficaces durant la campagne présidentielle. Ses responsabilités au Quai d'Orsay  et sa position stratégique auprès d'Alain Juppé  lui permettaient d'être mieux renseigné, sur la plupart des sujets, que je ne l'étais moi même à ce moment-là. Je lui dois d'avoir ainsi pu bénéficier d'informations de première main sur les affaires gouvernementales, l'imminence de certaines défections me concernant et les intrigues qui se tramaient contre nous dans l'entourage de mon concurrent [Edouard Balladur ]

Nos destins politiques se sont liés durant cette période fertile en trahisons en tous genres. Avant même d'être élu à la présidence de la République, il était acquis qu'en cas de victoire je ferais appel à Dominique de Villepin pour prendre en main le secrétariat général de l'Élysée. Une telle responsabilité requiert des hommes ayant sa conception exigeante et passionnée du service de l'État. Dominique de Villepin se fait, à juste titre, une haute idée de sa fonction. Pour lui, l'ambition d'agir et d'entreprendre ne saurait se passer de culture, de style et d'idéal. Il possède les trois avec un égal brio. Est-il trop enclin à s'enflammer, à se laisser emporter par ses élans, comme lui en font grief ceux qui ont de la France une vision plus étriquée ? Au moins ne pèche-t-il pas, comme tant d'autres, par manque d'audace, de souffle et de hauteur de vue. De telles qualités importent à mes yeux, même s'il m'appartient, en dernier ressort, de toujours faire la part des choses entre ce que l'on me dit et ce que je pense.

 


Jacques Chirac et Simone Veil  lors d'une exposition en mémoire des victimes de la rafle du Vel d'Hiv', à Orléans, le 27 janvier 2011.AFP/ALAIN JOCARD

 

Le discours du Vel d'Hiv' (juillet 1995) : "Les juifs, ce peuple de passeurs"

J'ai toujours éprouvé beaucoup de respect et d'admiration envers ce peuple de passeurs qui attache plus d'importance à la transmission du savoir qu'à celle de ses rites et de ses croyances. Quand des juifs s'installent quelque part, ils créent d'abord une école, avant d'implanter une synagogue, là où les catholiques, dans une situation similaire, commencent par bâtir une église. J'aime cette phrase du Talmud qui dit que l'humanité tout entière ne tient que par le souffle des enfants qui étudient. Le Talmud dit aussi : " Quel est le sage ? Celui qui apprend de tout homme. " C'est une magnifique leçon de vie. Le judaïsme est inséparable de l'étude, de la conquête de la connaissance (...)

Le 16 juillet 1995, nul ne s'attend, parmi les centaines de personnes rassemblées sur les lieux de l'ancien vélodrome d'Hiver, à entendre le nouveau président de la République affirmer aussi ouvertement que " la folie criminelle de l'occupant a été secondée par des Français, par l'État français " (...)

Les paroles d'apaisement et de réconciliation que porte en lui ce discours du Vél' d'Hiv' sont bien accueillies par l'ensemble des Français et saluées avec une quasi-unanimité par les diverses familles politiques.

Elles ne heurteront en définitive que les gaullistes les plus orthodoxes. Ceux-ci ne manqueront pas de venir à l'Élysée me signifier leur mécontentement, en me reprochant d'avoir commis une sorte de sacrilège vis-à-vis de la mythologie gaullienne. Ce n'est pas la première fois que je bouscule quelque peu les " barons "dans leur noble et respectable certitude d'être les détenteurs exclusifs de l'héritage du Général. Mais le gaullisme est-il autre chose, en fait, qu'une exigence de vérité au service de la seule cause qui vaille : celle de la France, de sa grandeur, de son unité et de l'exemple d'humanisme qu'elle se doit de donner au reste du monde? Telle est, en tout cas, l'idée que je m'en fais et m'efforce d'illustrer, dans mes discours comme dans mes actes, à la tête du pays. (...)

Symboliquement, un des derniers discours de ma présidence, en 2007, a consacré la reconnaissance de l'autre vérité de cette période noire de notre histoire, celle de Français de toutes origines, de tous milieux, qui se sont mobilisés au péril de leur vie pour sauver les Juifs de France. Ainsi tout était dit, et le temps de l'apaisement pouvait enfin venir. C'est en cela que le devoir de mémoire est un acte politique au sens le plus noble du terme.

