Dr. Bakary Sambe du Centre d’Etude des Religions (CRAC-UGB) : « Les sociétés européennes et leurs communautés musulmanes doivent exorciser leur mal de vivre-ensemble ! »


Dr. Bakary Sambe du Centre d’Etude des Religions (CRAC-UGB) : « Les sociétés européennes et leurs communautés musulmanes doivent exorciser leur mal de vivre-ensemble ! »

Les événements qui viennent de secouer la France sont le signe tragique d’un « conflit de cultures et de visions du monde » qu’on a rarement cherché à résoudre d’après le Dr. Sambe. Tout au mieux, le traitement de cette question s’est limité à des solutions conjoncturelles alors que par le jeu des extrémistes politiques et religieux, on est comme obnubilé par les oppositions systématiques entre l’Islam et l’Occident. Et on en arriverait, aujourd’hui …au clash.

Le Dr. Bakary Sambe, coordinateur de l’Observatoire des radicalismes et conflits religieux au Centre d’Etude des religions de l’Université Gaston Berger décrypte pour Dakaractu, ce profond malaise qui traverse les sociétés européennes en général, dans leur rapport avec l’islam et leurs communautés musulmanes.

 

Avec les attentats et prises d’otage en France, on dirait que l’islam est de nouveau sur la sellette …

On ne peut faire porter de tels actes ni à l’islam ni aux musulmans, notamment ceux de France qui ont dans leur écrasante majorité, condamné les attentats. La position du Conseil Français du culte musulman a été sans équivoque et cette institution a été parmi les premières à élever la voix contre la folie meurtrière. Les jeunes présumés auteurs de ces attaques sont des citoyens français qui sont nés et qui ont grandi en France, le seul pays qu’ils connaissent et qui est le leur. La France compte des millions de musulmans, plus que nombre de pays de l’OCI, autant que la Jordanie et presque deux fois plus que le Koweït. L’une des questions qu’il faut se poser est surtout : comment en est-on arrivé là, à ce que des citoyens d’un pays s’attaquent à leur propre patrie ? Il y a quelque chose qui n’a pas fonctionné dans la politique d’intégration et d’insertion. Les frustrations accumulées ainsi que des incohérences dans la gestion de la diversité confessionnelle ont dû avoir leurs effets. Au-delà des solutions purement sécuritaires, la France devrait plutôt, pour prévenir des situations similaires, puiser dans les ressources dont elle regorge en matière d’éducation, de citoyenneté mais surtout d’ouverture philosophique au monde. Car, bien au-delà de la seule France, c’est le symbole même d’un vivre-ensemble, autour de valeurs universelles, en Europe qu’il faudra sauvegarder face aux sirènes des extrémismes et des discours de haine de tous bords.

 

D.A : Mais aujourd’hui, Dr. Sambe, la déchirure est bien là, on ne peut le nier…

 

 Ce conflit est profondément ancré dans une incompréhension dont jouent aussi bien les droites nationalistes européennes que les partisans d’une lecture moyenâgeuse des textes et des faits fondateurs de l’islam. Lorsque des textes d’Ibn Taymiyya comme Al-çârim al-maslûl ‘alâ shâti al-rasûl (l’épée brandie sur celui qui insulte le Prophète) sont pris, sans aucun recul, pour référence par les tenants du salafisme et que de l’autre côté, des islamophobes en déduisent une nature essentiellement violente de l’islam sans tenir en compte la diversité des réalités traversant cette religion, on en arrive au clash irréparable. Et la haine ne fait que produire encore plus de haine ; ce ne sera dans l’intérêt de personne. Ni de l’Europe, ni de ses citoyens musulmans.

 

Le conflit serait-il alors autour de la notion de liberté d’expression ?

D’un côté, nous avons les partisans de la défense d’une liberté d’expression poussée à son paroxysme et parfois utilisée à mauvais escient ou de manière inutile, même si on refuse quelques fois cette même liberté d’expression sur des sujets arbitrairement jugés non négociables. De l’autre, une catégorie agrippée sur ses croyances et ses symboles à travers lesquels elle est souvent stigmatisée, et dont la profanation n’est ni négociable ni compréhensible. Finalement, de part et d’autre, l’excès attise les passions et les attiseurs de haine – politiques comme religieux – n’ont plus qu’à souffler sur les braises. Devant une telle situation, l’attitude la plus aisée est d’entrer dans une logique de surenchère et un cercle vicieux d’action/réaction se referme comme un étau tuant complètement l’esprit de dialogue. C’est là où il faut être vigilant et de ne pas perdre le courage du dialogue et de l’apaisement devant la lâcheté de la haine et de la violence aveugle.

