Au cœur de la famille Kadhafi


 (Reuters) - Après avoir régné sur la Libye pendant quatre décennies, la famille de Mouammar Kadhafi a perdu un pouvoir qu'elle a exercé avec toute l'extravagance et la violence de potentats soucieux de satisfaire leurs moindres caprices.

Le dirigeant libyen, toujours en fuite depuis la prise de Tripoli sans que l'on sache où il se trouve, est le père de sept garçons et d'une fille Aïcha, dont les réputations peuvent être mises en regard de l'excentricité et de la cruauté de leur père.

La femme du colonel, Safia, sa fille et deux de ses fils, Hannibal et Mohammed, ont trouvé refuge lundi matin en Algérie, dernier Etat d'Afrique du Nord à ne pas avoir reconnu le Conseil national de transition comme nouveau gouvernement de la Libye.

Un autre fils, Saïf al Arab, a trouvé la mort dans l'insurrection qui a abouti à la chute de son clan tandis que des informations non confirmées indiquent qu'un autre fils, Khamis, chef d'une brigade d'élite sans doute à l'origine d'exécutions sommaires, aurait été tué.

Deux autres fils, Saif al Islam, considéré comme son dauphin présumé, et Saadi, ont eux disparu.

Pendant des années, la jalousie et l'avidité ont tissé des relations délétères au sein de cette famille, mais à mesure que l'heure de la chute approchait, la fratrie a serré les rangs autour de son chef.

Un câble diplomatique américain datant de 2009 évoquait déjà les luttes intestines au sein de cette famille divisée dont une partie des membres vivaient à l'étranger et se retrouvaient sous la lumière crue des projecteurs en raison de leurs comportements souvent atypiques.

Avec le début de la rébellion en Libye, Saïf al Islam a pris une place aux côtés de Mouammar Kadhafi. Autrefois perçu comme un réformateur, Saïf, qui a étudié à la prestigieuse London School of Economics (LSE), a développé un discours belliqueux pour dénoncer l'action des insurgés.

Saïf al Islam, âgé de 39 ans, et son père sont tous les deux sous le coup d'un mandat d'arrêt émis par la Cour pénale internationale (CPI) pour crimes contre l'humanité.

"CLAUDIA SCHIFFER DU MAGHREB"

Saïf al Arab, 29 ans, a péri dans un bombardement des avions de l'Otan sur Tripoli. A l'âge de quatre ans, il avait été blessé par le raid aérien ordonné par le président américain Ronald Reagan contre le QG du guide libyen en 1986.

Au cours de sa courte existence, Saïf al Arab est apparu comme un enfant gâté qui a bénéficié de l'indulgence de son père. Toujours selon des câbles diplomatiques américains, il passait la majeure partie de son temps à faire des fêtes et affichait un comportement violent, comme le montra sa participation à une bagarre avec un videur de boîte de nuit à Munich en 2007.

Hannibal, qui occupait le poste de président de la compagnie maritime nationale, fut lui impliqué dans une série d'incidents à l'étranger.

En 2008, lui et sa femme furent arrêtés dans un hôtel de Genève pour avoir maltraité deux employés de l'établissement. Cela s'était traduit par un incident diplomatique majeur entre la Suisse et la Libye, qui avait détenu pendant plusieurs mois deux hommes d'affaires suisses.

Saadi est lui connu pour sa passion obsessionnelle pour le football. Il a mené une brève et peu convaincante carrière avec plusieurs clubs italiens avant d'être capitaine de l'équipe nationale libyenne dont le sélectionneur avait été limogé pour ne pas l'avoir retenu dans l'équipe.

Son goût pour les jets privés, les palaces cinq étoiles, les bijoux voyants et les mallettes remplies d'argent liquide s'accompagnait d'un penchant pour les parcs d'attraction.

En revanche, on sait peu de choses de l'aîné de la fratrie, Mohammed, un ingénieur nommé à la tête du Comité olympique libyen et à la tête de la Commission générale des postes et des télécommunications.

Il avait donc la haute main sur tout le réseau téléphonique libyen, ce qui lui permettait d'organiser des écoutes contre les adversaires de son père.

Mouatassim, qui occupait les fonctions de conseiller pour les affaires de sécurité et gérait les questions de relations publiques de Kadhafi à l'étranger, est lui aussi peu connu, mais a joué un rôle de confident auprès de son père.

Quant à Aïcha, qui a étudié en France, son côté "glamour" a conduit certains à la qualifier de "Claudia Schiffer du Maghreb". Avocate, elle a participé à la défense de Saddam Hussein lors de son procès à Bagdad.

Elle fut également ambassadrice de bonne volonté de l'Onu, une fonction honorifique qui n'a pas résisté au soulèvement entamé en février.

Mardi 30 Aout 2011