 


Le président Jacques Chirac et le premier ministre Lionel Jospin, le 8 mai 1998.AFP/MICHEL EULER

 

La dissolution de 1997 : une idée soutenue par tous, assumée par un seul

Très vite, je constate que beaucoup de parlementaires qui défilent dans mon bureau n'ont plus qu'un mot à la bouche : celui d'une dissolution qu'ils souhaitent la plus rapide possible. Leur pression s'accentue à partir du mois de février 1997. Elle est particulièrement vive du côté des anciens ministres balladuriens les plus soucieux de tirer parti d'une nouvelle donne politique pour rentrer en grâce auprès de moi et revenir aux affaires. Le président de l'UDF, François Léotard, émet publiquement le voeu que j'appuie sur l'un des " trois boutons : dissolution, remaniement, référendum ". Nicolas Sarkozy me fait passer des messages tout aussi insistants. Parmi les plus convaincus de la nécessité de dissoudre, figure aussi le président du Sénat, René Monory. Rares, en fait, sont ceux qui me mettent en garde contre cette idée ou la condamnent ouvertement. Hormis Philippe Séguin,Bernard PonsPierre Mazeaud  et quelques autres, la plupart des élus et beaucoup de ministres s'y déclarent favorables, m'incitant à agir au plus vite (...)

Toujours est-il que mon message, comme je le pressentais, a du mal à passer. La réaction de l'opinion est mitigée, pour ne pas dire mauvaise. Du même coup, l'enthousiasme des élus les plus favorables à la dissolution a tôt fait de se refroidir. Au vu des premiers sondages, le leadership d'Alain Juppé est vite contesté. Les responsables nationaux chargés d'organiser la campagne ne parviennent pas à s'entendre. Jean-Louis Debré, qui assiste à plusieurs de leurs réunions, en sort effondré. " Il y a aussi bien autour de la table, me rapporte-t-il, des balladuriens que des séguinistes et des amis de Juppé, et tous ces gens-là se disputent. On ne s'entend pas, personne n'est sur la même longueur d'onde. Une campagne électorale ne peut marcher que s'il y a un patron. Or il n'y a là qu'un petit cénacle d'égocentrismes, de revanches et d'arrière-pensées… " Dois-je m'engager davantage, prendre moi-même la tête des opérations ? Que je le veuille ou non, mes fonctions m'imposent de rester au-dessus de la mêlée.

Me considérant comme seul responsable de la dissolution et de son échec, je refuse de chercher quelque bouc émissaire qui me permettrait de me donner bonne conscience ou servirait à apaiser mon entourage. Ce n'est pourtant pas faute d'être convié et incité de tous côtés à me séparer sur-le-champ de celui qui m'est aussitôt désigné comme le mauvais génie, l'instigateur funeste d'une opération qui a si mal tourné. Un conseiller censé exercer sur moi une influence si écrasante que je serais devenu, en quelque sorte, incapable de lui résister… Or telle n'est pas la véritable histoire de la dissolution et moins encore celle de mes relations avec Dominique de Villepin, puisqu'il est question de lui, comme on l'aura compris. S'il s'agit de savoir qui a pu inspirer une décision aussi malencontreuse, disons que cette erreur d'appréciation fut à tout le moins collective. Dominique de Villepin y eut sa part, comme tant d'autres qui ont pris soin, après coup, de se faire oublier. Mais il n'incombait qu'au chef de l'État de déterminer le parti à prendre.

Si bien qu'au lendemain de cette défaite, quand le secrétaire général de l'Élysée, se sachant incriminé de toutes parts, vient me présenter sa démission, je ne vois aucune raison de l'accepter. Nous avons, lui et moi, d'autres épreuves à affronter ensemble.

 


Jacques Chirac et Hubert Vedrine, alors ministre des affaires étrangères, le 16 juin 2001 à Göteborg (Suède).AFP/GEORGES GOBET

 

Hubert Védrine"à rebours de tout esprit dogmatique"

"Une des seules choses positives dans cette catastrophe, c'est que vous soyez là", lui dirai-je en riant lors de notre premier tête-à-tête (...)

Ce qui caractérise Hubert Védrine, c'est une grande finesse d'analyse alliée à une parfaite maîtrise des rouages diplomatiques, la fidélité à des convictions affirmées en même temps qu'une ouverture d'esprit à rebours de tout esprit dogmatique. À cela s'ajoute ce qui fait de lui un homme d'un commerce toujours agréable : sa courtoisie, sa pondération naturelle.

Hubert Védrine n'est ni le représentant d'une caste, ni celui d'un parti. Sa liberté de jugement le distingue tout autant des cercles diplomatiques traditionnels.