 

D.A : Les musulmans poseraient-ils alors problème aux sociétés européennes ?

Le véritable drame est qu’une telle situation arrive dans un pays comme la France qui a eu une longue tradition de vivre-ensemble avec l’islam même à des moments controversés de son histoire. On oublie que la France compte même plus de citoyens musulmans que certains pays membres de l’Organisation de Coopération Islamique. Il ne faudrait pas qu’on accepte les théories allant dans le sens d’une guerre entre l’Occident ou la France et l’Islam. Il s’agit d’un choc des extrêmes qui ont d’ailleurs tout intérêt à ce que prédomine un tel discours essentialiste. Après l’attaque meurtrière que la majorité des musulmans a tout de suite condamnée, d’incompréhensibles « représailles » surviennent contre des lieux de culte musulmans d’où des sermons de dénonciation émanent depuis ces attentats. Le pire serait qu’on en arrive à un point où les évènements prennent la tournure de la guerre intercommunautaire Si cela arrivait, il faudra malheureusement s’attendre à ce que cela déborde l’Hexagone et embrase d’autres pays voisins.

 

La cause de tels actes est-elle simplement religieuse ?

Il faut que la France cherche des solutions dans les ressources qui lui sont propres en termes d’intégration et de rétablissement de la justice sociale loin des discriminations et des stigmatisations inutiles. C’est pour cela qu’on doit être vigilant sur nos positions face à de tels évènements et surtout éviter les indignations sélectives si l’on veut rester conforme aux principes universels que l’on cherche à défendre que ce soit au sein des religions comme de la Vraie communauté internationale distincte du conglomérat des forts qui dictent la guerre comme la paix dans notre monde contemporain. Les damnés de la terre sont souvent vite séduits par des vendeurs d’illusions. La justice sociale à l’intérieur des Nations doit être renforcée par un tarissement des sources de l’injustice internationale et des politiques de deux poids-deux mesures dans ces mêmes instances internationales.

 

Mais tous parlent de liberté d’expression qui serait menacée par l’intégrisme religieux …

La liberté est un principe qui ne peut être à échelle variable. Soit on défend un principe ou on s’enferme dans le sectarisme et procède à l’indignation sélective. Cette schizophrénie de l’opinion dessert les causes nobles. Lorsqu’un journal pour sa  satire, un universitaire pour ses opinions ou un humoriste pour son spectacle sont attaqués, c’est la liberté d’expression dans son universalité qui est menacée comme quand une mosquée, une pagode, une église ou synagogue, un bois sacré ou des mausolées de saints, sont victimes de profanation, c’est la liberté de culte et de conscience qui est aussi frappée dans son cœur. Les esprits sont surchauffés, l’émotion à son comble, mais il ne faudrait pas déserter le combat pour la défense des principes et céder face aux minorités extrémistes aux voix amplifiées. Le choc des extrêmes tant redouté et qui semble se dessiner sous nos yeux n’apportera rien de positif à l’indispensable vivre-ensemble.

 

Avec ces évènements, y aurait-il une possibilité de cohabitation pacifique entre l’Islam et les sociétés européennes ?

La stigmatisation de l’Islam et des musulmans va malheureusement s’aggraver. Mais, aussi bien l’Europe que ses musulmans doivent avoir conscience de la nécessité d’exorciser leur mal de vivre-ensemble. L’Europe doit avoir l’intelligence de procéder à une forme d’ethnologie inversée et reconsidérer son regard sur elle-même car le monde a changé comme les sociétés européennes, elles-mêmes, sont dans une profonde mutation depuis des décennies sur le plan démographique comme culturel et religieux. L’autoglorification et l’apologie nombriliste ne peuvent plus avoir de sens. De même, les musulmans d’Europe comme d’ailleurs se doivent de sortir des oppositions fantasmagoriques entre l’Occident et l’islam qui n’ont plus aucun sens depuis la fin des aires culturelles et civilisationnelles homogènes par le biais de  la globalisation. La solution de leurs problèmes existentiels se trouve dans leur capacité de conjuguer leur passé et leur héritage au présent et de ne pas se livrer à une forme d’idolâtrie du passé ou d’ « entêtement rétrospectif » comme dirait Iqbal.