Dans sa conception de la politique étrangère française comme dans sa vision du monde, il réussit à concilier l'exigence gaullienne et le pragmatisme mitterrandien, l'attachement profond à la souveraineté nationale et la conscience éclairée d'une nécessaire adaptation aux évolutions de l'Histoire.

Les "affaires": la main de Nicolas Sarkozy et celle de Jospin?

Les différentes " affaires " dans lesquelles j'ai été mis en cause entre 1999 et 2001 ne visaient probablement pas à faciliter l'exercice du mandat présidentiel qui m'a été confié par les Français en mai 1995.

Non sans m'interroger sur leur origine et tout en m'attachant à y répondre quand je le pensais nécessaire, je les ai toujours accueillies avec sang-froid, soucieux de ne pas me laisser atteindre ni interrompre dans l'accomplissement de ma tâche. Et cela jusqu'au moment où, redevenu simple citoyen, je me tiendrais naturellement à la disposition de la justice pour répondre aux questions qu'elle souhaiterait me poser.

Toutes ces " affaires " ont trait, d'une manière ou d'une autre, à la question du financement de la vie politique tel qu'il se pratiquait, pour chacun de ses protagonistes, dans une époque bien antérieure à mon élection. Pour l'essentiel, elles concernent le maire de Paris ou le président du RPR que j'ai été.

Aucune d'entre elles n'implique le chef de l'État que je suis devenu, à un moment de notre histoire nationale où l'activité des partis politiques est encadrée par des dispositions juridiques qui n'existaient pas auparavant (...)

Il ne s'agit pas, naturellement, de contester en quoi que ce soit le travail de la justice, dès lors qu'elle se tient elle-même à l'écart de toute influence partisane. Mais les méthodes dont je parle relèvent d'une autre démarche, fondée sur des rumeurs, des campagnes de presse plus ou moins orchestrées, des imputations fabriquées sans scrupules pour servir des ambitions personnelles et porter atteinte à l'honneur des personnes jusqu'au plus haut niveau de l'État.

J'en ai eu la démonstration, avant même mon élection de 1995, dans l'affaire des terrains de Vigneux. Visant ma belle-famille, et moi-même par voie de conséquence, elle n'avait pas d'autre objectif que de salir la réputation d'un concurrent. Il m'a toujours manqué la preuve qu'elle avait été initiée par le ministère du Budget, comme on me l'assurait.

Mais cette affaire montée de toutes pièces ne me paraissait évidemment pas étrangère à la campagne présidentielle. Les attaques lancées contre Alain Juppé, peu après son arrivée à Matignon, ne devaient rien au hasard, elles non plus. Puis ce fut à mon tour d'être directement pris pour cible…(...)

Au cours de l'été 2001, j'apprends par Dominique de Villepin qu'un ancien juge financier ayant jadis appartenu au cabinet d'un ministre socialiste, et depuis lors détaché à la DGSE, aurait enquêté sur l'existence présumée d'un compte privé que je détiendrais prétenduement dans une banque japonaise, la Sowa Bank, dirigée jusqu'à une période récente par son fondateur, Soichi Osada. Je connais celui-ci, en effet, et l'ai rencontré à plusieurs reprises, mais pour des raisons liées exclusivement à des projets d'investissement industriel qu'il souhaitait réaliser dans notre pays. Cette fois, mon sang ne fait qu'un tour. Convaincu que Lionel Jospin, ou son entourage, n'est probablement pas pour rien dans cette nouvelle " affaire ", qui a tout l'air d'un complot ourdi contre moi, j'adresse au Premier ministre, par courrier, une mise en garde extrêmement vigoureuse contre ce genre de procédé. Il me répond sèchement tout ignorer d'une pareille enquête, dont l'existence sera néanmoins avérée après coup.

Avec Bill  Clinton, "une empathie immédiate"

Les relations entre chefs d'État échappent rarement aux tensions, aux rapports de force inhérents à la défense de leurs intérêts respectifs. Celles que j'ai entretenues avec Bill Clinton  n'ont pas toujours fait exception à la règle, émaillées de heurts et de désaccords parfois houleux. Mais une empathie immédiate, un même amour des choses de la vie, alliés à un même goût de l'action dans l'exercice du pouvoir ont toujours grandement facilité nos contacts personnels.

Et c'est sans difficulté que nous nous sommes retrouvés lorsqu'il s'est agi de défendre, en Bosnie et au Kosovo, les principes et valeurs d'humanisme auxquelles nous étions l'un et l'autre attachés. La complicité qui s'est nouée dans le même temps entre son épouse et la mienne, unies par une passion similaire de l'engagement public, n'a pas moins contribué à nous rapprocher.

Quand Bill Clinton a vu s'abattre sur lui, au début de l'année 1998, l'affaire Monica Lewinsky, exploitée à outrance par ses ennemis politiques afin de tenter d'obtenir sa destitution, je lui ai aussitôt apporté mon soutien. Je l'appelai plusieurs fois par semaine pour l'encourager à tenir bon, à ne pas lâcher prise face à la meute de ses détracteurs, craignant même qu'il n'en arrive, par désespoir, à mettre fin à ses jours. J'ai admiré le courage et la ténacité dont il fit montre à ce moment-là. J'ai admiré plus encore la force de caractère avec laquelle Hillary Clinton  affronta, de son côté, une épreuve pour elle humiliante, sans jamais fléchir dans la solidarité qu'elle avait aussitôt manifestée à son mari. Je savais, depuis notre premier entretien, qu'Hillary Clinton est une femme exceptionnelle.

 


Lionel Jospin.AFP/JEAN-PIERRE MULLER

 

Le 11 septembre 2001 et le pointillisme "dérisoire" de Lionel Jospin

Rentré à Paris, je fais mettre en berne les drapeaux français dans la cour de l'Élysée, puis convoque immédiatement un conseil ministériel restreint, qui réunit le Premier ministre, les ministres des Affaires étrangères et de la Défense, le secrétaire général de l'Élysée et mon chef d'état-major particulier, le général Henri Bentégeat. Il s'agit de décider des mesures de sécurité à prendre sans délai pour protéger notre propre territoire et se prémunir, dans un premier temps, contre d'éventuelles attaques aériennes semblables à celles qui viennent de détruire les tours du World Trade  Center.

À ma stupéfaction, tant cette réaction me paraît dérisoire en un pareil moment, j'entends Lionel Jospin me déclarer sans ménagement que tout ce qui concerne la défense aérienne relève, " en vertu du décret de 1975 ", de la " responsabilité exclusive du Premier ministre ". Il me met dans l'obligation de lui rappeler vigoureusement qu'en vertu de la Constitution, le président de la République est seul chef des armées et qu'en conséquence j'entends non seulement être informé des décisions prises, mais aussi qu'on me demande mon avis et mon accord.

J'apprendrai peu après que le plan Vigipirate a été réactivé par le gouvernement sans que j'aie été le moins du monde consulté. Mais je m'abstiendrai cette fois de réagir, considérant qu'il ne saurait y avoir place, en de telles circonstances, que pour l'union nationale et rien d'autre.

À la fin de septembre, le Pentagone, qui vient de nous informer de ses plans d'action en Afghanistan, sollicite notre soutien militaire plus que notre participation directe à l'opération baptisée " Liberté immuable " qui sera déclenchée le 7 octobre. Il s'agit en substance, de mettre nos bases à la disposition des avions américains en route vers Kaboul et d'associer nos propres appareils à des raids aériens menés depuis le porte-avions Charles-de-Gaulle, qui serait dépêché dans l'océan Indien. J'y suis immédiatement favorable, d'autant que notre engagement sera limité et qu'il s'agit officiellement d'une mission de pacification qui s'effectuera sous mandat de l'ONU. Mais à Paris je dois faire face, de nouveau, à une réaction négative du Premier ministre.

Un dimanche après-midi, je suis dans mon bureau de l'Élysée en train de discuter de différents dossiers avec mon chef d'état-major particulier, le général Bentégeat, quand je reçois un coup de téléphone de Lionel Jospin : " Vous avez vu comme moi, Monsieur le Président, la demande d'autorisation de survol de notre territoire que nous ont adressée les autorités américaines pour que leurs avions puissent aller bombarder l'Afghanistan. J'y suis opposé ! " me déclare-t-il. Je le laisse développer ses arguments, me faire part de ses craintes de voir notamment la France accusée de complicité dans le cas où ces bombardements feraient des victimes parmi les populations civiles… Puis je lui réponds ce qui suit : " Monsieur le Premier ministre, avez-vous pris conscience du fait que les Américains viennent de subir, de leur côté, la perte de six mille [le chiffre avancé à l'époque] de ces civils dont vous parlez ? La question, naturellement, n'est pas d'en faire autant en Afghanistan. Mais vous rendez-vous compte du traumatisme qui serait le nôtre, en France, si nous avions seulement deux cents de nos compatriotes tués à Paris dans un attentat du même ordre ? Je ne comprends pas votre attitude. "Probablement mis sous pression par une partie de la " gauche plurielle " hostile à toute intervention militaire en Afghanistan, le Premier ministre n'a pas insisté. Mais j'aurai toutes les peines du monde à obtenir de son gouvernement que le minimum de soutien opérationnel qui nous était demandé sur le terrain puisse être réalisé.