 

A la suite des premières caricatures publiées par le Jyllands posten avant d’être reprises plus tard par Charlie Hebdo, et, pour justement éviter les généralisations des deux côtés, je rappelais cette note très optimiste de Goethe qui disait : « J’ai toujours eu une grande estime pour la religion prêchée par Mohamed parce qu’elle déborde d’une vitalité merveilleuse. Elle est la seule religion qui me paraît contenir le pouvoir d’assimiler la phase changeante de l’existence - pouvoir qui peut la rendre alléchante à toute période. J’ai étudié cet homme merveilleux, et, à mon avis, loin d’être un antéchrist, il doit être appelé le sauveur de l’humanité. (...) J’ai prophétisé sur la foi de Mohamed, qu’elle sera acceptable à l’Europe de demain comme elle commence à être acceptable à l’Europe d’aujourd’hui ».

Mardi 13 Janvier 2015




1.Posté par lilou le 13/01/2015 11:14
Ouf heureusement que notre cher président mr Macky Sall n'apparaît pas sur la photo, j'aurais eu trop HONTE encore.

2.Posté par Serviteur du Prophète PSL le 13/01/2015 12:52
Bonjour chers internautes, je suis professeur d’espagnol à la retraite. Je voudrais réagir par anticipation à la parution des caricatures du journal Charlie hebdo du mercredi 14 janvier en demandant aux musulmans de ne pas les regarder. Je voudrais dire à ces caricaturistes que s’ils se croient libres, ils ne le sont justement pas car ils sont à la solde des mécréants. Malheureusement pour eux, on n’arrête pas la mer avec ses bras car ils auront beau user leurs crayons, notre prophète Mohamed PSL restera la meilleure des créatures, la perle de l’humanité. Mohamed PSL continuera d’illuminer nos cœurs, d éclairer notre foi et de guider nos pas, n’en déplaise à tous les Charlies .L islam continuera d être une religion montante car l’islam est paix, djam, salam, Mohamed PSL est tolérance, il est le symbole même du pardon. J’exhorte les musulmans du Sénégal à répondre à la violence satirique de ces fils de Satan par la vivification de notre foi par beaucoup de Salatou Allah Nabi pour qu’Allah SWT continue de prier sur nous est Allah qui vengera le prophète. A tous les sénégalais qui connaissent les secrets de la Sourate YASSINE je leur demande d’en user contre ces provocateurs de Charlie et tous ceux qui seront tentés de blasphémer.

3.Posté par Sané le 13/01/2015 15:35
Les dirigeants africains , se sont des complexés

4.Posté par Sylla le 14/01/2015 01:33
Contribution Cheikh SYLLA
Je ne suis pas Charlie
- Ce qui rassemble les hommes, c'est-à-dire la vie en communauté, le social dans la société, l’aide et l’entraide, la solidarité partage sont plus importants que ceux qui les divisent.
- A savoir qu’être différent est une richesse culturelle et non un danger de vie. Il faut savoir regarder l’autre avec un brin d’amour.
- Préférons la confiance mutuelle et l’espérance qu’aux soupçons.
- Et, estimes que c’est toi qui dois faire le premier pas de la paix et non l’autre.
- La religion musulmane doit bénéficier partout de l'estime et de la considération quelques soient les obédiences religieuses ou pas parce qu'elle est la PAIX proprement dite.
Cheikh SYLLA

5.Posté par Sylla le 14/01/2015 01:36
Contribution Cheikh SYLLA
Je ne suis pas Charlie
- Ce qui rassemble les hommes, c'est-à-dire la vie en communauté, le social dans la société, l’aide et l’entraide, la solidarité partage sont plus importants que ceux qui les divisent.
- A savoir qu’être différent est une richesse culturelle et non un danger de vie. Il faut savoir regarder l’autre avec un brin d’amour.
- Préférons la confiance mutuelle et l’espérance qu’aux soupçons.
- Et, estimes que c’est toi qui dois faire le premier pas de la paix et non l’autre.
- La religion musulmane doit bénéficier partout de l'estime et de la considération quelques soient les obédiences religieuses ou pas parce qu'elle est la PAIX proprement dite.
Cheikh SYLLA

6.Posté par lynx le 14/01/2015 15:15
Les MUSULMANS ne sont pas des ESCLAVES :La RELIGION est une affaire INDIVIDUELLE !



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