Comment Lionel  Jospin a "ragaillardi" le candidat Chirac

Alors que, de l'avis général, je peine encore, un mois après ma déclaration de candidature, à retrouver le souffle et l'inspiration de ma campagne victorieuse de 1995, voici que mon principal adversaire, toujours un peu hargneux à mon égard et ne cherchant plus désormais à dissimuler ses sentiments, se laisse aller, le 10 mars, en parlant avec des journalistes dans un avion qui le ramène de l'île de La Réunion à Paris, à me déclarer quasiment grabataire : "Chirac, leur dit-il, a perdu beaucoup de son énergie et de sa force. Il est fatigué, vieilli, victime d'une certaine usure du pouvoir. Il est marqué par une certaine passivité". De l'art de réveiller les morts ou présumés tels… Je ne l'ai pas mal pris, doutant que l'usure fût exactement de mon côté. Mais en soi le propos m'a paru, disons, peu convenable, venant d'un homme qui aspire aux plus hautes fonctions de l'État. Est-ce sur l'âge et le physique des prétendants que va se jouer le choix du futur président ? L'arrogance et le mépris vont-ils tenir lieu de débat ? Lionel Jospin se trouve, il est vrai, dans la position toujours incertaine, et que j'ai souvent connue moi-même, de celui qui doit assumer un bilan, quand la mienne consiste essentiellement cette fois-ci à proposer aux Français d'autres perspectives pour leur avenir. C'est probablement cette situation paradoxale, et pour lui embarrassante, qu'il a tenté d'inverser en sa faveur en se rabattant sur le seul argument censé l'avantager. Il me suffira de m'étonner publiquement qu'il en soit réduit à user contre moi d'une technique s'apparentant "un peu au délit d'opinion", et peut-être même au "délit de sale gueule", pour démasquer son faux pas et le contraindre à s'en excuser. Du moins le fera-t-il à sa manière, en assurant que ce qu'il avait dit ne lui ressemblait pas, comme si un autre avait parlé à sa place.

 


Jean-Marie Le Pen, le soir du 21 avril 2002, alors qu'il accède pour la première fois au second tour de l'élection présidentielle.AFP/PIERRE VERDY

 

Le "choc" du 21 avril 2002

Au fil des minutes, l'atmosphère devient étrange et irréelle, comme si nous nous obstinions à parler d'une situation déjà révolue pour mieux occulter celle qui désormais nous semble de plus en plus vraisemblable. Le choc est rude pour moi, comme pour la plupart d'entre nous.

Quand je suis finalement contraint de me rendre à l'évidence, c'est un profond sentiment de malaise qui m'envahit, où l'effarement se mêle à la tristesse et à l'incompréhension. Si je suis triste, c'est d'abord pour la France, pour ce qu'elle est, pour ce qu'elle représente. Même s'il ne subsiste plus guère de doute sur mes chances d'être réélu, je n'ai pas le coeur à m'en réjouir. À mes yeux, ce n'est pas seulement le candidat socialiste qui vient d'être sanctionné, mais la classe politique tout entière. J'ai probablement ma part de responsabilité dans le désarroi et l'exaspération qui ont conduit une partie de nos compatriotes à rejeter les partis traditionnels, confondus dans la même réprobation après cinq années de cohabitation.

Après tout, bien que je sois arrivé en tête, mon propre score, avec moins de 20 % des suffrages exprimés, n'a rien de satisfaisant. Pour toutes ces raisons, je refuserai de sabrer le champagne ce soir-là, comme on m'y invitait.

L'"erreur" de ne pas avoir constitué un gouvernement d'union nationale

Pourquoi n'ai-je pas aussitôt envisagé la formation, au lendemain de ma très probable réélection, d'un gouvernement d'union nationale ? Beaucoup ont été déçus, je le sais, que je paraisse fermer les bras au lieu de les ouvrir, comme il leur paraissait logique et souhaitable que je le fasse. Je me dis aujourd'hui, en y repensant, que j'aurais sans doute dû tout mettre en oeuvre pour parvenir à constituer une équipe dirigeante plus représentative des 82 % d'électeurs qui m'ont apporté leurs suffrages le 4 mai 2002. Je ne l'ai pas fait et ce fut probablement une erreur au regard de l'unité nationale dont j'étais le garant.

Si un autre choix m'a paru préférable à ce moment-là, non sans avoir proposé des responsabilités ministérielles à des personnalités de gauche indépendants commeNicole Notat  et Nicolas Hulot – mais sans succès –, ce fut d'abord par souci de retrouver, au terme d'une longue cohabitation, plus de clarté et d'efficacité dans l'action gouvernementale.

Un nouveau compromis politique entre des dirigeants d'opinions divergentes sur la plupart des grands sujets eût probablement abouti à ces mêmes impasses que les résultats du 21 avril avaient, d'une certaine manière, sanctionnées.

Il comportait, en outre, un danger évident pour notre démocratie : celui de faire apparaître durablement le Front national comme la seule force d'alternance face à une coalition des partis traditionnels que plus rien ou presque ne distinguerait aux yeux de l'opinion.

 


Nicolas Sarkozy et son prédécesseur Jacques Chirac lors des obsèques de Lazare Ponticelli  aux Invalides, à Paris, le 17 mars 2008.REUTERS/CHARLES PLATIAU

 

"Nous ne partageons pas la même vision de la France" avec Nicolas Sarkozy

Nicolas Sarkozy paraît le mieux préparé à occuper cette fonction [de premier ministre, au lendemain de la réélection de Jacques Chirac], ne serait-ce que parce qu'il en est lui même convaincu au point, comme je l'apprendrai incidemment, d'avoir déjà entrepris de composer son cabinet ministériel. Je ne mésestime pas ses qualités : sa force de travail, son énergie, son sens tactique, ses talents médiatiques, qui font de lui, à mes yeux, l'un des hommes politiques les plus doués de sa génération.

Son expérience gouvernementale, son dynamisme, son insatiable appétit d'action plaident aussi en sa faveur. Certains membres de mon entourage, tel Dominique de Villepin, sont favorables à sa nomination, l'estimant utile pour lui permettre de faire ses preuves. D'autres, plus nombreux, me la déconseillent, qui ne jugent pas Nicolas Sarkozy assez fiable par rapport à ce qu'un président de la République, conformément à l'esprit de nos institutions, est en droit d'attendre de son Premier ministre : une loyauté, une transparence totale dans leurs relations.

Le risque, en effet, serait de me trouver très vite confronté à un chef de gouvernement prompt à affirmer son autonomie, voire à me disputer mes propres prérogatives, sans s'interdire de paraître déjà briguer ma succession. Bref, de subir les désagréments d'une nouvelle cohabitation… Le fait est que j'ai besoin d'un Premier ministre avec lequel je me sente en complète harmonie et sur lequel je puisse m'appuyer en toute confiance. La confiance ne se décrète pas mais c'est une nécessité impérative. Or il subsiste trop de zones d'ombre et de malentendus entre Nicolas Sarkozy et moi pour que ces conditions soient pleinement remplies.

J'ajoute, et c'est le plus important, que nous ne partageons probablement pas la même vision de la France.

Le refus de suivre George W.Bush dans sa "mission mystique" en Irak

Le 7 février [2003] je prends l'initiative, sans grande conviction, de renouer le contact avec George W. Bush. " Je vous appelle en tant qu'ami, et ami des États-Unis, lui dis-je. Nous avons deux analyses qui mettent en cause la guerre ou la paix. C'est un problème moral. Vous avez une position, nous en avons une autre. Ce sont deux visions du monde. Il faut l'assumer. Mais cela ne doit pas nous empêcher de nous parler. " J'ajoute que je ne suis pas pacifiste, mais défavorable à la guerre quand elle ne s'avère pas nécessaire. Il s'agit là encore d'une question de morale. " J'apprécie votre cohérence et votre compassion, me répond le président des États-Unis. Moi non plus, je n'aime pas la guerre. Je connais, comme tout chef d'État, les responsabilités que porte celui qui décide d'envoyer des soldats au combat. Une chose me sépare toutefois de vous : je considère que Saddam Hussein  constitue une menace contre la sécurité du peuple américain. Voilà pourquoi j'ai une approche différente en termes de calendrier. " Le ton, de part et d'autre, est courtois, calme et pondéré. Il l'est toujours resté, au demeurant. Mais notre dialogue n'est plus que celui de deux hommes à bout d'arguments. Je prends acte de sa détermination à entrer en lice contre l'Irak coûte que coûte et à aller jusqu'au bout d'une sorte de mission historique et quasi mystique dont il se sent investi. Il prend acte de ma conviction que les chances de parvenir à un arrangement pacifique doivent être préservées le plus longtemps possible, et que le conflit qui se prépare est aussi injuste qu'inutile.

Nicolas Hulot, un homme "profondément libre"

Sous ses apparences juvéniles d'éternel aventurier, toujours en quête d'émotions fortes, j'ai vite découvert chez Nicolas Hulot un homme aux convictions solidement ancrées, porteur d'un message essentiel pour notre temps. Profondément libre et soucieux de son autonomie, il vivait à la fois en marge et au coeur du monde, rebelle à toute appartenance politique.

Mais au fil du temps j'ai vu son engagement se construire et son message s'imposer auprès de l'opinion par sa force et son authenticité.

François Hollande, un "homme d'Etat"

Le 10 février, la loi [sur le port du voile à l'école] est votée à l'Assemblée nationale, plus largement que prévu, par 494 voix contre 36 et 31 abstentions. Ce consensus n'aurait pu être obtenu sans l'attitude responsable du Parti socialiste et celle, exemplaire, de son Premier secrétaire, François Hollande, qui s'est comporté ce jour-là en véritable homme d'État.

L'injustice faite à Alain Juppé

Je me trouvais à Genève ce jour-là, pour une réunion de l'ONU, quand j'ai appris en début d'après-midi le verdict qui venait de frapper Alain Juppé dans l'affaire des emplois présumés fictifs du RPR, soit dix-huit mois de prison avec sursis et dix ans d'inéligibilité.

Stupéfait, abasourdi, par une sentence aussi sévère, aussi injuste – c'est ainsi que je l'ai tout de suite ressentie, même si ma fonction m'interdit de commenter publiquement un acte de justice –, je me suis d'abord enfermé dans un long silence. Cette nouvelle m'a plongé dans une profonde tristesse. Je pensais à ce qu'Alain m'avait confié quelque temps auparavant : " J'ignore comment je réagirai si je suis condamné à une peine infamante. " Plus que mon propre sort judiciaire, c'est le sien qui me préoccupait depuis sa mise en examen six ans auparavant (...) Dès mon retour à Paris, ce 30 janvier 2004, j'ai appelé Alain Juppé pour le réconforter, l'assurer de mon affection, de mon amitié. Je l'ai senti terriblement meurtri. Lorsque je l'ai retrouvé à son retour de Normandie, où il est parti se reposer avec Isabelle sitôt le verdict connu, je l'ai exhorté à tenir bon, à ne pas abandonner le combat politique : " Vous n'allez pas faire comme Jospin ", lui ai-je même dit avec l'espoir que cet argument suffirait à le convaincre.

Mais rien n'y a fait. Alain Juppé considérait qu'en raison de sa condamnation, et même s'il avait fait appel du jugement, il ne pouvait être question pour lui de se maintenir à la direction de l'UMP. Sa décision était prise et je ne suis pas parvenu à le faire changer d'avis.

Le "rapport de force" avec Nicolas Sarkozy

Nicolas Sarkozy a une qualité indéniable : celle d'avancer toujours à découvert. Ses ambitions présidentielles sont vite devenues transparentes, à peine est-il arrivé place Beauvau, quitte à paraître anticiper quelque peu sur des échéances qui n'étaient pas immédiates. Mais je me suis aussitôt refusé à entrer dans le rapport de force qu'il tentait d'établir entre nous, considérant que celui-ci ne pouvait être que destructeur pour nos institutions. Ce n'était pas mon rôle, en tant que chef de l'État, de prendre part à une sorte de compétition ou de rivalité qui n'avait pas lieu d'être. Seule m'importait la façon dont Nicolas Sarkozy s'acquittait, en tant que ministre, de la tâche qui lui avait été confiée (...)

En janvier, j'ai feint de ne pas me sentir visé lorsque Nicolas Sarkozy a cru bon d'ironiser, lors d'un déplacement à Hong Kong, sur les amateurs de combats de sumo et de dénigrer le Japon, deux de mes passions comme il ne l'ignore pas. Je me suis dit simplement, en l'apprenant, que nous n'avions pas les mêmes goûts ni la même culture. Beaucoup de mes proches s'étonnent alors que je ne réagisse pas à toutes ces petites phrases provocantes décochées contre moi par un ministre en fonction qui s'exprime à sa guise, sans jamais se soucier de ménager le chef de l'État. Mais réagir à cela, du moins en public, ne pouvait que conduire à un affrontement auquel, je persistais à le penser, il n'eût pas été digne pour le président de la République de se prêter. Devais-je dans ce cas prendre une décision plus radicale, comme on me le conseillait ? Il m'est arrivé de m'interroger à ce sujet. Après mûre réflexion, je suis toujours parvenu à la conclusion que me séparer de lui eût été priver la France d'un bon ministre.

 


Jacques et Bernadette Chirac  aux côtés de la veuve de Rafic Hariri  et de son fils, à Beyrouth, le 16 février 2005, deux jours après l'assassinat de l'ancien premier ministre libanais.AFP/RABIH MOGHRABI

 

L'assassinat d'un "frère", Rafic Hariri

Le 14 février, en fin de matinée, je tiens une réunion à l'Élysée quand on vient m'informer de l'attentat perpétré à Beyrouth contre Rafic Hariri.

On ignore à la minute où je l'apprends s'il est seulement blessé ou déjà mort. Mais tandis que je regagne précipitamment mon bureau, les nouvelles qui arrivent ne me laissent plus aucun espoir : Rafic a été tué sur le coup dans l'explosion de son véhicule, alors qu'il traversait le quartier Saint-Georges en direction du bord de mer, prêt à s'engager sur la route de la corniche. Je suis effondré. C'est un des pires chocs de ma vie. Je ressens l'assassinat de Rafic comme celui d'un frère. Un frère dont le sort m'inquiétait depuis plusieurs mois et que j'avais tenté en vain de mettre en garde, à diverses reprises, contre les menaces qui pesaient sur lui. Rafic en était parfaitement conscient, mais ce grand seigneur n'était pas homme à se laisser intimider, tout en se montrant assez fataliste.

" Je n'ai pas d'informations précises, lui avais-je confié deux semaines auparavant, lors de son dernier passage à Paris. Mais sois prudent. Ce sont des criminels capables de tout. " (...)

La responsabilité de Bachar al-Assad dans la mort de Rafic Hariri ne fait aucun doute à mes yeux, même si je n'en ai pas la preuve absolue. Le lendemain de l'attentat, j'ai demandé à Jean-Marc de La Sablière de tout mettre en oeuvre pour qu'une commission d'enquête internationale soit constituée au plus vite afin d'identifier les auteurs de l'attentat et ses commanditaires. Comme je le dirai au président Bush lors d'un entretien à Bruxelles, le 25 février 2005, ma conviction est que cet acte n'a pu être commis que par des services organisés et expérimentés. " Pour qui connaît le fonctionnement du système alaouite au pouvoir à Damas, ajouterai-je, le doute n'est pas possible : la décision a été prise par le président Assad. Toute autre hypothèse n'a pas de sens. "

 


Jacques Chirac lors de l'inauguration du musée des arts premiers, quai Branly, à Paris, le 20 juin 2006.AFP/PATRICK KOVARIK


 

Le musée du quai Branly, "l'une des grandes joies de ma vie"

L'inauguration du musée du quai Branly, le 20 juin 2006, a été un des moments les plus heureux de ma présidence et l'une des grandes joies de ma vie. Par-delà la consécration d'un rêve personnel, passionnément partagé avec Jacques Kerchache, elle marquait l'aboutissement d'un long combat au service d'une juste cause : la reconnaissance de tout ce que les plus vieilles civilisations du monde ont apporté d'essentiel à l'histoire de la création humaine.

Le 6 mai 2007, la vaine attente d'un "mot" de Nicolas Sarkozy

Le 6 mai 2007, Nicolas Sarkozy est élu président de la République. Nous sommes réunis à l'Élysée ce soir-là avec Bernadette, mon petit-fils Martin, ainsi que l'ensemble de mes collaborateurs, pour entendre la première déclaration du futur chef de l'État.

Chacun de nous écoute avec la plus grande attention chaque phrase, chaque mot qu'il prononce, guettant secrètement le moment où il citera sans doute le nom de celui auquel il s'apprête à succéder, ou même le remerciera du soutien qu'il lui a apporté. Mais ce moment ne viendra jamais. Pour ma part, je m'abstiens de manifester la moindre réaction. Mais au fond de moi je suis touché, et je sais désormais à quoi m'en tenir.

SOURCE : LE MONDE

Dimanche 10 Juillet 2011